Les Houthis ont rompu leur apparent silence en frappant le 1er octobre le Cordelia Moon, suezmax battant pavillon panaméen, et le Minoan Courage, vraquier grec de 76 800 tpl, hissant le drapeau libérien. Ce sont les premières frappes, revendiquées et révélées publiquement, en 29 jours alors que le mouvement d'opposition yéménite serait déjà comptablesd’une centaine d’attaques contre la marine marchande. Les rebelles mènent une guerre parallèle en mer Rouge en solidarité avec le Hamas palestinien en conflit avec Israël et pour heurter la communauté internationale.
Le premier navire (par ailleurs identifié comme une des unités formant le gros bataillon clandestin transportant du pétrole russe sous embargo) a été heurté par un navire de surface sans équipage (USV) qui a perforé un ballast bâbord si bien que le pétrolier a pris l’eau mais l'équipage serait sain et sauf.
Méprise sur les liens de propriété
Les Houthis, qui revendiquent avoir lancé au préalable huit missiles et un drone, l’ont pris pour cible en raison d’une nouvelle méprise sur ses liens de propriété. Le navire n’a pas d’accointance britannique comme supposé par le mouvement Ansar Allah. Il appartient à une société panaméenne (Amber Shipping) et est géré par une société enregistrée en Inde (Margao Marine Solutions). Ce dernier était le gestionnaire d'un autre navire (le pétrolier Andromeda Star) qui a essuyé les tirs des Houthis en avril et qui avait été également associé à des intérêts britanniques.
Avant 2023, le navire était détenu par une entreprise basée au Royaume-Uni (Union Maritime Ltd), a été cédé ensuite mais la base Equasis ne renseigne pas l’identité du nouveau propriétaire. La méprise des Houthis pourrait venir de cette historique. Le Cordelia Moon, qui avait à son bord un service de sécurité privé armé, faisait route vers le nord en direction du canal de Suez après avoir quitté le port indien de Vadinar le 24 septembre.
Hodeïda en ligne de mire israélienne
Bien que touché sur ses citernes tribord, le Minoan Courage a poursuivi rapidement sa route vers le nord en direction du canal de Suez. Cette approche n’a pas été revendiquée par les Houthis.
Les deux navires se situaient à moins de 120 km et 180 km du port yéménite d’Hodeïda. Cette ville portuaire, qui sert de principal point d'entrée des marchandises et de l'aide humanitaire pour les zones tenues par les rebelles, avait été durement touchée deux jours avant dans le cadre du raid massif de l'armée israélienne contre les fiefs du Hezbollah mais aussi contre des infrastructures houthies. Des centrales électriques et des terminaux du port d’Hodeïda ont été particulièrement visés.
Les Houthis ont également revendiqué une troisième offensive, mais non confirmée par les forces marines sur place. Il s'agitait du Marathopolis, un porte-conteneurs de près de 5 000 EVP que le NOO grec (non exploitant-owner) Costamare Shipping affrète à Maersk. Le navire immatriculé à Malte devait arriver à Salalah (Oman) le 1er octobre. Il aurait été attaqué non loin de là.
Ces dernières frappes ont eu lieu alors que la mission européenne Aspides (Eunavfor) a accueilli la frégate grecque Spetsai en renfort. La guerre particulière poursuivie par les Houthis contre les navires marchands en transit s’était calmée ces dernières semaines, bien que le commandement américain ait intercepté des tirs sporadiques au cours du mois de septembre. Mais rien en comparaison des agressions récurrentes depuis la mi-décembre.
Adeline Descamps