Etude : sur autoroute, les routiers craignent défaut de concentration et somnolence

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La Fondation Vinci Autoroutes publie les premiers résultats d’une étude inédite sur le comportement au volant et la santé des conducteurs de poids lourd. 515 conducteurs ont été interrogés sur plusieurs aires de repos. Ils reconnaissent s'exposer au risque d'accident par la difficulté de concentration qu'ils ressentent durant les longs trajets, incitant à l'usage d'appareils connectés ; et à cause de la fatigue entraînant la somnolence.

Une étude inédite sur le comportement au volant et la santé des conducteurs de poids lourd vient d'être publiée par la Fondation Vinci Autoroutes. 515 conducteurs de 17 nationalités différentes - dont 50 % de Français - ont été interrogés sur plusieurs aires d’autoroutes dans le cadre d’une enquête terrain pilotée conjointement par Patricia Delhomme, directrice de recherche au Laboratoire de psychologie et d’ergonomie appliquées de l’Université Gustave Eiffel et par Loïc Josseran, professeur de santé publique à l'Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines et à l'hôpital Raymond Poincaré de Garches (AP-HP).

L’objectif des chercheurs et de la Fondation est de mieux connaître les comportements des conducteurs de poids lourd pour mieux orienter les messages de prévention qui leur sont destinés, aussi bien concernant leur sécurité et celle des autres usagers, que leur santé.

Conducteurs expérimentés


Les conducteurs de poids lourd interrogés sont plutôt satisfaits de leur vie professionnelle, estimant que leur métier leur procure un sentiment de liberté. Ils apprécient le caractère indépendant de leur travail. Parmi les principales contraintes de leur activité, ils mentionnent :

  • les embouteillages (3,9 sur une échelle allant de 1 à 9) ;

  • la distance par rapport à la famille (3,3 en moyenne mais 2,9 pour l’Europe de l’Ouest, 3,9 pour l’Europe du Sud et 4,1 pour l’Europe de l’Est plus éloignée) ;

  • le temps d’attente lors des chargements et déchargements (3,1) ;

  • l’imprévisibilité de la durée de leur mission (3,0).


Pour améliorer leur confort et leur hygiène de vie lors des pauses, ils souhaiteraient bénéficier de plus de services sur les aires et avoir la possibilité de mieux sécuriser leur marchandise contre les risques de vols qu’ils considèrent comme élevés.

Avec une expérience de conduite d’un poids lourd de 22 ans en moyenne, les conducteurs interrogés font largement preuve de confiance en leurs capacités de conduite. Ils s’attribuent ainsi en moyenne, sur une échelle de 1 à 5, une note supérieure à 4 pour gérer :

  • les manœuvres sur les parkings ou à quai (4,5),

  • les descentes (4,4),

  • anticiper et gérer les dangers de la route,

  • conserver des distances de sécurité,

  • leur fatigue (4,3).


Le risque d'insertion identifié


Selon le bilan 2019 publié par la Direction à la sécurité routière du ministère de l'Intérieur, la responsabilité présumée des accidents mortels impliquant des poids lourds et des véhicules légers, incombe à 37 % aux conducteurs de poids lourds et à 68 % aux automobilistes. Les conducteurs routiers sont 76 % à considérer qu’il est probable qu’ils aient un accident avec un véhicule léger.

C’est l’insertion entre deux camions qui se suivent qui est la situation à risque la plus fréquemment citée (62 %), devant une queue de poisson (54 %), un dépassement suivi d’une vitesse réduite devant le poids lourd (41 %) et un freinage brusque devant le poids lourd (39 %).

Conducteurs connectés


Les routiers  sont très connectés. Lorsqu’ils sont au volant, ils ont un usage intensif des outils connectés qui devient une source de distraction :

  • 83 % téléphonent en conduisant avec un système Bluetooth (dont 60 % souvent et très souvent) ;

  • 67 % programment le GPS ou règlent la radio en conduisant (dont 16 % souvent ou très souvent) ;

  • 27 % envoient des SMS ou surfent sur internet (dont 4 % souvent ou très souvent) ;

  • 26 % téléphonent sans kit mains-libres (dont 2% souvent ou très souvent).


L'alerte des bandes rugueuses


Signe de ces situations de manque de vigilance, près d’un conducteur de poids lourd sur deux (49 %) déclare avoir roulé sur les bandes rugueuses en bordure des voies au cours de l’année précédant l’enquête, et explique ces franchissements en premier lieu par l’inattention liée à l’usage du téléphone ou du GPS (45 %), puis par la volonté de se guider par le bruit lorsqu’ils franchissent des bandes (34 %) mais aussi par la somnolence (29 %).
Ils sont d’ailleurs 82 % à estimer que les bandes rugueuses les ont aidés à reprendre une trajectoire normale, et 49 % à considérer qu’elles les ont réveillés.

Déficit de concentration


La difficulté de concentration ou le « vagabondage de l’esprit » (mind wandering) est largement identifié comme source d’accidents ou de presque accidents. 22 % des conducteurs de poids lourd ayant eu un presque accident dans l’année précédant l’enquête l’expliquent par un déficit de concentration (et 16 % de ceux qui ont eu un accident dans les trois années précédant l’enquête).

La fatigue est mentionnée par 17 % des conducteurs ayant eu un presque accident (10 % de ceux ayant eu un accident dans les 3 ans).

La distraction liée au fait de faire autre chose que la conduite est évoquée par 9 % des conducteurs ayant eu un presque accident (5 % de ceux ayant eu un accident dans les 3 ans).

La somnolence, par 7 % des conducteurs ayant eu un presque accident dans l’année (et 4% de ceux ayant eu un accident dans les 3 ans).

Plus globalement, l’étude fait apparaitre que les conducteurs sujets à un déficit de l’attention ont effectivement eu plus d’accidents (2,5/6 vs. 2,3/6 pour les conducteurs qui n’ont pas de difficultés de concentration). Il en est de même des conducteurs les plus exposés à l’endormissement (2,2/4 vs. 2,0/4 pour les conducteurs qui n’ont pas de risque de s’assoupir).

Développer les actions de prévention


« La spécificité du métier de conducteur de poids lourd, qui nécessite une présence quotidienne sur les routes, leur apporte une grande expérience de la conduite, conclut Bernadette Moreau, déléguée générale de la Fondation Vinci Autoroutes. Pour autant celle-ci ne les prémunit pas contre les comportements à risques, liés notamment à l’usage des distracteurs, aux sautes de concentration ou à la somnolence ; autant de facteurs d’accidents qui peuvent avoir des conséquences lourdes pour eux-mêmes ainsi que les autres usagers et intervenants sur la route. Les opérations de sensibilisation sur les aires, ou via les réseaux sociaux, doivent contribuer à informer et orienter les conducteurs en demande d’accompagnement. »

« Parmi les recommandations qui peuvent être formulées à partir des enseignements de cette étude, figurent le développement d’actions de prévention, voire de formations, à destination des autres usagers de la route, pour les sensibiliser aux problématiques spécifiques rencontrées par les conducteurs de poids lourd (par exemple les angles morts), l’intégration dans l’ensemble des services qui leur sont proposés de la diversité linguistique inhérente à leur métier, ou encore l’installation à proximité des parkings qui leur sont réservés de dispositifs permettant de pratiquer des exercices physiques (agrès, parcours santé, …) », estime Patricia Delhomme, directrice de recherche au Laboratoire de psychologie et d’ergonomie appliquées de l’Université Gustave Eiffel.

Dans cet objectif, une opération de sensibilisation a été organisée le 1er juin par la Fondation Vinci Autoroutes, en partenariat avec la Fondation Carcept Prev, sur 3 aires du réseau Vinci. Les conducteurs routiers ont été invités à participer à plusieurs ateliers animés par des spécialistes du sommeil, des nutritionnistes, des sophrologues, des préparateurs sportifs et les ambassadeurs des deux fondations, pour les informer sur les risques et leur donner des conseils pratiques pour mieux les prévenir.




Attention au personnel intervenant sur l'autoroute !


Les poids lourds représentent 14 % du trafic sur autoroute mais sont impliqués dans plus d’1 accident sur 2 affectant du personnel en intervention. Une situation qui s’explique notamment par le fait que ceux-ci circulent sur la partie droite de la chaussée où se trouvent plus fréquemment les intervenants et les balisages.

Les conducteurs routiers ont bien conscience des circonstances qui peuvent générer un accident avec un patrouilleur ou un véhicule d’intervention. Pour eux, le risque le plus fort apparaît lorsqu’ils sont dépassés par un autre poids lourd, alors qu’ils déboitent pour éviter le véhicule d’un patrouilleur en intervention (2,9 sur une échelle de 1 « très faible » à 5 « très importante »), puis lorsqu’ils sont derrière un camion et qu’ils ne voient le patrouilleur qu’au moment où ce camion déboite devant eux (2,7/5) et enfin dans une situation impliquant uniquement un patrouilleur (1,25/5).

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