Yoplait : une externalisation maîtrisée

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La deuxième marque mondiale de produits laitiers a divisé par dix le nombre de ses plates-formes logistiques en France. Il en reste quatre dont deux confiées à des prestataires extérieurs. Le fabricant garde toutefois la main mise sur les calculs de niveaux de stocks et la gestion des relations directes avec ses clients finaux.

Pour Gérard Serre, directeur logistique de Yoplait, l'évolution des procédures de la chaîne d'approvisionnement du groupe est étroitement liée à la rapide transformation de pratiques du commerce et de la distribution en général qui a émergé vers le milieu des années 1980.

Deuxième marque de produits laitiers dans le monde, Yoplait est implanté aujourd'hui dans quelque 50 pays. "S'agissant de produits ultra-frais, notre représentation dans ces divers pays dépend directement de la distance entre les marchés de consommation et l'implantation des sites de production. Ainsi, pour ce qui concerne l'Europe, nous disposons principalement de bureaux commerciaux, la distance limite avoisinant les 2 000 km". Cela dit, l'Hexagone représente tout de même la moitié des revenus de Yoplait pour sa gamme de yaourts, produits phares du fabricant.

"Ce qui s'est passé durant les années 1980 explique la mutation que nous avons opérée depuis, notamment en termes d'infrastructures en France. Pour résumer, nous sommes passés progressivement de quelque 40 dépôts sur le territoire national à aujourd'hui 4 plates-formes logistiques de distribution. Ce basculement tient à l'émergence rapide qui s'est produite à travers le déploiement des hypermarchés dans les zones péri-urbaines et la mutation de l'activité de certains grands entrepôts en statut de grossistes". Par voie de conséquence, de nombreux magasins se sont fédérés autour de ces grossistes afin de réduire leur coût d'approvisionnement. Versant Yoplait, l'évolution s'est orientée vers un schéma de distribution plus transversal corrélé à une centralisation des centres d'entreposage. "En une petite poignée d'années, nous avons vécu une diminution drastique du nombre de points de livraison passant de quelque 70 000 petites épiceries à desservir chaque jour à actuellement 200 lieux de desserte correspondant soit à des grossistes soit à des entrepôts de la grande distribution."

Parallèlement à ces phénomènes, il s'est produit une véritable explosion du nombre de références produits à gérer : "En 1975, nous avions peut-être une quinzaine de références, aujourd'hui nous en gérons entre 200 et 300 pour le compte des hypermarchés et des GMS plus largement. Du reste, il s'agit là d'un fait qui ne touche pas seulement notre secteur. On assiste en fait à un engouement pour la «customisation» des articles pour satisfaire une demande à la recherche d'articles plus personnalisés et raffinés", poursuit Gérard Serre.

Spécialiser les usines avec l'explosion du nombre des références

En pratique, ces divers facteurs ont abouti, côté distribution, à l'exploitation de seulement quatre sites logistiques proches des centres de consommation denses, et côté production, à la mise en oeuvre de quatre unités de production situées à proximité d'étables industrielles. "Avec l'explosion du nombre de références, nos anciennes usines qui autrefois traitaient chacune l'ensemble de nos références ne pouvaient perdurer en l'état. Il a fallu spécialiser chacune d'entre elles sur une partie de l'ensemble de nos références actuelles. Cette transformation allait de pair avec les progrès technologiques de fabrication et le besoin de mutualiser nos moyens de production pour d'évidentes raisons économiques."

Le profond bouleversement conduit par Yoplait, tant du point de vue de son schéma de production que de celui de la distribution s'était avéré être incontournable compte tenu des contraintes spécifiques tenant d'une part à la valeur ajoutée relativement peu élevée des produits type yaourts et aux fortes exigences logistiques que ces derniers requièrent, s'agissant de produits vivants assujettis à la gestion d'une chaîne de froid rigoureuse et à des dates limites de consommation de courte durée. "Aujourd'hui, pratiquement 100 % des commandes prises le matin sont livrées le soir même, et ce, six jours sur sept", précise Gérard Serre.

Les quatre plates-formes logistiques du fabricant, opérationnelles depuis deux ans, correspondent aujourd'hui à un "bon point d'équilibre" selon l'expression de Gérard Serre qui ne manque pas de préciser qu'une modification des schémas généraux est toujours envisageable tous les trois ou quatre ans en fonction de l'évolution de la demande de ses clients. "Nous parvenons désormais à un minimum de taux de rupture grâce à l'optimisation de nos niveaux de stocks. Toutefois, il peut parfois arriver des «couacs». Dans ce cas de figure, nos systèmes d'informations nous offrent plusieurs options. Tout d'abord celle de pouvoir, de manière très précoce, informer notre client qui est du coup moins pris au dépourvu. Par ailleurs, nous pouvons temporairement lui proposer immédiatement des produits de substitution ou encore faire appel à de la sous-traitance afin de nous donner une plus grande souplesse capacitaire", indique Gérard Serre.

Des prestataires multi-clients

Les changements précités ont conduit Yoplait à créer une direction globale de la logistique en 1990 afin de rationaliser et de fournir plus de transversalité en termes de visibilité de l'ensemble de la supply chain. "Il nous fallait donc créer une entité cohérente assez rapidement. Or nous ne disposions pas à l'époque en interne de toute l'expertise voulue pour mener cette tâche à bien. De ce fait, nous avons confié deux des quatre sites logistiques à des prestataires extérieurs.

A une condition toutefois, celle que les-dits prestataires ne créent pas de plates-formes qui nous soient totalement dédiées. Ils se devaient ainsi de constituer des sites multi-clients afin que nos coûts en prestation soient raisonnablement maîtrisés. C'est ainsi que Hays Logistics a implanté une plate-forme sur Givors, et que Logistique Distribution Froid (LDF), du groupe Giraud, gère un autre site basé à Toulouse", détaille Gérard Serre. Toutefois, le fabricant désire garder la main mise sur le pilotage des sites sous-traités : "Nous continuons à gérer nous-mêmes les approvisionnements et le calcul des niveaux de stock à maintenir. De plus, nous voulons rester en contact direct avec nos clients finaux. Nos prestataires ayant principalement pour mission de mener à bien les fonctions opérationnelles en entrepôt".

Quant aux sites propres à Yoplait, le fabricant a décidé de moderniser et d'agrandir en région parisienne son entrepôt d'Argenteuil et d'opter, pour la région Ouest, pour une plate-forme basée au Mans. "Nous avons conservé ces deux sites pour plusieurs raisons. D'une part, sur Argenteuil, nous disposions d'équipes suffisamment compétentes pour accompagner les changements prévus. D'autre part, nous avons choisi le Mans, car nous y possédions déjà une importante usine de production et d'équipements tels que des chambres froides qui pouvaient correctement servir de socle aux transformations futures. En outre, la proximité entre le site de production et la plate-forme logistique nous procurait des gains en coût de transport".

Du point de vue informatique, la gestion de stock de l'ensemble des quatre plates-formes est pilotée par un progiciel unique, Logistar, développé par DSIA, le département informatique d'Hays Logistics. "Si ce progiciel nous donne toute satisfaction, le véritable enjeu se situe plutôt aujourd'hui vers la prévision des ventes afin, en particulier, d'articuler le mieux possible les ordres à transférer à nos fournisseurs de façon anticipée et à les mettre en phase de manière intégrée vis-à-vis de l'ordonnancement de nos campagnes de production". Au plan informatique, Yoplait est actuellement sur le point d'achever une intégration complète incluant notamment FuturMaster, un progiciel de prévision de gestion des ventes, édité par la firme du même nom, que le fabricant utilise déjà depuis quelques années : "En anticipant le mieux possible la demande, nous pouvons modifier à moindre frais nos plans de production, sachant que le temps de réactivité d'une usine prend toujours nécessairement plus de temps que la réception d'une demande client particulière", indique Gérard Serre. L'intégration informatique dont parle ce dernier recoupe la notion de transversalité déjà évoquée en impliquant, entre autres, dans la chaîne des données, les services commerciaux, marketing, le tout accompagné d'une mise en mémoire de tous les événements : opérations promotionnelles, pics de demande saisonnière, etc. "Cependant, au-delà des systèmes d'informations eux-mêmes, c'est la détermination des équipes, leur capacité à dialoguer et à se réunir, qui fait ou non la réussite d'une conduite de changement", souligne Gérard Serre... Un des objectifs de ce dernier est également de faire en sorte qu'une confiance réciproque s'intensifie entre sa firme et ses clients distributeurs. "En nous confiant certaines de leurs opérations commerciales à l'avance, les hypers sont à même de nous aider à bâtir plus judicieusement un certain nombre de scénarios en fonction d'hypothèses, tirées entre autres choses de l'expérience d'événements proches déjà vécus. Nous serons alors en passe de mesurer plus finement le degré d'incertitude de nos prévisions de ventes."

Traçabilité = normalisation des codes

D'ores et déjà, l'engagement pris par Yoplait dans cette démarche a significativement porté ses fruits : "Autrefois, nous ne pouvions guère avertir nos unités de production qu'au jour le jour. Désormais, nous pouvons leur passer des commandes 7 à 10 jours à l'avance". Avec l'avantage, côté fournisseurs de Yoplait, d'être à même de mieux lisser leur propre production et de concéder à Yoplait des tarifs négociés plus avantageux. "Le contrôle que nous avons dorénavant sur nos niveaux de stock nous autorise à entreposer seulement un jour de stock de sécurité au lieu de trois à quatre jours de vente auparavant. C'est un avantage particulièrement appréciable s'agissant de denrées aussi périssables". Maître mot en agroalimentaire, et particulièrement en matière de produits ultra-frais, la traçabilité est loin d'être un vain mot pour Gérard Serre : "Pour moi cette notion est en relation directe avec celle de la codification. Depuis maintenant presque trois ans, nous avons mis en place, en connexion avec une informatique spécifique, un système de code normalisé par le Gencod EAN. Elle nous offre la faculté d'avoir un tracing aussi bien en amont qu'en aval, sachant qu'entre ces deux versants, nous récréons, à partir des codifications initiales exploitées avec nos fournisseurs, d'autres codes utilisables cette fois par nos client finaux". Une mise en place qui s'est révélée fort délicate compte tenu du nombre de données, de l'ordre de plusieurs dizaines, à intégrer dans les codes. Parmi elles, on peut citer aussi bien des informations liées à la production (heures et jour de fabrication, etc.) que des indications portant sur l'ensemble des composants formant le produit fini (nature du plastique du pot de yaourt, provenance du ou des fruits, types de ferments utilisés, dosage en sucre...).

"Dans un proche avenir, je souhaite qu'une collaboration, via un partage d'informations plus approfondi, s'instaure entre fournisseurs et clients". Ici, Gérard Serre évoque surtout un partage de données informatisé portant sur le suivi et la gestion des flux physiques. Se voulant exprès caricatural pour illustrer son propos, le directeur logistique de Yoplait fournit l'exemple d'un chef de rayon constatant un jeudi de la semaine des manques pour remplir ses linéaires. "Ayant de moins en moins de stocks sur place, celui-ci va le jour même passer commande pour combler les manques. Or les produits manquants ont toutes les chances d'être placés en linéaire le samedi qui suit, jour où les volumes de ventes sur les-dits produits ne correspondent pas forcément aux quantités commandées le jeudi précédent. Bien sûr, l'expérience aidant, ce genre de dérapage est plutôt limité. Mais une chose est sûre, rien n'est encore formalisé à ce jour pour éviter optimalement ce genre d'incident". La tâche, sur ce point, est délicate pour le distributeur, reconnaît Gérard Serre, dans la mesure où une enseigne a à gérer un nombre beaucoup plus important de fournisseurs qu'un fabricant comme Yoplait.

Yoplait exploite FuturMaster pour ses prévisions de ventes.

Yoplait utilise depuis plusieurs années déjà le progiciel FuturMaster, édité par la firme du même nom, tant en France qu'à l'étranger pour ses prévisions de vente et la planification logistique de ses plates-formes. D'une manière plus générale, depuis l'an 2000, FuturMaster a complété son offre de prévision par une offre de planification et d'optimisation avec l'intégration du moteur d'optimisation Cplex de Ilog. Aujourd'hui FuturMaster est un véritable APS (Advanced Planning Scheduling) qui permet d'optimiser la supply chain à travers une approche globale.

D'une manière générale, ces nouveaux modules de planification ont été déployés aujourd'hui dans 28 sites industriels dans le monde (Heineken, Ela Medical, Fleury Michon, Stalaven, Bongrain...).

La suite logicielle FuturMaster est développée depuis 11 ans par une équipe d'ingénieurs qui a capitalisé l'ensemble des pratiques de prévisions, de planification et d'optimisation de la supply chain. En septembre 2002, 180 sociétés représentant plus de 1 000 utilisateurs optimisent leur chaîne d'approvisionnement avec FuturMaster, parmi lesquels on peut citer Sara Lee, Unilever Bestfoods, Seb, Lactalis, Hennessy, Moët, Veuve Clicquot, Bacardi Martini, Campari International, Parfums Christian Dior, Guerlain, Givenchy, Aventis Pasteur, Sanofi, Ela Medical, Pierre Fabre, Carrefour...

Un seul progiciel de gestion. des stocks pour les 4 plates-formes. de Yoplait.

Yoplait est aujourd'hui un des leaders du marché des produits frais dans le monde et un acteur majeur sur ce marché en France. Son organisation logistique s'est consolidée au fil des évolutions des dernières années sur ce secteur d'activité pour arriver à une réponse adaptée aux contraintes de la production des produits lactés frais et aux exigences toujours renouvelées de ses clients au premier rang desquels la grande distribution agit comme moteur et relais d'attentes croissantes des consommateurs en matière d'étendue de gamme, fraîcheur de produits, sécurité alimentaire et traçabilité ainsi que réduction permanente des coûts.

Yoplait dispose aujourd'hui en France de quatre centres d'éclatement logistiques, directement accolés aux usines de production (Le Mans, Vienne, Monéteau et Ressons) et de quatre plates-formes logistiques (Argenteuil, Le Mans, Givors et Saint-Jory). Parmi ces dernières, deux sont sous-traitées : Givors (Hays Logistics) et Saint-Jory (Logistique Distribution Froid du groupe Giraud).

L'ensemble de la chaîne logistique d'exécution de Yoplait utilise le système d'information Logistar de Hays DSIA comme outil de pilotage d'activité en entrepôt sur les huit sites logistiques français.

Le système a été plus récemment complété par le système Logistar e-tracking qui assure une traçabilité complète non seulement des produits en tout point de la chaîne mais également des événements logistiques ayant affecté les produits (réception, préparation, expédition...).

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