Un développement « accéléré » du poids lourd

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Un développement « accéléré » du poids lourd

Les partisans de la motorisation au gaz entendent défendre leur modèle face à l’hydrogène, avec un bilan écologique plus favorable que le diesel et surtout immédiatement accessible.

Alors que le plan de relance annoncé par le gouvernement fait la part belle à l’hydrogène, les acteurs du GNV ont tenu à souligner les intérêts de la motorisation gaz, notamment pour les véhicules lourds, lors d’un point presse organisé en septembre dernier. Selon l’Association française du gaz naturel véhicule (AFGNV), le GNV peut être considéré comme une solution « low tech » pour améliorer la qualité de l’air : il émet deux fois moins de NOx qu’un Euro VI diesel en conditions réelles d’exploitation et 89 % de moins de particules que le seuil de la norme Euro VI. Cette solution est surtout immédiatement accessible à tous, et non dans plusieurs années lorsque les camions à hydrogène seront techniquement prêts et économiquement accessibles. Un point de vue partagé, par exemple, par le constructeur Volvo Trucks. « Bien que des progrès prometteurs aient été réalisés dans la technologie des piles à combustible à hydrogène, il reste des obstacles pratiques et financiers à surmonter avant qu’elle puisse apporter des avantages importants sur le plan climatique dans le secteur du transport lourd », déclare Lars Martensson, directeur de l’environnement et de l’innovation de Volvo Trucks. À court terme, le constructeur suédois mise également sur le gaz comme alternative au diesel.

Autre atout indéniable pour les livraisons urbaines et souvent nocturnes, l’émission de bruit est réduite de 50 % avec un camion gaz (la plupart des véhicules GNV enregistrent un niveau sonore en deçà de 60 dB) et tous les véhicules bénéficient de la vignette Crit’Air 1, qui les autorise à circuler lors des pics de pollution et dans les zones à faibles émissions (ZFE). Un bon point alors que de nombreuses municipalités de grandes villes veulent verdir leur programme de transport. Selon le dernier comptage de l’AFGNV, plus de 22 000 véhicules GNV circulent en France, dont 10 491 véhicules légers, 4 087 poids lourds, 2 004 bennes à ordures ménagères et 3 865 bus et cars. Fait notable, la France détient le plus gros parc circulant de poids lourds d’Europe. Poussées par les incitations des chargeurs et les projets de ZFE, les ventes de camions gaz progressent de 20 % chaque année depuis 2014, avec + 26 % en 2019. Le mouvement ne devrait pas fléchir, puisque la France a été condamnée par le Conseil d’État en juillet dernier sur la qualité de l’air, avec l’obligation de prendre des mesures avant le début de 2021 sous peine d’astreintes (cf. encadré Le Conseil d’État ordonne de prendre des mesures urgentes). « On constate un développement accéléré sur le poids lourd avec les annonces de ZFE, qui commence également à démarrer sur l’utilitaire léger », analyse Gilles Durand, secrétaire général de l’AFGNV. Le marché de l’utilitaire sera de plus stimulé par l’arrivée de nouveaux acteurs comme Piaggio, qui prévoit de lancer un utilitaire au gaz en 2021. Côté ravitaillement, la France comptait 149 points d’avitaillement fin août 2020 et devrait en totaliser 235 à fin août 2021, avec actuellement une offre supérieure à la demande, selon Gilles Durand.

20 % de bioGNV injecté dans le réseau en 2020

Reste un point d’amélioration. Les émissions de CO2 libérées par un véhicule roulant avec du méthane ne présentent pas une différence considérable par rapport à celles d’un véhicule diesel. Le gain est estimé entre 10 à 15 %, selon l’AFNGV. Les transporteurs du projet Equilibre ont pour leur part constaté des taux d’émissions « majoritairement à l’avantage du GNV », avec toutefois de fortes variations selon les modèles et les usages (de -20 % de rejet à + 7 %). De fait, seul le bioGNV permet d’abaisser les émissions de CO2 de 80 % par rapport au diesel, de manière théorique tout du moins : en se basant sur l’analyse du puits à la roue, on considère que le CO2 libéré à l’échappement est équivalent au CO2 absorbé par les végétaux méthanisés. Pour cette raison, les acteurs de la filière tentent de faire basculer l’offre vers le bioGNV. « Le bioGNV, c’est le carburant de l’avenir et d’aujourd’hui », lance à cet effet Philippe Pieri, directeur stratégie, achats et développement durable de Carrefour dont le groupe s’est massivement porté vers le bioGNV (cf. interview). « Le taux d’incorporation de biométhane dans le GNV est passé de 12 % en 2018 à 17 % en 2019 et devrait être supérieur à 20 % en 2020, en phase avec l’objectif de 100 % de biométhane dans le GNV fixé pour 2050 », lui répond Gilles Durand. En septembre 2020, la France comptait 155 sites de méthanisation produisant du biométhane injecté dans les réseaux de gaz pour être utilisé notamment comme carburant sous forme de bioGNV.

Des chiffres ambitieux pour la motorisation GNV

À travers la program-mation pluriannuelle de l’énergie, les pouvoirs publics ont fixé des objectifs ambitieux de développement du GNV/bioGNV en France pour 2028. Jusqu’à 845 stations en 2028, soit plus de cinq fois plus qu’aujourd’hui, 40 000 VUL et 25 000 poids lourds. De plus, en 2050, 60 % des poids lourds immatriculés devraient rouler au bioGNV/GNV.

Le Conseil d’État ordonne de prendre des mesures urgentes

La France a déjà été sanctionnée par deux fois par le Conseil d’État sur la qualité de l’air. En juillet 2017, la plus haute juridiction française a enjoint au gouvernement de mettre en œuvre des plans permettant de baisser, dans 13 zones du territoire et dans le délai le plus court possible, les concentrations de dioxyde d’azote (NO2) et de particules fines (PM10) en dessous des seuils limites (directive européenne du 21 mai 2008). Plus récemment, le 10 juillet 2020, le Conseil d’État a ordonné une seconde fois au gouvernement de rendre des mesures pour réduire la pollution de l’air. Cette fois, les juges ont prononcé une astreinte de 10 millions d’euros par semestre de retard si les obligations ne sont pas remplies dans les six mois.

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