Stimuler la demande en camions électriques

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L’électrique était à l’honneur au Salon de la mobilité décarbonée Drive to Zero, les 28 et 29 mai à Paris. L’offre véhicule-borne s’améliore dans le transport routier lourd. Le soutien public semble encore insuffisant, voire complexe.

Drive to Zero s’est ouverte au lendemain de la publication de l’arrêté créant le programme E-Trans pour financer des véhicules lourds électriques à batteries. Si plusieurs de ses modalités sont à préciser par l’ADEME, 2 100 véhicules pourraient en bénéficier, dont 85 % de poids lourds. De 2024 à 2028, E-Trans mobiliserait 130 M€ avec pour périmètre l’acquisition, la location longue durée et le rétrofit. Pour le TRM, un premier dispositif d’aides a été dévoilé par l’ADEME le 12 juin, doté d’une enveloppe de 20 M€. Avec une clôture fixée au 19 août 2024, les entreprises éligibles à ces aides ont moins de 250 salariés et ont un chiffre d’affaires annuel inférieur à 50 M€ ou leur bilan n’excède pas 43 M€. Les véhicules de catégories N2 et N3 pouvant en bénéficier ont un PTAC égal ou supérieur à 7,5 t. Enfin le taux d’aide s’élèvera à 50 % maximum appliqué aux surcoûts avec pour plafonds : 20 000 € par véhicule de catégorie N2, 65 000 € par véhicule N3 non tracteur, et 90 000 € par tracteur N3. Les 110 M€ restant devraient être proposés via le mécanisme des Certificats d’économies d’énergie..

Un autre point distingue le programme E-Trans, par rapport aux appels à projets lancés précédemment pour financer des véhicules lourds électriques : il ne couvre pas les bornes de recharge dans l’immédiat. Dans les allées du Salon, cette nouvelle mouture a suscité diverses réactions. Les fournisseurs de bornes de recharge sur site, à l’image de Chargepoly et d’Altens, semblent comprendre ce virage. Ils rappellent que « le prix d’un camion électrique est encore très élevé et très supérieur à un véhicule diesel équivalent ». Il leur semble donc logique « de concentrer l’effort et les aides sur l’achat du poids lourd qui aura un effet d’entraînement sur l’ensemble de l’écosystème du transport routier électrique ». Selon les données de la direction générale des Infrastructures, des Transports et des Mobilités, présentées lors d’un webinaire fin avril, le prix moyen d’un porteur électrique varie entre 120 000 € pour « un moins 12 tonnes » et 250 000 € pour « un 26 tonnes ». Il s’élève à 480 000 € pour un tracteur électrique. Bien qu’en hausse de 273 % l’an passé, on ne recensait que 508 immatriculations de camions électriques en France en 2023… D’après Florence Berthelot, « les transporteurs manquent de visibilité pour investir ». La déléguée générale de la FNTR constate aussi que « leurs capacités d’investissement sont limitées. Pour réussir la transition énergétique dans la filière, il faut mobiliser tous les acteurs, les établissements financiers, les pouvoirs publics et les chargeurs compris. Les chargeurs doivent comprendre que la transition énergétique a un coût et que le transport routier est appelé à devenir plus cher ».

Quid de la recharge en itinérance

À titre de comparaison avec le prix d’un poids lourd électrique, il faut compter 30 000 € en moyenne pour une borne adaptée ; les prix variant entre 2 000 et 100 000 € selon le modèle, entre charge lente ou rapide, et selon les éventuels travaux à réaliser. Les fournisseurs de bornes sur site rappellent que « l’aménagement de ces infrastructures au sein des dépôts et agences des transporteurs bénéficie aussi d’aides publiques », dont certaines sont issues du programme Advenir, piloté par l’association Avere-France. Or, de l’avis de plusieurs analystes comme de l’Union européenne, l’électrification du transport routier lourd avec batteries est appelée à s’étendre aux longues distances. Pour ces trajets, les transporteurs auront besoin de points de recharge itinérants, rapides ou ultrarapides, pour que cette solution soit pertinente dans les plans de transport nationaux et européens, mais aussi avec les temps de service des conducteurs. Sauf que pour ces points de recharge itinérants, rapides ou ultrarapides, « il n’existe plus d’aide avec le nouveau dispositif », déplore Alexandre Hélibert. Le porte-parole de Milence, coentreprise fondée par Daimler Trucks avec les groupes Volvo et Traton, assure que « le transport routier de marchandises électrique n’a pas vocation à être subventionné à terme. Dans l’immédiat, en revanche, il a besoin d’être soutenu financièrement pour acquérir des véhicules et aménager des bornes sur site et en itinérance ».

Créé en 2022, Milence ambitionne de construire 1 700 points de recharge électriques au cours de ses cinq premières années d’existence, soit d’ici 2027. Au sein de hubs de recharge ultrarapide, proposant aussi des services aux conducteurs, la réalisation de cette feuille de route représente un investissement estimé à plus de 500 M€ ! Après Venlo aux Pays-Bas fin 2023, l’entreprise a ouvert son premier hub en France en avril à Heudebouville, près de Rouen. Elle prévoit d’en inaugurer un second cet automne près de Perpignan. « Il s’agit d’investissements privés très importants engagés sur le long terme. L’électrification du transport routier lourd peut être durable sur les plans économique, social et écologique à condition d’avoir le bon accompagnement aujourd’hui », insiste Alexandre Hélibert, citant l’exemple de l’appel à projet européen Afif (encadré ci-dessous).

Offres clés en main sur site

De l’aveu de sa directrice générale Christelle Vives, Izivia souhaite investir aussi « dans le déploiement de hubs de recharge ultrarapide dédiés aux poids lourds le long des corridors de transport du réseau routier et autoroutier européen ». Pour la filiale d’EDF, ces infrastructures seraient financées « à 100 % par Izivia et ses partenaires ». Dans l’immédiat, l’entreprise se concentre dans l’installation de bornes sur site avec une offre globale, clé en main. « Izivia a déjà noué des partenariats avec des constructeurs de véhicules industriels, tels que MAN Trucks et Iveco, et plusieurs clients dans le transport routier lourd électrique comme Elis, France Boissons, Paprec et Franprix. » Se présentant comme un « intégrateur de solutions pour poids lourds, Izivia et les autres filiales du groupe EDF accompagnent les transporteurs de bout en bout, depuis l’identification du besoin jusqu’à l’exploitation des bornes et des véhicules électriques », explique Christelle Vives. Standard dans les offres de plusieurs fournisseurs tels que Chargepoly ou Altens, l’offre proposée dimensionne les bornes à partir d’une étude de besoins puis les fournit, les installe et les met en service. La disponibilité des bornes est garantie avec la possibilité d’opter pour des dispositifs « Smart charging » pour optimiser le coût du kWh. Certains fournisseurs de bornes, tels que Izivia, intègrent le montage des dossiers de financement, subventions publiques incluses, dont celles du programme Advenir.

Le champ des possibles s’élargit

L’éloignement d’un réseau haute tension n’interdit pas d’envisager l’électrification d’une partie de sa flotte et de s’équiper en bornes de recharge ultrarapide de haute puissance. Cette offre est proposée par Nidec Conversion, revendiquant le leadership mondial des systèmes de stockage d’énergie stationnaire et des systèmes de conversion électrique. Comptant notamment l’expressiste GLS parmi ses clients en Italie, Nidec associe le stockage d’énergies sur batteries avec des convertisseurs AC/DC et des bornes ultrarapides. « Le transporteur dispose ainsi de recharges haute puissance et performantes, quels que soient l’endroit et la puissance du réseau disponible », assure Gilbert Khawam, responsable de Nidec Conversion, présent sur le Salon Drive to Zero.

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