C’est au sein du centre de conférences de l’Institut Pasteur à Paris que s’est tenue la cinquième édition des Rendez-vous du transport et de la logistique écoresponsables le 14 mars dernier. Organisé par le programme d’Engagements volontaires pour l’environnement (EVE), mené par l’Ademe, Eco CO2 et des organisations professionnelles (AUTF, FNTR, TLF, OTRE, CGF et FNTV) cet événement a réuni près de 500 professionnels (chargeurs, transporteurs, commissionnaires). Objectifs : échanger sur la thématique de la valorisation de la coopération entre acteurs du secteur dans une dimension territoriale. Ce fut également l’occasion de mettre à l’honneur les lauréats 2023 des trophées EVE pour leurs initiatives en matière de décarbonation. « Pour réussir la transition écologique du transport et de la logistique, il faut une dynamique d’aménagement durable du territoire, avec un raisonnement en bassins de circulation », souligne Jean-Marc Zulesi, député des Bouches-du-Rhône et président de la commission développement durable et aménagement du territoire à l’Assemblée nationale.
Au cours de cet événement, une table ronde a été organisée autour de l’ancrage territorial des initiatives de décarbonation des entreprises. « La vraie difficulté de la décarbonation, c’est qu’elle concentre plusieurs paramètres parmi lesquels la stratégie de l’entreprise, le soutien des chargeurs dans la démarche, la disponibilité des technologies en fonction des moyens, la volonté politique, etc. », souligne Christophe Schmitt, directeur des relations institutionnelles chez Heppner (67). Dans ce cadre, il est indispensable de collaborer avec les acteurs du territoire pour le passage aux énergies alternatives. Au risque de connaître des difficultés dans le déploiement de ses solutions décarbonées. « Par exemple, nous nous sommes dotés de 16 véhicules électriques, mais il faut investir également dans les infrastructures sans compter les travaux pour adapter le réseau pour la puissance », indique Christophe Schmitt. Des déconvenues qu’a également connues Jean-Claude Barcos, PDG des transports éponymes dans les Pyrénées-Orientales (65) : « Il y a quelque temps, nous nous sommes dotés d’une station d’avitaillement en gaz pour nos véhicules. Cette station devait, à la base, être alimentée localement par l’activité agricole. Mais les acteurs du territoire se sont finalement rétractés, et nous avons dû opter pour un avitaillement national, qui a été atteint par les tensions géopolitiques récentes. » Pour avoir plus de poids au niveau territorial, certains acteurs économiques se regroupent en clusters, tels que Ouest Boissons, distributeur de boissons auprès des professionnels de l’hôtellerie-restauration. « Nous avons intégré Bretagne Supply Chain pour pouvoir mieux travailler sur la décarbonation en lien avec les élus, la Dreal et l’Ademe », indique Pascal Gérardin, directeur logistique d’Ouest Boissons.
Pour réussir la décarbonation, il est judicieux de tenir compte non seulement des usages, mais aussi des spécificités liées à chaque région. « Chaque territoire a sa transition énergétique, et travaille sur des volets différents. C’est pour cela qu’Heppner travaille étroitement avec les directeurs régionaux du groupe pour orienter les projets », précise Christophe Schmitt. L’ensemble des intervenants s’accorde à dire qu’il est important de s’intéresser à toutes les technologies et tous les modes de transport, étant complémentaires. Et pour abaisser le coût d’investissement nécessaire, le collectif pourrait être la solution. « Il est possible de travailler sur la mutualisation des infrastructures d’avitaillement ou de recharge pour les poids lourds », indique Christophe Schmitt.
Les intervenants de la table ronde ont également fait part de leurs inquiétudes sur le déploiement des zones à faible émission (ZFE). « Il faudrait que toutes les métropoles aient les règles d’accès. Parfois, le périmètre des agglomérations et donc des ZFE peut varier grandement, de 10 à 25 km », note Jean-Claude Barcos. Un point de vue qui va dans le même sens que celui de Christophe Schmitt : « En ce qui concerne les ZFE, le plus délétère réside dans la mise en œuvre. Il est impératif d’harmoniser les règles dans la mesure du possible, par exemple sur les dérogations, les tonnages des poids lourds ou encore les heures d’accès au centre-ville pour les livraisons. »
Au cours de cet événement, de nouvelles sociétés du transport routier se sont vu décerner un trophée pour leur démarche de décarbonation. Parmi les acteurs du TRM, les Transports Junet (69) ont reçu le trophée de la « Meilleure performance environnementale » pour les entreprises de moins de 50 salariés. Spécialisé dans l’acheminement de marchandises fragiles, le groupe (23 salariés, 21 véhicules) a converti la totalité de sa flotte au XTL, réalisant un approvisionnement sur trois avec ce carburant durable miscible au gazole. Un passage au XTL auquel il a sensibilisé ses clients chargeurs. En outre, il a travaillé sur la formation de ses conducteurs à l’écoconduite et la limitation des trajets à vide. Dans la catégorie « Autres modes de transport », un autre trophée de la meilleure performance environnementale a été décerné aux Transports Salva (66). Le groupe a modernisé sa flotte à l’Euro 6 et a substitué partiellement l’usage de gazole par du biogaz et de l’XTL, permettant une économie de 22 % de consommation. En outre, le transporteur s’est développé sur l’intermodalité à travers le déploiement de deux hubs en Occitanie.
Le trophée de la « Meilleure progression » en TRM a été attribué à FM Logistic (57). En 2022, le groupe a enregistré des émissions de CO2 réduites de 61,7 % grâce à du pooling, une méthode de massification des envois par la mutualisation des outils logistiques et transports. En outre, FM Logistic a passé l’ensemble de sa flotte au B100 et implanté plusieurs cuves au sein de ses sites. Toujours en catégorie « Meilleure progression », Tred Chariot (49) a été primé pour sa politique d’achats responsables dans le cadre de sa démarche EVcom.
Dans la catégorie « Longévité Objectif CO2 » en TRM, le groupe Rautureau Transport & Logistique (85) a remporté le trophée. S’appuyant sur 150 collaborateurs, 110 tracteurs et 145 remorques, la société est engagée depuis quatorze ans dans le dispositif Objectif CO2 et est labellisée depuis huit ans. Elle a notamment engagé une transition de sa flotte vers le HVO et formé ses chauffeurs à l’écoconduite.