Pour fonctionner de façon optimale, les véhicules automatisés ou connectés (VAC) doivent interagir en permanence avec les infrastructures physiques et numériques. Des expérimentations ont commencé en 2015 avec des navettes et des voitures individuelles principalement, mais aussi quelques bus et des droïdes de livraison pour de la logistique urbaine, portant des charges lourdes pour le livreur. Elles montrent plusieurs défis à relever actuellement, comme l’aménagement de l’espace de circulation (voies dédiées ou espaces partagés), ou la reconnaissance par un véhicule automatisé de la signalisation et des marquages routiers. « L’instrumentalisation de la voierie – par le biais de capteurs par exemple – est nécessaire pour la perception accrue du véhicule, afin qu’il récupère les informations liées à son environnement. Elle assure en outre une meilleure localisation du véhicule, une sécurité renforcée, et un meilleur confort de conduite – pour éviter par exemple des décélérations ou accélérations brusques », a souligné Sylvain Belloche, coordinateur activité Véhicule automatisé au Cerema, organisme qui accompagne les collectivités sur des thématiques variées. La directive européenne RISM 2019/1936 (portant sur la gestion de la sécurité des infrastructures routières) va dans ce sens, avec la volonté d’adoption de spécifications communes en termes de signalisation et de marquage (lisibilité, détectabilité par tout temps, etc.).
Afin de sécuriser au maximum le trajet du véhicule automatisé, des conditions de fonctionnement optimal (ODD, Operational Design Domain) ont été élaborées à partir du standard SAE J3016 : elles spécifient les conditions opérationnelles à valider (types de route, gammes de vitesse, conditions climatiques…).
L’infrastructure – numérique ou pas – fournit donc des informations aux véhicules automatisés. « Il faut qualifier, normaliser le niveau d’assistance (ISAD) que peut fournir l’infrastructure au véhicule. Selon les niveaux, cela implique la digitalisation de l’infrastructure. Cela va du niveau E – aucune assistance, l’infrastructure est conventionnelle – au niveau A, le plus élevé, basé sur l’information en temps réel des mouvements du véhicule. L’infrastructure est alors capable de guider le VAC », a expliqué Hasnaâ Aniss, ingénieure de recherche à l’Université Gustave Eiffel. Le déploiement de différentes technologies aidant à la connectivité (courte ou longue portée) est nécessaire afin que des messages puissent être échangés entre infrastructures et véhicules (cartographie d’une intersection, envoi du résultat des capteurs, par exemple), ou entre véhicules (alerte obstacle, piéton, chantier…).
Olivier Quoy, président d’Atlandes Autoroutes, a souligné qu’il faut « préparer la circulation des VAC afin que ceux-ci aient la capacité de réagir dans des situations anormales (travaux, accidents ayant déformés la chaussée), et d’être informés sur les conditions au-delà de l’horizon du véhicule (insertion dans un trafic chargé…) ». Quatre partenaires (NeoGLS, l’Université Gustave Eiffel, Atlandes et Geosat) ont engagé le projet d’une zone d’expérimentation à haut niveau de service (ZEHNS) pour le VAC, située sur un tronçon de 30 km de l’A63 dans les Landes. Cette section intègre par exemple des balises ITS G5, ou unités de bord de route (UBR), qui permettent la communication réciproque entre l’infrastructure et les véhicules équipés. L’une des premières expérimentations dans cette zone est le régulateur de vitesse connecté et adaptatif. Des camions ont été équipés du service Platooning C-ACC, qui vise à faciliter la circulation en convoi de camions sur l’autoroute.
Lors d’une autre conférence sur la donnée au service des politiques de mobilité, Fabrice Luriot, directeur de l’entité Mobility by Colas a remarqué que « l’analyse continue du paysage routier est une nouvelle façon de voir la gestion patrimoniale d’une route ». L’entreprise de travaux publics Colas génère des données per tinentes à utiliser : Mobility by Colas crée des offres de service basées sur le numérique et l’utilisation de la data, afin notamment de gérer des infrastructures de façon préventive. « À partir de données embarquées de véhicules (déports latéraux, freinages excessifs…), on peut par exemple détecter des zones d’alerte sur les infrastructures, puis formuler des recommandations d’aménagement », ajoute-t-il. Plus largement, l’accès aux données apparait être l’une des clés d’un pilotage efficace de la mobilité d’un territoire. Selon l’article 109 de la loi climat et résilience, les applications de navigation mobile (comme Waze) devront à terme transmettre aux autorités une partie des données générées par leurs utilisateurs. L’objectif : mieux connaitre les mobilités en vue de promouvoir des alternatives à l’usage de l’automobile, mais aussi évaluer l’impact des stratégies de report modal. Bien sûr, des règlementations sont en vigueur et en cours d’élaboration concernant l’accès, l’utilisation et la sécurité des multiples données générées par les différents acteurs de la mobilité…