« Le choix du matériel est calculé en fonction de la rentabilité globale »

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En renouvelant la totalité de son parc par des véhicules neufs alors que l'entreprise, de 1993 à 1998, avait recours à des véhicules d'occasion, le coût de la maintenance qui, pour Nord Express Transport Stockage, représentait 6% du chiffre d'affaires a été ramené à 2,58%. L'effectif de l'atelier intégré a été réduit de moitié tandis que la flotte augmentait de vingt unités. Par ailleurs l'entreprise s'est réorganisée. Les conducteurs fonctionnent par équipes de cinq pour quatre camions. Ainsi, la durée du travail des conducteurs est descendue sous le seuil des 200 heures et elle a été compensée par des gains de productivité. Le poids des charges et des salaires rapporté au prix de revient kilométrique n'a pas changé.

Nord Express Transport Stockage - Nets a été créé en 1993 et l'entreprise s'est spécialisée dans la distribution de produits industriels à la demande sur des relations interurbaines et sur une zone géographique limitée au quart nord-est de la France. Les véhicules effectuent des missions relativement courtes, sur des amplitudes horaires qui se situent entre 6 heures le matin et 17 heures le soir, ce qui ne justifie pas des véhicules de fortes puissances. Les distances parcourues et les charges transportées sont, en général, peu élevées. Comme beaucoup d'entreprises qui exercent des activités similaires, Nets achetait des véhicules d'occasion. Dès lors, la vingtaine de camions - essentiellement des porteurs - qui constituait le parc était assez disparate car les achats étaient fonction des opportunités du marché : Mercedes, Scania, Daf, Renault...

Comme toutes les activités étaient concentrées sur le seul site de Cambrai où Nets s'est implanté en 1993, un atelier intégré et deux mécaniciens assuraient toute la maintenance mais la disparité des matériels ne facilitait pas leur tâche. La facture s'en ressentait également et, en 1998, le coût d'entretien des 25 véhicules atteignait les 6% du chiffre d'affaires.

La totalité du parc est renouvelée

C'est pour cette raison que l'entreprise décida de modifier complètement sa stratégie et de« calculer tous ses investissements matériels en fonction de la rentabilité globale qu'ils pouvaient apporter à l'exploitation », explique son directeur, Jean-Paul Grard.

Tout est remis en question: de la politique d'achat jusqu'à la revente, en passant par le choix des modèles susceptibles de répondre aux deux activités principales de l'entreprise: la distribution classique et les livraisons express. Première décision: renouveler l'intégralité du parc en achetant des véhicules neufs. Deuxième objectif: rationaliser la flotte et profiter de la circonstance pour l'uniformiser en ayant recours à un fournisseur unique. Elle pouvait légitimement espérer qu'en effectuant un achat en nombre auprès d'un seul constructeur elle obtiendrait de meilleures conditions. D'autant que, parallèlement, elle envisageait d'augmenter sa capacité de transport, en portant son parc de 25 à 40 unités, et se trouvait ainsi en position encore plus favorable pour négocier. Hypothèse vérifiée: la différence de prix entre des véhicules neufs au tarif proposé par les constructeurs, en tenant compte des économies induites sur le coût d'entretien et sur la gestion des pièces de rechange multimarques, disqualifiait l'achat des véhicules à l'unité sur le marché de l'occasion.

Quant au choix du constructeur, « il s'est effectué sur un critère de proximité. Le concessionnaire Renault Véhicules Industriels de Cambrai se trouvait à moins de 2 km de l'entreprise, un voisinage qui s'est avéré déterminant dans l'optique de réduire progressivement les activités de l'atelier intégré parce qu'elles sont de moins en moins du ressort et de la compétence du transporteur », note Jean-Paul Grard.

« A terme, explique-t-il, lorsque notre chef d'atelier aura pris sa retraite, c'est le concessionnaire qui déléguera sur notre site le personnel chargé de l'entretien comme cela se passe déjà aujourd'hui avec le manufacturier qui gère notre parc de pneumatiques ».

Le choix de la gamme de véhicules, enfin, a été guidé « par la recherche de polyvalence qui est indispensable dans nos activités où alternent des envois de tonnages très variables, sur des distances courtes lorsqu'il s'agit de distribution régionale mais qui peuvent être beaucoup plus longue dans le cas de livraisons express à l'international », poursuit Jean-Paul Grard. Ce choix s'est traduit par « la panoplie complète de véhicules que propose le constructeur en matière de distribution », à l'exception du Magnum qui n' a pas répondu au cahier des charges de l'entreprise, et « principalement des porteurs parce qu'ils se déprécient beaucoup moins lors de la revente », fait-il remarquer.

Sur les 46 véhicules qui sont aujourd'hui en parc, Nets dispose, par ordre décroissant de puissance, d'un tracteur Premium de 420 ch doté du nouveau moteur à injection par common rail . « Il a été mis en service très récemment, spécifie René Gaudry, le chef d'atelier, mais nous en attendons de bonnes performances en terme de consommation ». Précédemment, Nets avait acquis cinq tracteurs Premium de 400 ch, quatre camions-remorque de 400 ch et un de 340 ch, deux porteurs Premium de 300 ch qui viennent d'être rejoints par un porteur Midlum de 16 tonnes. Mais l'essentiel de la flotte est constitué par les 32 porteurs Premium Distribution de 250 ch dont les premiers ont été livrés en octobre 1998.

« Nous avons accordé notre préférence à ce véhicule car il nous a paru le mieux adapté aux trafics interurbains qui constituent la majorité de nos activités », explique Jean-Paul Grard. Les deux Premium 300, par leur configuration en 6x2, font figure d'exception et sont affectés aux trafics spécifiques de deux clients de l'entreprise pour lesquels ils effectuent des transports dédiés, dont un souhaitait s'équiper d'un chariot élévateur embarqué. C'est également le cas du Midlum dont la configuration en porteur 16 T permet au transporteur de livrer les lots lourds dans le quartier de La Défense, à Paris, où les autres véhicules ont difficilement accès en raison des hauteurs limitées.

Réduction par 2 des frais de maintenance

Dans le même souci d'uniformisation du parc et de polyvalence, tous les véhicules, porteurs, remorques ou semi-remorques sont équipés des mêmes carrosseries à bâchage latéral coulissant et toit intégralement découvrable. Elles sont fabriquées par deux carrossiers locaux à partir du même cahier des charges et sont parfaitement identiques.

En outre, tous les véhicules sont dotés de suspensions pneumatiques à l'arrière et les carrosseries équipées de hayon élévateur rétractables. « Grâce à ces équipements, notre objectif a été de simplifier la tâche du conducteur, de lui faire gagner du temps et de le rendre totalement autonome. Ces équipements sont destinés à leur faciliter au maximum les opérations de chargement et de déchargement », souligne Jean-Paul Grard.

Comme le prévoyait l'entreprise, l'achat de matériel neuf et la standardisation du parc roulant ont contribué à la réduction des frais de maintenance. Le poste entretien qui flirtait avec les 6 %, il y a encore deux ans, a été ramené, cette année, à 2,58 % du chiffre d'affaires. « D'une part, les véhicules bénéficient de deux ans de garantie, ce qui n'est pas à négliger », constate le responsable de l'exploitation. Actuellement, la maintenance se partage entre le concessionnaire voisin et l'atelier intégré ce qui a permis d'économiser un poste de travail. « D'autre part, les interventions ont été réduites et sont limitées à l'entretien classique: graissage systématique tous les 15 000 km, vidange tous les 30 000 km ». Pour le remplacement des organes soumis à usure, le chef d'atelier suit à la lettre les préconisations du tableau de marche du constructeur qui a été mis à sa disposition. Toujours dans l'optique d'une meilleure revente. Car le plan de renouvellement du parc a été programmé d'entrée: les porteurs seront conservés trois ans et les tracteurs 4 ans. Les véhicules ont été financés par crédit-bail ce qui permet au transporteur de revendre directement ses véhicules sur le marché de l'occasion sans être obligé de traiter avec le concessionnaire.

Parallèlement, Nets a pu réorganiser le service. En contrepartie des tâches dont il a été dessaisi, le chef d'atelier s'est vu confier la gestion de la soute à carburant ainsi que celle de la station de lavage qui a été installée cette année. Un investissement auquel tenait Jean-Paul Grard, soucieux de la propreté de ses véhicules que la couleur choisie par l'entreprise rend particulièrement vulnérable à la saleté dans un environnement où prolifèrent les champs de betteraves. Mais c'est un choix: « les véhicules blancs se revendent mieux sur le marché de l'occasion », a observé Jean-Paul Grard...

Par ailleurs, compte tenu du niveau atteint par le prix des carburants, la consommation des véhicules est devenue un poste stratégique et fait l'objet d'un contrôle plus strict.

Fourchettes de consommations resserrées

Même si l'activité distribution est limitée à des courtes distances, tous les véhicules, et quelle que soit leur configuration, parcourent environ 100 000 km par an. Il est donc conseillé aux conducteurs d'effectuer les pleins de carburant à la station interne ce qui lui permet de gérer plus de 90 % des consommations. Une règle a été établie: dés leur retour, avant même de se présenter au quai, tous les véhicules se présentent systématiquement à la pompe. Le conducteur déclenche le remplissage avec son badge magnétique personnel grâce auquel son identité, le numéro du véhicule, le kilométrage effectué et la consommation sont directement transmis au centre informatique de l'exploitation. « Ainsi, nous pouvons détecter immédiatement toutes les dérives, précise Jean-Paul Grard. Nous intervenons dès qu'apparaît une anomalie ».

Cela est d'autant plus facile que, la flotte étant désormais neuve et uniformisée, les fourchettes de consommation du parc sont aujourd'hui beaucoup plus resserrées. Pour la trentaine de Premium 250 les consommations se situent entre 24 et 27 litres. Pour les tracteurs de 400 ch, elles s'échelonnent entre 31 et 33 litres. Un écart relativement faible qui varie essentiellement en fonction des itinéraires et de la charge transportée. Les nouveaux véhicules de la marque, en effet, selon l'exploitant, sont assez peu sensibles aux variations de conduite. En conséquence, Il estime leurs performances d'autant plus satisfaisantes que le poste carburant a subi, ces derniers mois, une inflation assez sensible. « Nous consommons 96 000 litres de gazole par mois. Depuis janvier, le poids de ce poste a augmenté de 3,4 % et représente actuellement 16 % de nos coûts d'exploitation », constate Jean-Paul Grard.

Quatre conducteurs pour cinq véhicules

Le renouvellement du parc qui s'est échelonné sur les deux dernières années, a coïncidé avec l'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation sur la durée du temps de travail. « Il m'a semblé opportun de mettre à profit ces changements pour revoir la manière de travailler et recadrer les relations sociales, les liens s'étant quelque peu distendus dans la profession entre le management et les conducteurs au cours des dernières années », tient à souligner Jean-Paul Grard.

Aussi, Nets a été l'une des premières entreprises de transport routier du Nord a signer l'accord d'entreprise sur la réduction de la durée du temps de travail dans le cadre de la Loi Aubry, en juin 1999. L'année précédente, elle avait fait un audit de qualité qui avait fait apparaître certains gisements possibles de productivité. Cette démarche a été le point de départ d'un nouvel audit dont le but était de réorganiser les tâches dans l'entreprise.

Pour les conducteurs, cela s'est traduit par la mise en place d'équipes pour effectuer les activités de distribution. Ces équipes sont composées de quatre véhicules et de cinq chauffeurs. Quatre de ces conducteurs disposent d'un véhicule qui leur est personnellement affecté et dont ils sont responsables au regard de l'exploitation. Le cinquième remplace à tour de rôle les chauffeurs de son équipe lorsqu'ils prennent leur journée correspondant à la réduction du temps de travail.

Pour les transports à longue distance, selon les besoins, l'exploitation met en place un double équipage. Une solution onéreuse mais nécessaire pour que les missions soient assurées dans les meilleures conditions, notamment au regard des réglementations.

Si, d'un côté, ce système a pu contribuer à reconstituer le binôme conducteur/camion, dont certains transporteurs avaient déploré la disparition progressive parce qu'elle s'était accompagnée d'une déresponsabilisation du personnel vis à vis du matériel, parallèlement, il a amené automatiquement les conducteurs à davantage de polyvalence, tant dans les missions qu'ils ont à effectuer et quant aux types de véhicules qui leur sont affectés. Seuls les jeunes chauffeurs en sortie de formation se voient confier des porteurs légers pendant une période de 3 mois afin de parfaire leur apprentissage. « Néanmoins, nous tentons de concilier compétences et préférences, poursuit Jean-Paul Grard. Ainsi, s'il le souhaite, un jeune conducteur célibataire sera privilégié pour les missions de longues durées par rapport à celui qui préfère rentrer chez lui le soir ».

Tous les trafics sont suivis par GSM

Au niveau financier, la mise en place de cette organisation n'a rien coûté à l'entreprise , reconnait Jean-Paul Grard et elle y a gagné en terme de productivité et de climat social. D'ailleurs, le poste salaires/ charges rapporté au prix de revient kilométrique n'a pas changé et s'est stabilisé à 35%. Cependant, la réduction du temps de travail a généré pour quelques conducteurs une perte de salaire de 2 500 F qui ont pu être compensés par des primes, des gratifications diverses par le biais du comité d'entreprise qu'il a fallu mettre en place lors de l'accroissement d'effectif, ainsi que par l'intéressement. Quant à la productivité elle s'est améliorée surtout grâce aux GSM dont sont équipés tous les conducteurs. Ainsi, au départ de l'exploitation, le conducteur ne connaît que sa destination aller. Il sera avisé en cours de route de sa mission de retour et c'est le véhicule qui se trouve le plus proche du lieu d'enlèvement qui prendra le fret, ce qui a permis de réduire, à la fois, les kilométrages à vide et certaines attentes inutiles. « Depuis trois ans que nous procédons de cette manière, en effet, les conducteurs ont pris l'habitude d'appeler l'exploitation pour l'avertir du moindre incident. Ils savent que leur participation aux fruits de l'entreprise est proportionnelle à ses performances. On entend dire, fréquemment, que le conducteur est l'ambassadeur de l'entreprise, il est également notre meilleur agent commercial. Aussi, chaque fois qu'un conducteur me met en contact avec un client potentiel, je m'engage à lui reverser 1% du montant du contrat la première année »,conclut Jean-Paul Grard, convaincu que l'image du transport routier ne peut évoluer que par une meilleure formation des gens qu'il emploie. Cette année, Nets a multiplié par 2,5 le budget qu'elle y consacre..

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