La crise du Covid-19 n’a pas épargné les Transports Verdier : cette PME de 72 personnes a subi jusqu’à 45 % de baisse d’activité en avril. Mais Cyrille Breton, directeur général, se montre plutôt serein : « Aucun salarié n’a été malade et nous avons passé la période sans encombre. » Il prévoit un recul du chiffre d’affaires de 1 M€ sur 2020 (il s’élevit à 11,5 M€ en 2019), mais espère préserver une certaine rentabilité. Il faut souligner que la croissance a été globalement au rendez-vous (+ 8 % en 2018, + 7 % en 2019) depuis qu’il a repris l’entreprise, en 2017, avec Marjorie Cognet et Stéphane Verdier, respectivement fille et neveu de Pierre Verdier, fondateur de la Société des Transports Verdier (STV) en 1979. Ce dernier avait repris les moyens utilisés par son propre père et son grand-père, mais en passant du transport de viande pour les abattoirs à celui de marchandises générales sur palettes, qui reste, aujourd’hui encore, le cœur de métier de l’entreprise. Dès 1987, Pierre Verdier avait embauché son neveu, Stéphane Verdier, puis en 1998, sa propre fille, Marjorie, dans le cadre d’un BTS d’assistante de direction en alternance et, en 2014, Cyrille Breton, un expert du contrôle de gestion opérationnel. Aujourd’hui, Marjorie Cognet est directrice administrative et financière, Stéphane Verdier directeur exploitation et technique, et Cyrille Breton, directeur général, commercial et contrôle de gestion. Leur stratégie : renforcer l’optimisation de moyens pour développer les activités, en l’occurrence le transport national de lots (complets ou non) et la distribution régionale, plus, dans une moindre mesure, du transport spécifique (vitrage et aluminium), de la logistique (cross-dock) et un peu de commission de transport (7 % du chiffre d’affaires). Des activités réparties (sur le plan comptable, mais pas commercial) entre deux sociétés : STV et Logistique Verdier, dont les trois associés se partagent les présidences et directions.
Ces activités sont toutes organisées autour de l’entrepôt de 2 200 m2 créé en 2001 par Pierre Verdier, un an après son adhésion au groupement Astre. « L’objectif de développement de la distribution a été atteint, commente Cyrille Breton, puisque de quelques palettes chaque jour, nous en sommes aujourd’hui à 250 à 300 partant chaque jour et 11 navettes par nuit pour le réseau. » Pour augmenter la productivité et améliorer les conditions de travail, les dirigeants ont réorganisé l’entrepôt, en 2018, pour passer de 10 à 22 portes à quai. « La distribution continue d’augmenter de 5 à 10 % par an, même cette année, depuis que nous sommes devenus un hub européen pour Astre, en 2017, ajoute le directeur général. Et la création du produit Astre logistique international, en 2019, nous a apporté encore une ouverture supplémentaire. Le néerlandais KLG vient à présent déposer chez nous au minimum trois fois par semaine. » Le dirigeant a donc déjà en tête des solutions pour optimiser encore le bâtiment, qui ne peut être agrandi car il est situé au bord de l’Allier. Cette capacité à optimiser sert aussi l’activité de transport national de lots : « Ce qui porte le plus notre activité, c’est l’organisation et la distribution de petits lots », assure Cyrille Breton. Ceux de 1 à 4 m de plancher assurent ainsi 40 % du chiffre d’affaires et ceux de 4 à 10 m, 33 %, contre 15 % pour les lots complets. La stratégie commerciale, elle aussi, est basée sur l’optimisation : « On fait évoluer nos clients en fonction de ce qu’on fait déjà et on essaie d’orienter nos véhicules là où des clients nous assurent un retour chargé », résume Cyrille Breton. Des véhicules Verdier « montent » par exemple avec les emballages alimentaires destinés à deux gros clients du Loiret, où, avant de « redescendre », ils chargent de la marchandise chez Carrefour Market. Même chose dans l’Oise et la Picardie avec des retours assurés par l’importateur Easy Logistic ou, en Côte-d’Or, par Unilever.
La mutualisation constitue un autre axe de cette politique commerciale. « Avec d’autres Astriens, nous avons organisé un système d’échange de remorques à mi-chemin, explique Cyrille Breton. Ce sont des moyens complémentaires (de 3 à 6 m de plancher) alors qu’avec le groupement Astre, nous sommes de 1 palette à 3 mètres. » Les transports Vingeanne (52) ont été les premiers à accepter : « Toutes les nuits, nos conducteurs respectifs se retrouvent à Montceau-les-Mines [Saône-et-Loire, Ndlr], sur un parking, pour échanger leurs remorques, détaille Cyrille Breton. Eux nous remettent pour l’Auvergne et le Limousin, tandis que nous leur confions de la marchandise destinée au quart Nord-Est de la France. » Le tout est basé sur une organisation stricte et sur une simple facturation réciproque de la prestation. « Ce n’est pas de la commission, précise le transporteur auvergnat. Je considère les Astriens comme des clients. »
L’intérêt de ce système n’est pas tant l’économie réalisée en matière de consommation et de charges salariales – ue l’avantage commercial permis par cette coopération : « Chacun de nous peut beaucoup mieux répondre, le matin, aux impératifs horaires des clients, poursuit Cyrille Breton. Nous, par exemple, nous éclatons la marchandise sur deux véhicules, ce qui nous permet de livrer à Clermont à 8 h 30 et à Aurillac à 9 heures. » Avec aujourd’hui Vingeanne pour le Nord-Est, Feuillet et Savel (groupe Thierry-Mercier) pour le secteur Rhône-Alpes, Baudoin sur l’Ouest de la France et Béade sur le Sud-Ouest, Verdier peut déjà annoncer une livraison en vingt-quatre heures à environ 80 % de ses clients. Pour aller au-delà, il est en discussion avec des confrères pour la Bretagne et, pour le Sud-Est, avec le groupe Bert&You (26). Même sur le Centre, les Transports Verdier coopèrent avec des confrères pour des départements trop éloignés de ses bases. Comme avec Trans Scop Cantal : « Je ne vais pas forcément aller à Aurillac, où il est installé, explique Cyrille Breton. Je fais appel à lui tandis que, de son côté, il peut être intéressé par notre plan de transport. » Une organisation mutualisée a été mise en place avec d’autres, pour un producteur de plants de fleurs d’Angers. En période basse, celui-ci envoie deux ou trois fois par semaine une traction commune chez Verdier (qui livre alors les agriculteurs des départements 19, 63, 15 et 43), Thevenet pour le 03 et le 58, et Tempologis (AEM) pour les 18, 36, 87 et 23. En période haute, chacun des transporteurs accueille une semi.
« Avec Thévenet, Meunier, Trans Scop Cantal, Transports Prouheze Paradis (TPP) et Archer, nous échangeons beaucoup, poursuit Cyrille Breton. En 2018, chacun de nous a envoyé un exploitant chez un autre, pour prendre des idées et en apporter. Cela a vraiment créé des liens. »
À tel point que tous ces transporteurs auvergnats vont aujourd’hui mutualiser leurs services support : un groupement d’employeurs sera créé au premier semestre 2021, après un retard de quelques mois dû à la crise sanitaire. Le social, de plus en plus chronophage, sera le premier poste mutualisé, avant d’autres, comme le HQSE. « On reste concurrents, mais on s’entraide, lance le dirigeant. Si l’un de nous grandit, les autres grandiront. »
• Siège : Coudes (63)
• CA : 11,5 M€
• Effectif : 72 salariés (48 pour STV et 24 pour Logistique Verdier)
• Parc : 52 moteurs
• Activités : lot complet et partiel, transport spécifique, distribution, logistique
Entreprise « la plus active d’Auvergne dans les actions de branche », selon Cécile Rougeol, déléguée départementale de l’AFT, Verdier participe à tous les job datings. « Je ne suis pas très communiquant, mais je me force parce que la profession doit absolument mieux se faire connaître. » Le transporteur accueille aussi beaucoup de stagiaires et d’alternants. « On leur fait tout essayer : la nuit, la longue distance, etc., poursuit-il, pour qu’ils voient comme le métier est attirant. » Le résultat est là, puisque l’entreprise « ne s’en sort pas trop mal » pour les recrutements.