Vue sous l’angle environnemental, « la meilleure tonne est celle que l’on ne transporte pas », a rappelé Yves Antoine, directeur logistique du chimiste Arkema. Cette remarque confirme que les chargeurs sont au cœur du processus de décarbonation du transport routier. Au même titre que l’optimisation des plans de transport, le déploiement de solutions neutres, ou bas carbone, suppose une approche collaborative avec les transporteurs, selon Baptiste Perrissin-Fabert. Pour le directeur général délégué de l’Ademe, c’est dans cet esprit qu’ont été bâtis et sont instruits les programmes de l’Agence tels que l’Extrême Défi logistique ou les appels à projets (AAP) pour soutenir l’électrification des camions. « La première tranche de l’AAP 2024 cible les PME », a-t-il précisé.
Parmi les grands témoins de la soirée, le directeur de XPO France, Bruno Kloeckner, a présenté les innovations des transporteurs en matière de décarbonation et souligné leurs enjeux. Dans le cadre des AAP de l’Ademe, XPO a commandé une centaine de porteurs électriques en 2022, « tous livrés », puis 165 poids lourds électriques dont plusieurs dizaines de tracteurs. Avec les aides actuelles, « le modèle économique fonctionne et les conducteurs y adhèrent ». Pour Bruno Kloeckner, cette transition devra, en revanche, s’accompagner de nouvelles expertises et approches. Il cite, par exemple, l’achat d’électricité ainsi que le possible partage des coûts de recharge et d’installation des bornes avec les clients, dans le cas de transport longue distance avec des tracteurs notamment. Recharger le véhicule chez le client est un modèle à envisager, en plus de la participation des chargeurs au financement de la transition énergétique du mode routier.
Bien qu’important, le parc électrique indiqué par XPO France « ne pèse que » 10 % de sa flotte moteurs. Aussi, au cours des dix prochaines années au moins, chargeurs, transporteurs et énergéticiens s’accordent-ils sur la nécessité de préserver un mix énergétique compétitif et durable. De l’avis d’Olivier Gantois, président de l’Ufip Énergies &Mobilités, « il y aura suffisamment de carburants décarbonés liquides pour tous les usages sur la décennie sous réserve d’une neutralité technologique, d’une stabilité réglementaire et de financement à l’échelle ». Pour illustrer cet enjeu financier, Bruno Kloeckner a présenté l’offre Less permettant aux clients de XPO d’opter pour du HVO pour leurs transports. En contrepartie, ces derniers s’acquittent d’un surcoût induit par l’utilisation de cette huile végétale hydrotraitée.
À l’heure des conclusions, Baptiste Perrissin-Fabert a confié le lancement par l’Ademe d’une étude sur les EMS. Leur déploiement est défendu tant par les transporteurs que par les chargeurs et les logisticiens. « Dans le but d’objectiver le sujet », a-t-il indiqué, cette étude sera achevée avant la fin de l’année.