Alexandre Petit (Transports Jourdan) : « Il faut être pragmatique, concilier l’économique et l’écologique »

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Alexandre Petit

Alexandre Petit, président des Transports Jourdan

Crédit photo Transports Jourdan
Normandie. Alexandre Petit, dirigeant des Transports Jourdan (50), 220 collaborateurs pour 150 moteurs et 350 cartes grises, voit l’activité ralentir. Il demande que le pragmatisme soit érigé en maître-mot des décisions régionales impactant le transport. [Article paru dans notre hors-série du Classement des 1000 publié en décembre 2023]

Comment analysez-vous l’année 2023 ?

L’année 2023 s’inscrit dans une logique d’inflation et de baisse de volumes. Nous sentons bien l’impact de la chute de la consommation avec des acteurs obligés de faire des arbitrages. On repousse l’achat du barbecue, l’investissement pour la voiture… La hausse des taux d’intérêts impacte le secteur du bâtiment, avec un ralentissement sur le neuf, ce qui a des répercussions dans tous les secteurs. Frigo, vrac, palettes, même le transport exceptionnel ressent le contrecoup. En logistique, si les taux de remplissage se maintiennent, les taux de rotation faiblissent… Au-delà de l’économie pure, je sens une affirmation des attentes sur le plan RSE chez les clients. Nous notons une amélioration des conditions d’accueil des chauffeurs chez certains, même s’il reste du chemin à parcourir chez d’autres.

Dans cette perpective, comment s’annonce 2024 ? Des projets normands vont-ils porter l’économie ?

À mon sens, la volumétrie va rester en berne dans les mois qui viennent, avec une consommation faite d’arbitrages et de freinage et des taux d’intérêt qui resteront durablement autour de 4%. Côté positif, la baisse des prix du gazole, électricité et gaz peut jouer… Concernant les projets, la Normandie en attend, mais pas forcément cette année. L’EPR à Penly, les travaux au port du Havre (investissements dans le terminal conteneur, création d’une chatière, etc) et sur Cherbourg vont amener de l’activité. Notre région restant une région très agroalimentaire, il y aura toujours de l’activité. Pour l’industrie, ça va suivre la tendance du pays…

Plusieurs projets routiers sont menacés d’arrêt ou ont été abandonnés en Normandie : le contournement de Rouen, l’A154 entre La Madeleine-de-Nonancourt (Eure) et Trancrainville (Eure-et-Loir), le projet de 2x2 voies entre Évreux et Chaufour-lès-Bonnières… Qu’en pensez-vous en tant que transporteur routier ?

Notre profession s’adapte aux contraintes. Ces axes sont surtout impactants pour les locaux qui sont les utilisateurs réguliers. Mon sujet localement, c’est l’axe Avranches-Granville et le passage à quatre voies nécessaire pour améliorer la sécurité, le temps d’accès, la durée de trajet… Cela joue sur l’attractivité. Depuis des dizaines d’années que c’est en suspens, nous gagnerions jusqu’à 20 minutes sur le trajet en période d’été. Après, tous les avis sont compréhensibles tout dépend des objectifs d’aménagement du territoire… Je partage la nécessité de la dimension écologique actuelle, mais il faut tout intégrer dans la réflexion. Sur certains projets de routes, les nouveaux bassins de rétention attirent des oiseaux qui avaient disparu du secteur. C’est une preuve que l’on peut concilier les choses. Il faut être pragmatique, avoir un objectif conciliant nécessairement l’économique et l’écologique.

En parlant d’objectif écologique, que vous inspirent les ZFE, en place à Rouen, en programmation au Havre ?

Elles vont bouleverser nos schémas logistiques en centre urbain pour le meilleur et pour le pire… Je reconnais que c’est extrêmement compliqué pour un politique de prendre en compte tous les aspects de la logistique urbaine de marchandises avec la multiplicité des acteurs, la pluralité des métiers. Là encore, le pragmatisme doit s’imposer à l’idéologie. Si on enlève un poids-lourd pour le remplacer par des dizaines d’utilitaires, a-t-on amélioré les choses ? Les décideurs doivent vraiment appréhender ces schémas logistiques qui impacteront notre quotidien avec des objectifs précis, clairs et assumés.

Un mot sur l’hydrogène, énergie sur laquelle a misé la région Normandie ?

Aujourd’hui, des prototypes sont techniquement opérationnels mais ne sont pas économiquement viables pour faire du transport en masse. Il faudra industrialiser une capacité de production d’H2 suffisante, puis mailler un réseau de distribution capacitaire… Au mieux, les choses ne se feront que d’ici une dizaine d’années. La difficulté en Normandie est donc de répondre durant cette transition aux injonctions environnementales actuelles, tout en gardant en cible l’hydrogène comme solution d’avenir.

 

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