La responsabilité pénale du chef d'entreprise

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En matière sociale, la responsabilité pénale du dirigeant peut être mise en cause non seulement pour les fautes positives qu'il a personnellement commises, mais aussi pour celles qu'il a laissé commettre par ses préposés du fait de sa propre négligence ou « faute d'abstention ».

D'une manière générale, le risque pénal pèse sur le gérant de la SARL, le président de la société anonyme ou les membres du directoire dans les SA à directoire. Mais le directeur général ou tout administrateur de SA peut aussi être poursuivi, notamment lorsqu'il se comporte comme un « dirigeant de fait ». A titre exceptionnel et à l'exclusion des petites entreprises, une délégation de pouvoir au bénéfice d'un cadre qui dirige un service ou un établissement permet de transférer cette responsabilité vers le bénéficiaire de la délégation. En outre, la responsabilité pénale du dirigeant n'exclut pas celle du salarié qui a commis la faute ou celle de toute personne, même extérieure à l'entreprise, qui a personnellement participé à l'infraction. Depuis 1992, le décret dit de « co-responsabilité » permet de rechercher la responsabilité pénale du chargeur ou commissionnaire qui, en toute connaissance de cause, donne au chauffeur des instructions de livraison incompatibles avec la durée maximale de conduite journalière. Elle n'exclut pas non plus la responsabilité pénale de l'entreprise personne morale qui, à défaut de pouvoir être emprisonnée, se verra infliger des amendes multipliées par cinq ou des sanctions administratives allant jusqu'à la fermeture.

La responsabilité pénale des dirigeants est fréquente en matière de travail clandestin, de délit d'entrave, d'accidents de travail ou de non respect des temps de conduite et de repos des chauffeurs routiers.

Le travail clandestin

Depuis la loi du 11 mars 1997, le délit de travail clandestin ou tout simplement le travail au « noir » fait l'objet d'une nouvelle appellation dite « interdiction du travail dissimulé ». Il concerne aussi bien l'entrepreneur non immatriculé au registre des métiers ou celui du commerce et des sociétés, que le patron qui fait appel à la sous-traitance illégale ou qui emploie des salariés sans effectuer au moins deux des quatre formalités obligatoires suivantes : déclaration préalable d'embauche, remise d'un bulletin de salaire, tenue du livre de paie et du registre unique du personnel. Ce délit peut coûter jusqu'à 2 ans de prison et 200.000 F d'amende.

Le délit d'entrave

Le délit d'entrave se définit comme toute atteinte portée par le chef d'entreprise à l'exercice du droit syndical, ainsi qu'à la désignation et au bon fonctionnement des instances représentatives du personnel. C'est le cas du licenciement irrégulier d'un salarié protégé, de la non consultation du CE sur un transfert de siège social ou de l'absence de communication des documents sociaux (bilans). Le délit est constitué dès lors qu'il est démontré que le dirigeant a agi ou s'est abstenu d'agir en toute connaissance de cause. Ce dernier encourt une peine de 25.000 F au plus et/ou d'un an d'emprisonnement, avec doublement en cas de récidive.

L'accident de travail

Le chef d'entreprise commet une faute personnelle en ne veillant pas lui-même ou par l'intermédiaire d'un salarié qualifié, à l'application effective des règles relatives à la sécurité des travailleurs. En matière de transports, l'attention du dirigeant doit porter sur la mise en oeuvre des « protocoles de sécurité » lors des opérations de chargement/déchargement chez les clients, mais aussi sur la formation à la sécurité obligatoire pour tous les chauffeurs. En cas d'accident avec incapacité de travail de plus de trois mois, la responsabilité pénale du dirigeant pourra être recherchée sur le fondement de coups et blessures involontaires passibles d'une amende de 200.000 F au plus et de 2 ans de prison. Ces peines sont portées à 300.000 F et à 3 ans de prison, s'il est démontré qu'il y a eu manquement délibéré de l'employeur à une obligation de sécurité. En cas de décès du salarié, il pourra être poursuivi pour homicide involontaire passible d'une amende de 300.000 F et de 3 ans de prison. Ces peines sont portées à 500.000 F et 5 ans de prison en cas de manquement délibéré de la part du chef d'entreprise.

Depuis 1994, le délit de « mise en danger d'autrui » peut être retenu en l'absence de tout accident par le seul fait d'exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures par violation délibérée des règles de sécurité ou de prudence.

Le non respect des temps de conduite/repos

Le chef d'entreprise est présumé responsable, sauf à démontrer que la faute incombe exclusivement au chauffeur ayant agi dans son seul intérêt, notamment pour rentrer plus tôt chez lui en fin de semaine. Les juges retiennent le plus souvent la faute pénale du dirigeant pour incitation au dépassement des durée de conduite en raison de délais de livraison incompatibles, d'infractions multiples des chauffeurs non sanctionnées ou encore de complicité passive ou active dans la falsification des dispositifs de contrôle. A titre d'exemple, un dirigeant a été condamné à 20.000 F d'amende et 2 mois fermes de prison suite au trucage du chrono par un de ses chauffeurs.

C'est par la mise en place d'une réelle politique de prévention et de contrôle en matière sociale que le dirigeant peut espérer exercer sereinement son activité qui ressemble parfois à un terrain miné.

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