La question sociale du mois

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Ce plafonnement du risque prud’homal est en gestation depuis de nombreuses années.

La Loi Macron du mois d’août 2015 a même tenté un galop d’essai en créant un système d’application volontaire par les parties en conflit d’un barème indemnitaire venant encadrer les indemnités pour licenciement abusif. Deux ans après le constat est sévère : l’usine à gaz n’a rien produit…

Le risque prud’homal ne se limite pas au licenciement. Il peut aussi viser des rappels de salaire et toute une gamme, enrichie par la créativité des plaideurs, de dommages et intérêts fondés sur des violations de droits essentiels (par exemple, la privation du droit à la formation d’un salarié ou encore la sanction d’un harcèlement).

Ce que les Ordonnances à venir souhaitent encadrer vise exclusivement la sanction d’un licenciement « illégal », c’est-à-dire soit irrégulier dans sa forme (l’omission d’une convocation à un entretien préalable) ou abusif parce que fondé sur un motif ni réel ni sérieux : l’essentiel de ce que les Prud’hommes ont à juger.

Le projet gouvernemental, au moins à ce stade de son dévoilement, est peu clair, pas plus d’ailleurs que le programme du candidat Macron ne l’était.

On peut parier qu’au terme du marathon des négociations de l’été le texte définitif sera édulcoré afin de correspondre au service minimum imposé par le chef de l’État : redonner de la lisibilité aux chefs d’entreprise sur le risque lié au licenciement « banal ». Rien de plus, et ce sera déjà pas mal…

Réduire l’insécurité juridique pour ces licenciements « banals », ordinaires pourrait-on dire si le mot ne paraissait pas déplacé, c’est éviter le piège consistant à intégrer, pour les réduire, les innombrables complexités nées de la diversité des situations de fait susceptibles de fournir les éléments du litige. Air connu : le diable se cache dans les détails…

Un simple exemple : les nullités des licenciements prononcés en méconnaissance d’un statut protecteur ou en raison de l’état de santé du salarié ouvrent aux indemnités usuelles sanctionnant le licenciement abusif « banal » et, le plus souvent, à une indemnité spécifique couvrant la perte de revenu comblée en raison de l’annulation par le juge du licenciement grossièrement illégal. Les motifs de nullité sont très nombreux et visent le plus souvent des domaines considérés comme vaches sacrées du social (droit de grève, droit d’expression, état de santé…)…

Il serait bien étonnant que, par un processus de plafonnement global, l’Ordonnance s’aventure sur ce terrain particulièrement sensible pour les organisations syndicales.

À ce stade de l’avancement de la concertation on a déjà constaté qu’avec prudence la ministre du travail précisa que n’étaient concernées par le projet que les condamnations ayant le caractère de dommages et intérêts. Exit, bien sûr, les indemnités conventionnelles (ou contractuelles, les golden parachutes) de rupture et a fortiori les indemnités de préavis. Précision d’apaisement a minima qui démontre l’extrême sensibilité de tous sur ce sujet un peu fantasmatique, l’énorme majorité des condamnations prud’homales pour un abus commis lors du licenciement se solde par une indemnité comprise entre 1 mois, pour les abus de pure forme et 12 mois pour un licenciement sans cause sérieuse. Les exemples donnés lors de la campagne présidentielle de condamnations outrancières restent strictement anecdotiques. On fait de la bonne politique avec de l’émotion et de la mauvaise avec des statistiques…

Une piste paraît n’avoir jamais été investiguée par les initiateurs de ce projet, c’est celle d’une forme d’analogie avec le mécanisme de réparation des accidents du travail.

La réparation du préjudice né d’un tel accident est lui aussi barèmé, mais le barème est déplafonné en cas de faute inexcusable de l’employeur.

Ce mécanisme à deux vitesses trouverait sa place en Prud’homie en sauvegardant les intérêts majeurs défendus par les syndicats et les organisations patronales.

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