Jean Mounier : La France a démontré, et continue de démontrer, qu’elle fait partie des meilleurs en matière d’adaptabilité. En l’espace d’une nuit et d’une journée, tous les acteurs du monde de la logistique ont été sollicités pour ajuster très rapidement les plans de transport et les plans de production des entrepôts. Je trouve que, toutes enseignes et tous transporteurs confondus, la démonstration de cette grande capacité d’adaptation a été probante. Pour le redémarrage du 11 mai, les différents opérateurs répondent présent malgré les problèmes sociaux de toutes sortes (chômage partiel, etc.). Sincèrement, j’y vois une belle image pour le drapeau tricolore.
J. M. : En fait, nous sommes utilisateurs de deux plans de transport : un plan « magasin » (560 points de vente Darty et Fnac) qui a été immédiatement mis à l’arrêt, dès le 16 mars, et un plan « livraison du dernier kilomètre » (électroménager) qui, lui, est resté actif, avec un protocole sanitaire très strict (arrêt du montage, dépôt en pas de porte). Nous avons perdu entre un tiers et deux tiers de notre activité dans ce domaine mais nous sommes parvenus à traiter jusqu’à 18 000 livraisons par semaine sur tout le territoire (nous approvisionnons 70 plateformes Darty).
En résumé, pendant toute la durée du confinement, nous avons été un acteur 100 % Web avec des entrepôts en mode « Black Friday ».
J. M. : Nous disposons d’une capacité de redémarrage très rapide, sur la base de schémas et de process bien inscrits. Toutes nos équipes en magasins ont été remobilisées (sauf pour les magasins implantés dans les surfaces de plus de 40 000 mètres carrés, selon la réglementation). Au niveau du transport, nous avons remobilisé l’ensemble de nos prestataires (une soixantaine) sur tout le territoire. Le 11 mai, la machine a été remise en route pour les livraisons en magasins. Du côté des entrepôts, elle ne s’est jamais arrêtée. Il a simplement fallu regonfler les effectifs pour traiter les nouveaux volumes.
J. M. : Nous disposons d’importants stocks de gel hydroalcoolique et de masques pour faire face aux besoins en magasin. Bien entendu, nos prestataires transport ont également équipé leurs conducteurs.
J. M. : Lorsque j’ai rejoint le groupe en 2014, j’ai pu découvrir qu’existait une relation chargeur-prestataire qui sortait du lot. On sait bien qu’il existe deux typologies d’achat : l’achat extrême sous la forme d’un bras de fer permanent et on entend souvent les transporteurs le déplorer, à juste titre. Ce n’est pas notre vision, ne serait-ce que parce que nous traitons du matériel sensible. Y compris dans les appels d’offres, le groupe Fnac Darty s’inscrit dans une stratégie du juste prix de sorte que nos transporteurs s’y retrouvent et que nous puissions maintenir un niveau de qualité sur l’ensemble de la chaîne afin d’être en phase avec l’exigence de la satisfaction client de nos enseignes. Chaque jour, une cinquantaine de semis quittent nos entrepôts avec des produits déjà vendus et attendus le lendemain à leur domicile par des clients avec lesquels a été conclu un rendez-vous horaire. Nous avons donc l’obligation que la chaîne logistique soit sans faille 52 semaines dans l’année, d’où la nécessité de disposer de bons prestataires. Chacun des nôtres est un spécialiste de sa région et possède une très bonne maîtrise de son secteur, ce qui lui permet de maîtriser les temps de route et de répondre à nos objectifs. C’est grâce à la richesse de cette chaîne – à l’agilité de nos transporteurs – que nous sommes en mesure de maintenir une très bonne qualité de service.
J. M. : Dans l’approche globale de nos relations avec eux. Nous sommes à l’écoute de leur vision, nous sommes dans une relation de communication constante qui évite les rapports de force. Nos équipes sont formées à la compréhension du monde du transport et du transporteur. Elles sont rompues à la notion de temps de route, d’itinéraires… C’est ainsi que s’instaure une sorte de logique dans l’établissement des commandes, ce qui évite les situations de tension. Au quotidien, c’est ce qui fait la différence.
Le respect entre nos transporteurs et nous est mutuel. Le transporteur sait pouvoir compter sur nous comme ces petites entreprises qui se sont tournées vers nous au début de la crise pour nous demander de les faire travailler. Cette relation d’écoute quotidienne fait la richesse et la force des deux parties. Elle explique cette fidélité entre eux et nous par-delà la pratique des appels d’offres.
J. M. : Nous travaillons principalement avec des PME. Le plus petit de nos transporteurs possède cinq camions et le plus grand 2 000.
Nous ne sollicitons pas les très gros transporteurs en raison de leur méthodologie d’approche clients, ni les transporteurs étrangers. Nous privilégions un système que nous souhaitons « maîtrisé », avec l’appui de transporteurs régionaux. Ces derniers nous apportent la souplesse et la réactivité dont nous avons besoin.
J. M. : Nous avons un plan de transport que l’on pourrait qualifier de fixe, qui fonctionne sur des schémas automatiques. Notre plan de transport magasin s’appuie, lui, sur l’existence de dix gros prestataires régionaux qui vont livrer les Fnac et les Darty des départements de leur périmètre. De là, nous faisons chuter la volumétrie de nos différents dépôts. Ensuite, via l’EDI, nos transporteurs reçoivent l’ensemble des volumes qui leur sont attribués dans la nuit pour des livraisons au lendemain matin. Chaque jour, nos transporteurs nous transmettent un reporting (certains hubs ont près de 80 magasins Fnac Darty à gérer). Nous travaillons sur un projet, à 2021, qui nous permette d’être plus pointus sur les remontées de nos horaires de livraison des magasins en France. C’est un vrai challenge que de pouvoir remonter l’information la plus fiable possible de l’ensemble de nos magasins en tenant compte de toutes les données liées à l’accroche-décroche ou aux relais, le tout en travaillant avec une soixantaine de prestataires.
J. M. : Dans nos appels d’offres, nous les incitons au maximum à utiliser des véhicules « verts », en priorité dans les grandes villes et la capitale où la pression est plus forte. Un nombre important de transporteurs ne nous ont pas attendus et roulent sous le label Euro VI. En outre, nous poussons au 100 % gaz sur l’Île-de-France pour 2021.
J. M. : Nous allons livrer les deux enseignes via un même canal par un même transporteur, alors qu’il existait jusqu’à présent deux schémas de distribution différents. Cela nous permettra de gagner en capacité d’accélération (en matière de volumes et de réactivité) car les entrepôts vont produire du Fnac Darty, les transporteurs vont livrer du Fnac Darty, et il n’existera plus qu’un canal unique.
EN BREF
• 700 magasins dans le monde (560 en France)
• 70 plateformes de livraison du particulier
• 6 entrepôts logistiques en France
• 40 M€ de budget transport (B2B)
• 200 expéditions par jour en équivalent semi-remorque depuis l’ensemble des entrepôts
• 60 prestataires sous contrat