Après avoir bousculé le marché des taxis et de la livraison de repas, Uber entend s’attaquer au marché du fret européen. Deux ans après son lancement aux États-Unis, la filiale d’Uber dédiée au transport de marchandises vient d’annoncer le lancement de son application Uber Freight en Europe. Ce service de mise en relation directe entre conducteurs et chargeurs va démarrer aux Pays-Bas, où réside le siège européen d’Uber. "Nous démarrons nos services dans les prochaines semaines, les transporteurs et les chauffeurs locaux pourront réserver et transporter leurs premiers chargements avec Uber Freight. Ensuite, nous prévoyons d’élargir l’accès de nos services à d’autres régions d’Europe", a indiqué sur son blog Lior Ron, patron d’Uber Freight. L’application est d’ores et déjà prête pour le marché international, ne serait-ce que pour assurer un fret retour de type Italie/Pays-Bas. En l’espace de deux ans, cette société s’est constituée une base de 30 000 utilisateurs actifs aux États-Unis. Elle indique que 12 % des 350 000 chauffeurs indépendants se sont enregistrés dans l’application, ce qui signifie qu’ils sont prêts à effectuer un transport, ou l’ont déjà fait.
Notations
L’application présente la liste des transports à effectuer, les itinéraires demandés et le tarif proposé. Uber Freight promet une réservation de fret en quelques clics, avec un suivi géolocalisé et précis de toutes les étapes. Comme dans l’application de réservation de VTC, il est possible de noter les chauffeurs, et ces derniers peuvent, en retour, depuis quelques mois, noter les conditions d’accueil proposés par les clients. Des classements incessants qui, s’ils peuvent s’avérer positifs, concourent également à l’avènement d’un "capitalisme de surveillance" décrié par la chercheuse Shoshana Zuboff, où les droits des salariés sont contournés au profit de contrats de sous-traitance, en général chichement payés.
Règles européennes
L’arrivée d’Uber Freight va-t-elle révolutionner le secteur ? La filiale du géant américain, dont l’entrée en Bourse est prévue pour avril 2019, entend utiliser sa technologie et son expérience "pour améliorer l'efficacité des transports en Europe", avec en ligne de mire ces 21 % des camions qui persistent à rouler à vide. Mais le secteur du transport de marchandises européen, contrairement à celui des taxis, n’a pas attendu l’arrivée d’Uber Freight pour s’ubériser tout seul. En France, l’apparition de la première Bourse de fret remonte au siècle dernier.
Dès 1985, il était possible d’assurer son fret retour avec l’application minitel Lamy2-Teleroute (l’ancêtre d’Alpega). Trois décennies plus tard, le marché regorge d’applications de mises en relation, certaines assurant le rôle de commissionnaires digital, à l’instar d’Everoad. Uber Freight se positionne comme transitaire, en promettant des paiements en quelques jours, voire quelques heures après avoir reçu la preuve de livraison. Uber Freight précise qu’il respectera les réglementations nationales et européennes s’appliquant à tout transitaire, et qu’il veillera également à ce que le droit européen soit également respecté par les utilisateurs de ses services (chargeurs et transporteurs).
Sans abonnement
L’utilisation de la plate-forme sera gratuite pour les expéditeurs et les transporteurs, sans frais de service. Uber Freight prendra sa commission (non précisée) sur la différence entre le prix d'achat et le prix de vente du fret, ces prix étant fixés par ses propres algorithmes. La précédente incursion d’Uber sur le marché des VTC ayant cassé le prix des prestations, la fédération patronale Transport en Logistiek Nederland (TLN) a fait part de ses craintes qu’Uber Freight tire le prix du fret marché vers le bas.