La mission première des boîtiers de télépéage interopérables est de faciliter et de simplifier le paiement des péages en France et en Europe. Avec des écarts limités de prix, ce rôle est assuré par tous leurs fournisseurs avec qualité, reconnaissent les transporteurs. C’est donc sur les services associés que les offres cherchent à se démarquer.
Un tronc de prestations communes à toutes vise à maîtriser, piloter et contrôler le poste péage et la gestion des parcs de badges. À l’aide de portails et d’espaces client en ligne, ce tronc commun se compose d’un suivi budgétaire par le biais d’une facture unique et de tableaux de bord personnalisables et téléchargeables. Selon les paramètres choisis et proposés allant jusqu’au véhicule, à un réseau payant ou à une période donnés, ces rapports fournissent une vision précise de la consommation de péage et des remises accordées par les sociétés d’autoroutes. En option ou non, ce suivi est facilité par des alertes assorties de procédures de réclamation. Elles couvrent par exemple les trajets et/ou les périodes interdits, les badges inutilisés, le trajet le plus cher forfaitaire (TLPC) ou les erreurs de classe du véhicule. Sur son espace, les transporteurs peuvent commander et mettre en opposition un ou plusieurs badges avec effet quasi immédiat, ou en résilier les contrats. L’ensemble des données de trafic comme de facturation peuvent en outre être interfacées et alimenter directement leurs systèmes d’information. Au sein d’Eurotoll, par exemple, « le lancement des boîtiers interopérables Pronto et Pronto SAT a été l’occasion d’améliorer et d’enrichir ces reportings automatisés et personnalisés au sein d’un nouveau portail baptisé MyScope++ », précise le directeur général Arnaud Hary.
À ces services, complétés parfois par la possibilité d’acquitter des parkings sécurisés ou des traversées en ferries, les nouvelles générations de boîtiers interopérables équipés des technologies GNSS (satellite) et DSRC (à ondes courtes) se distinguent par une gestion quotidienne simplifiée. Dotés aussi d’une couche de communication GSM/GPRS, ils ont tout d’abord l’avantage d’être plus opérationnel car interchangeables au véhicule souhaité sous réserve d’un nouveau paramétrage du nombre d’essieux par le transporteur. Cette souplesse et cette flexibilité n’existent pas avec les boîtiers DSRC, affectés et paramétrés pour un véhicule par leur fournisseur dès la commande. Simplifiant aussi leur exploitation, ces boîtiers GNSS et DSRC bénéficient de la fonction OTA (over the air update). À l’instar d’un smartphone, d’une tablette ou d’un logiciel en mode SaaS, cette dernière permet de mettre à jour ses applicatifs ou de modifier sa couverture fonctionnelle à distance comme activer ou désactiver un réseau à péage à la demande du transporteur.
Surfant sur un environnement « camion » de plus en plus connecté, leurs dernières évolutions visent à améliorer leur ouverture et leur capacité à dialoguer avec d’autres composants télématiques du véhicule.
Le nouveau B’Moov d’Axxès permet d’accéder ainsi « à des services de gestion de flotte grâce à son architecture et sa connectique capables de collecter les données du tachygraphe, du bus CAN (controller area network) ou d’un ordinateur de bord », explique Frédéric Lepeintre. Son lancement en novembre 2019 s’est accompagné d’une nouvelle proposition de valeur avec la possibilité de souscrire à deux nouveaux services digitaux géolocalisés présentés par le président d’Axxès : « Le premier Axxès Fleet Management (AFM) délivre en temps réel une visibilité et un suivi de la flotte ainsi que des outils intégrés pour l’optimiser et mieux la piloter : geofencing, calcul d’ETA, alertes, recherche des meilleurs trajets avec le coût des péages… Le second Axxès Fleet Optim (AFO) permet de remonter la consommation réelle de carburant, des cycles d’entretien des véhicules et des données sociales liées au conducteur. » AFO se décline en trois offres avec chacune une série d’options laissant aux transporteurs le choix de définir sa couverture fonctionnelle. Proposés aussi avec le boîtier Viaxxès SAT, « AFM et AFO fournissent une véritable “tour de contrôle” aux gestionnaires de flotte », valorise Frédéric Lepeintre.
Dans le bouquet de services mis à la disposition des distributeurs et utilisateurs de son boîtier GNSS/DSRC Telepass SAT, Telepass propose une offre géolocalisée de gestion et de pilotage de flotte également. « Ce boîtier a la capacité de dialoguer avec l’ensemble des équipements embarqués du véhicule dont son bus CAN et son tachygraphe. Leurs données sont alors remontées par son biais sur un portail unique baptisé K-Master », confirme Régis Cottereau, directeur France de Telepass.
Parmi ses partenaires, UTA intégrera cette nouvelle offre à son boîtier UTA One (Telepass SAT rebrandé aux couleurs d’UTA) cet été. « Avec UTA One, nous proposerons des services de géolocalisation, de suivi des coûts de péage et de la consommation réelle de carburant des véhicules, déclare Christian Wittmer, directeur France d’UTA. Les gestionnaires de flotte pourront également accéder à des données du trafic en temps réel avec des propositions de trajets alternatifs. Seront accessibles aussi des outils d’optimisation et de sécurité comme le geofencing ou pour estimer les coûts de péage et de consommation sur un parcours donné. De la même façon, ils accéderont aux temps de conduite et aux périodes de repos des conducteurs. »
Pionnier dans la fourniture de services de géolocalisation associés au télépéage avec son boîtier Tribox Air, Eurotoll proposera aussi cette offre avec son nouveau Pronto SAT, conçu à partir du Telepass SAT. Dans l’immédiat, l’entreprise dispose de trois offres de géolocalisation permettant avec ses propres outils Web le suivi des véhicules en temps réel, la gestion des POI et le geofencing.
Du côté de Total Fleet et d’AS24 dont la clientèle est exclusivement composée de transporteurs routiers, les services de gestion de flotte se concentrent pour l’heure sur une série de fonctionnalités autour de la géolocalisation. Proposées avec le boîtier GNSS/DSRC PASSango Europilot, « elles permettent de visualiser les déplacements des véhicules en temps réel avec un historique de trente jours », présentent Cyril de Kergommeaux, responsable péages, et Stéphane Poignonnec, directeur commercial Ouest, d’AS24. Aides à la décision et outils de gestion, « les remontées des données géolocalisées du PASSango Europilot facilitent plusieurs analyses, simulations et contrôles : comparaison entre trajets simulés et réalisés, simulation d’itinéraires avec calcul du coût selon les caractéristiques du véhicule ou analyse des trajets programmés et effectués en termes de temps, distance et de coût », ajoute Ariane David, responsable du département Péage chez Total Fleet. Suivi des consommations de péage et alertes en cas de comportement anormal sont d’autres fonctionnalités accessibles à partir du PASSango Europilot prochainement enrichies d’une fonction geofencing. Illustrant une synergie possible entre la prise de carburant et le télépéage, AS24 et Total Fleet peuvent alerter le transporteur si une carte carburant affectée à un véhicule est utilisée alors que son boîtier le géolocalise ailleurs ! Autre innovation, AS24 est le seul à fournir une application mobile, Fleet Manager, qui intègre le suivi et la gestion du poste péage.
Chez DKV Euro Service, des services de géolocalisation couplés à la DKV Box Europe sont annoncés avant fin 2020.
Au regard de l’évolution rapide des technologies de mobilité, de traitement et de collecte des données, l’avenir des boîtiers de télépéage interopérables actuels interpelle. De l’avis de leurs fournisseurs, qui reconnaissent y travailler, une migration vers les outils mobiles des conducteurs tels que smartphones est très probable à terme. À leurs yeux, ce transfert suppose d’apporter les mêmes garanties de sécurité et de fiabilité que les boîtiers actuels. Il suppose aussi que tous les acteurs concernés, notamment les sociétés d’autoroutes, les percepteurs de péage ou les États membres adaptent en parallèle leurs systèmes d’information. À la question de savoir si leur boîtier est appelé à être fourni en première monte lors de l’achat d’un véhicule, les avis sont plus partagés. Si techniquement rien ne l’empêche, cette évolution nécessiterait en revanche de réserver au transporteur sa capacité de choix entre les solutions de télépéage interopérables disponibles sur le marché. Elle supposerait aussi un rapprochement de leurs fournisseurs avec les constructeurs de véhicules industriels. Avec pour objectif de développer des boitiers interopérables avec une couverture géographique la plus large possible, ce rapprochement existe déjà avec Toll4Europe. Cette co-entreprise rassemble en effet DKV Euro Service, Daimler, T-Systems et Shell.
Quoi qu’il en soit, les technologies big data et d’intelligence artificielle se prêtent déjà au traitement des données collectées par les boîtiers de télépéage interopérables poids lourds. Elles pourraient servir à créer des services à l’attention des transporteurs…
E. D.