Marc Mandaroux : Cette démarche vise à exprimer l’importance grandissante que l’environnement – le développement durable sur un spectre plus large – prend au sein du groupe Kuehne+Nagel, plus particulièrement en France, un pays à la pointe dans la prise en compte du réchauffement climatique. Le groupe est déjà engagé depuis plusieurs années sur un programme baptisé KN Green qui s’est achevé en 2020. Le groupe s’engage depuis 2019 sous la bannière du programme Net Zero Carbon avec un ensemble d’objectifs sur la période 2020-2030 (vision long terme et action au quotidien). Nous sommes engagés dans une inflexion supplémentaire car le sujet devient de plus en plus prégnant. Notre propos vise à répondre concrètement aux attentes de nos clients et de nos collaborateurs, dans une vision sur le long terme et au quotidien.
M. M. : Le secteur est engagé sur un objectif à 2030 de réduction de 40 % de ses émissions par rapport à 1992. Nous campons donc sur un besoin de réduction fort en valeur absolue. Le secteur du transport est responsable pour 7 à 8 %, selon les sources, des émissions de CO2 à l’échelle mondiale. Mais nous nous sentons concernés par les enjeux de développement durable et nous agissons.
Le groupe Kuehne+Nagel a produit 311 000 tonnes de CO2 en 2019. Nos objectifs consistent à être neutres en carbone dès 2020 sur nos scopes 1 – la consommation d’énergies fossiles – et 2 – l’électricité que nous achetons pour la production de nos services. De plus, à horizon 2030, nous serons neutres sur notre scope 3. Cet objectif est ambitieux et nous commençons dès maintenant à nous structurer pour l’atteindre.
M. M. : Le groupe parvient à cette neutralité carbone par une amélioration de la performance énergétique et une logique de réduction de ses émissions. Tout ce que nous ne pouvons réduire, nous le compensons par l’achat de crédits CO2 auprès de programmes (que nous sélectionnons et finançons) et qui répondent aux critères de développement durable de l’ONU. Pour autant, avant de vouloir réduire et compenser, il convient de mesurer, de rendre visible. C’est le premier pilier de notre approche.
Nous appliquons à nos partenaires transport nos schémas internes de travail de réduction de l’empreinte carbone, ce que nous appelons le scope 3. Ce scope comprend tous les services que nous ne produisons pas en direct, qu’il s’agisse de la sous-traitance pour l’aérien, le maritime ou la route. Il en va de même pour nos clients à qui nous proposons des solutions de visibilité au travers de nos différents outils de calcul et de présentation des options mesurables en CO2 pour le transport.
Nous accompagnons nos clients dans des actions de réduction qui passent par des solutions d’optimisation du plan de transport. Et nous nous engageons sur les motorisations alternatives pour notre parc propre, qui est composé de 2 600 véhicules (remorques incluses) en France exploités dans le cadre de notre activité de messagerie.
M. M. : Nous nous orientons vers des axes de recherche-développement et d’expérimentation de véhicules à motorisations alternatives. Nous n’avons pas de tabou a priori sur ces énergies dès lors qu’elles participent à l’amélioration de notre empreinte environnementale. Nous sommes très attentifs à l’évolution de la réglementation sur les zones à faibles émissions, laquelle pousse les villes de plus de 100 000 habitants à envisager une ZFE si la qualité de l’air ne répond pas aux standards sanitaires. Nous ne réfléchissons pas, là, sur le CO2 mais sur la qualité de l’air, à savoir les particules et les autres émissions. Nous sommes l’un des acteurs majeurs en B2B de la livraison notamment en zones d’activités et industrielles, lesquelles seront de plus en plus au cœur des réflexions sur l’évolution des véhicules les plus polluants. Ceci en fait d’ailleurs un axe de développement important pour nous notamment au travers de l’évolution de notre réseau d’agences. On pense au recours à des bâtiments plus vertueux pour l’environnement et à des flottes de véhicules elles aussi plus vertueuses. Partout où cela est possible nous irons au-delà des exigences réglementaires.
M. M. : Nous ne possédons pas encore de certitudes sur le type d’énergie à laquelle nous allons recourir. En fait, nous ne nous interdisons pas de regarder, d’observer voire d’expérimenter si la technologie en question est suffisamment mature, tout cela indépendamment de l’aspect strictement économique.
M. M. : Nous le savons et nous l’appréhendons comme un postulat. Là où l’équation économique-écologique n’est pas au rendez-vous, nous travaillons à trouver le bon équilibre. Nous considérons très clairement que l’hydrogène est une voie d’avenir, mais un avenir au long terme. Par conséquent, tout l’enjeu – et nous entendons prendre toute notre part en tant que leader du secteur – consiste à participer à cette réduction nécessaire entre aujourd’hui et le moment où nous accéderons à une énergie bas carbone, probablement à l’horizon 2050 et après. L’hydrogène possède beaucoup d’arguments mais entre sa production et sa distribution, ce n’est pas une énergie disponible opérationnellement.
M. M. : Nous expérimentons des camions au gaz depuis plusieurs années sur le site de Nancy et, depuis peu, en région parisienne. Nous le faisons à petite échelle mais ne négligeons pas ces solutions. À titre d’exemple, nous observons de près l’expérimentation du bio fioul dans le maritime. Je dirais que nous regardons ce qui se fait dans les différents secteurs du transport et nous ne nous interdisons pas d’essayer de transposer les bonnes idées, les bonnes pratiques en matière de type de carburant d’un secteur à l’autre.
M. M. : L’équation n’est pas simple. Selon moi, il faut distinguer deux situations : celle où la réglementation évolue ou va évoluer de telle façon qu’il n’y aura plus le choix – je pense à toutes ces villes où le diesel sera interdit à l’horizon 2024. En l’occurrence, tout le monde sera sur un pied d’égalité. Ce sera un élément d’attractivité pour les transporteurs ou les commissionnaires de transport qui sauront trouver les solutions les plus optimisées. Cela passera par une collaboration étroite avec les sous-traitants transport qui auront à s’investir eux aussi dans la recherche de solutions plus environnementales et plus économiques. Il faudra en outre composer avec les nouvelles technologies qui permettront de mieux gérer l’écoconduite avec la télématique embarquée. J’ajoute que, même si notre engagement y est relatif, nous allons étudier la solution du transport combiné notamment sur la longue distance intra-France.