Optimiser la rentabilité au cœur des organisations

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Au cœur des organisations, les exploitants ont traversé la crise en reformatant parfois chaque jour leur plan de transport. Focus sur une profession toujours plus outillée, alors que de nouvelles formations initiales, Bac et BTS, mettent en avant leurs compétences d’organisation et de gestion, à l’interface entre les clients et les personnels roulants.Dossier réalisé par Florence Roux

Si, depuis le début du confinement, les conducteurs ont pu faire entendre leurs revendications d’un meilleur accueil sur les routes ou sur les sites de livraison, les exploitants, au cœur des entreprises, essentiels à leur rentabilité, n’en ont pas moins été aussi actifs.

Voire hyperactifs, selon les secteurs, forcés d’adapter leur plans de transport dans un climat d’incertitude.

Au contact des conducteurs

« La forte variabilité de l’activité a obligé nos exploitants à réorganiser les flux au jour le jour, note Sandra Olano, directrice générale du groupe éponyme, basé à Saint-Jean-de-Luz (64). Il leur a fallu inventer des solutions pour, par exemple, répondre à l’accroissement des km à vide pour garantir la satisfaction du client. Et globalement, ils ont tous travaillé sur site, grâce à une stratégie de protection et de distanciation. Il était essentiel qu’ils restent au contact des conducteurs ». Beaucoup des entreprises qui ont maintenu des flux ont opté pour une présence des exploitants dans les entreprises, aux côtés des équipes. « Nous avions les outils pour déporter nos huit postes, note Richard Panon, responsable d’exploitation d’Orléans Transport, à Saran (45). Mais en messagerie ou dans le fret palettisé, nous allons beaucoup sur le quai, nous avons choisi de venir sur site, en respectant la distanciation ». Idem aux transports Richard, à Coueron (44), où « l’on a peu télétravaillé, sauf une ou deux personnes ponctuellement, précise Sébastien Deniau, directeur général. Nous avions tout de même mis en place un chat sur Teams en continu pour travailler de manière collaborative à distance comme dans l’open space”. Chez Agediss, basée aux Essarts-en-Bocage (85}, dont l’activité est par ailleurs très digitalisée. « Plus de 90 % des personnels du siège ont télétravaillé, relève Nicolas Tellier, président. Mais sur les sites, les exploitants sont venus au bureau, moyennant des séparations physiques et un travail en trois huit… Leur présence est essentielle à l’organisation des tournées ou, par exemple, à la gestion des anomalies ». Même combat dans la partie « cours de ferme » du groupe Mousset, à Saint-Florence (85) où le personnel, entre les livraisons de volailles, lait ou déchets abattoir, n’a pas chômé depuis la mi-mars. Ici, les quinze exploitants sont des « managers » pilotant des pools de conducteurs. « Ceux qui avaient besoin ont télétravaillé, mais c’était ponctuel et compliqué, assure Hélène Bouquet, directrice régionale. Et il était important d’être là pour soutenir les conducteurs et connaître le retour terrain des clients”.

L’exploitation augmentée

Quid de « l’accélération des tendances” à la digitalisation, constatée en avril par une dizaine d’éditeurs de logiciels de TMS (OT, n° 3019, du 01.05.2020) ? Réactivité et réorganisation oblige, ces derniers ont en effet été très sollicités pour re paramétrer et former, « optimiser la couverture fonctionnelle des TMS” ou l’interopérabilité avec les systèmes chargeurs… Le télétravail, souvent de mise pour les personnels administratifs, était moins courant chez les exploitants… « Nous avons procédé à des installations de postes distants afin que nos clients puissent télétravailler », note tout de même Sandra Da Silva, Abacom informatique, éditeur du logiciel de gestion Winfret. « J’ai évalué à environ 20 % le taux de connexion depuis les domiciles, simplifié par le full web, mais le home office a été plus accentué sur la partie facturation », détaille Eric Varenne, de Fret Solutions, éditeur de Cargo TMS, logiciel en full web. Nous avons aussi répondu à des demandes de formation ». Effectivement, en mars, dans un contexte mouvant, constate Hélène Kerjean, d’Akanea, « certains transporteurs hyper sollicités ont eu besoin de formation pour mieux utiliser toutes les potentialités de leur TMS, des alertes ou des modules comme le planning graphique qui optimise la gestion des flux en croisant le prévisionnel et le réel, en lien avec des bourses de fret ou les conducteurs”. Thierry Genelot, d’Urios-Wintrans, évoque une exploitation augmentée grâce, en particulier, « aux solutions d’intelligence artificielle intégrées au TMS qui apportent à l’exploitant une meilleure visibilité, en lien avec les bourses de fret, les clients, les conducteurs. Elles l’aident à gagner en réactivité et à économiser du temps pour se concentrer sur l’analyse et les contacts humains”. A cette fin, la plupart des éditeurs soulignent l’importance d’adapter les outils au type d’exploitation, qui diffère selon l’entreprise et ses activités, depuis le rythme quotidien en messagerie à une organisation plus au long cours dans les transports exceptionnels. Entre autres. Mais il y a une constante : les exploitants travaillent à l’interface entre les clients et les conducteurs. « Le digital s’inscrit aujourd’hui au cœur des exploitations, commente Jean-Christophe Edy, directeur réseau de Tred Union. Il aide à traiter un maximum de données, à rechercher du fret sur des plateformes en ligne, à prendre des commandes en EDI avec un client, à transmettre des ordres de transport ou à optimiser les tournées. Mais l’exploitant doit toujours soigner les deux dimensions majeures de son métier : le lien commercial avec le client, managérial avec les conducteurs ».

Ainsi le groupement Tred Union, qui organise régulièrement des challenges du meilleur exploitant, orchestre des journées d’échange et de formation pour ces professionnels dont une, cette année, consacrée à l’activité commerciale. « Ce métier comporte une dimension stratégique : une bonne partie du chiffre et de la rentabilité repose sur le travail des exploitants, pointe Jean-Christophe Edy. Mais il comporte aussi un abord sensible, avec un rôle social capital auprès des conducteurs ». Dans le même sens, Thierry Dirheimer, directeur de l’Isteli à Bordeaux, relève que « les exploitants sont de super techniciens, experts dans l’utilisation des bourses de fret comme des outils d’optimisation des tournées, attentifs aux réglementations en évolution permanente… Cependant, les entreprises nous sollicitent aujourd’hui pour renforcer les modules commerciaux et managériaux dans les formations. Quels que soit les logiciels, lorsque des aléas ou des problèmes surviennent, il faut savoir préserver une relation humaine en direct, avec le client comme avec le conducteur”. Pierre de Surône, directeur exécutif de l’Aftral, renchérit : « On s’aperçoit qu’on ne peut pas toujours se contenter de « pousser une information” ou une donnée, mais qu’il faut l’accompagner”.

Hélène Bouquet, dans le groupe Mousset, en est convaincue :”Les outils digitaux doivent se développer pour faire gagner du temps et de la qualité de service, mais pas au détriment des relations humaines”. Parmi les fondamentaux de leur poste, les 15 managers exploitants de l’activité cour de ferme, des « mini patrons maîtres de leur rentabilité’, dit-elle, opèrent la facturation ou des tableaux de bord, mais assurent aussi la relation partenariale avec les clients et le management des conducteurs, avec gestion des plannings, débriefings hebdomadaires, recrutements…

Aux transports Richard, où les outils digitaux sont très présents, l’organisation joue aussi un rôle capital pour fluidifier la tâche des exploitants. Ainsi, une personne planifie d’une semaine sur l’autre l’affectation des moyens techniques et humains nécessaires aux livraisons. « C’est un poste clé, appuie Sébastien Deniau. A la jonction du technique et des RH, il rationalise la gestion du temps de travail des conducteurs, tout en dégageant les exploitants. Ceux-ci peuvent mieux se consacrer au management et aux relations commerciales avec leurs clients, chacun dans sa zone géographique… En se concentrant aussi sur le taux d’occupation des véhicules ».

Nouveaux BAC et BTS

Les deux principales formations initiales qui préparent à l’exploitation se transforment. Le bac pro transport devient bac organisation-transport de marchandises. Le BTS Transport et prestations logistiques (TPL) s’intitulera BTS Gestion des transports et logistique associée (GTLA) qui dispensera de l’attestation de capacité de transport. ’Les notions d’organisation et de gestion des transports sont plus précises et attractives“, souligne Philippe Gaumet, directeur du département de l’ingénierie et de la pédagogie à l’AFT. Premiers bacheliers en juin 2023.

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