Les villes poussent aux transformations

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Promulguée en 2019, la loi d’orientation des mobilités (LOM) donne de nouvelles prérogatives aux collectivités pour améliorer leur qualité d’air. Parmi les impacts attendus, l’interdiction d’accès aux véhicules les plus polluants et le recours accru aux sous-traitants travaillant à pied, à vélo ou en triporteur.

Avec le boom de l’e-commerce, les collectivités anticipent un afflux de livraisons qui vont davantage engorger les rues et aggraver la pollution de l’air. Pour limiter ces risques, le gouvernement a adopté la loi d’orientation des mobilités (LOM) du 24 décembre 2019 qui dote les collectivités de prérogatives en matière de régulation des mobilités. « Ce texte a pour objectif de diminuer l’empreinte environnementale des villes en fluidifiant notamment les transports en milieu urbain », résume Bruno Durand, maître de conférences en logistique et Supply Chain Management à l’Université de Paris Nanterre. Dans cette optique, l’article 86 de la LOM autorise la création de zones à faibles émissions (ZFE) dans les agglomérations mais aussi dans les zones pour lesquelles un plan de protection de l’atmosphère (PPA) est adopté par le maire ou par le président d’un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) ayant des pouvoirs de police. Concrètement, ces ZFE reposent sur le système des vignettes Crit’Air aussi appelé certificat qualité de l’air (CQA).

Le principe est de réduire, voire d’interdire, la circulation des véhicules les plus polluants selon des périodes choisies (jours, heures, etc). La création d’une ZFE doit être accompagnée d’une campagne d’information locale d’au moins trois mois pour faire connaître le périmètre contrôlé ainsi que les restrictions de circulation mises en œuvre. Parmi les plus avancées, les villes de Paris et Grenoble ont démarré progressivement en 2015 pour la première et 2017 pour la seconde. Cette année, les véhicules sans CQA ou estampillés de Crit’Air 4 et 5 y sont désormais interdits. Cette restriction va s’étendre aux véhicules Crit’Air 3 en 2022. Quant aux Crit’Air 2 et diesel, ils seront bannis de Paris en 2024 et de Grenoble en 2025. À ces échéances, l’accès à la ZFE sera réservé aux seuls véhicules électriques ou estampillés Crit’Air 1. Même genre de restrictions sur la Grande Île de Strasbourg où a été créée en 2018 une ZFE. Concrètement, les véhicules de livraison sans certificat ou estampillés Crit’Air 4 et 5 ne peuvent plus y circuler. Pour les autres, ils ont jusqu’à 10 h 30 pour livrer leurs marchandises. À l’exception des véhicules électriques et GNV qui disposent d’une heure supplémentaire, jusqu’à 11 h 30. Strasbourg prévoit d’étendre la ZFE sur toute la métropole en 2021 et vise à sortir du diesel en 2025. Ailleurs, une vingtaine de projets de ZFE sont menés, entre autres, à Clermont-Ferrand, Lyon, Marseille. Toutes ces métropoles font partie des 12 agglomérations où la valeur limite annuelle (40 microgrammes par mètre cube de dioxyde d’azote) est régulièrement dépassée. Ce qui a valu à la France d’être condamnée par la Cour de justice de l’Union européenne pour manquement aux obligations concernant la qualité de l’air.

Les expressistes étoffent leur flotte verte

La multiplication annoncée des ZFE va complexifier la tâche des transporteurs sachant que d’une ville à l’autre, les conditions d’accès varient selon les véhicules et selon les heures de la journée. Sauf à entamer dès maintenant leur transition énergétique en investissant dans des modes plus doux et moins polluants mais aussi beaucoup plus onéreux. Les expressistes ont déjà pris les devants. C’est le cas d’UPS qui disposait en novembre dernier de 39 véhicules électriques et 17 au biogaz. L’expressiste prévoit d’augmenter sa flotte cette année. Idem pour DHL. Ce dernier vient de renforcer son parc de véhicules verts en investissant 1 million d’euros dans 23 nouveaux utilitaires électriques, principalement des Renault Master Z.E, d’une capacité de 11 et 13 m3. Ce qui porte à 105 le nombre de véhicules verts assurant les livraisons de l’entreprise en France. Grâce à ces acquisitions, DHL Express France avance d’un cran dans son projet d’assurer 70 % de ses activités sur le premier et le dernier kilomètre avec des solutions zéro émission d’ici à 2025. Dans cette perspective, l’expressiste a ouvert une agence 100 % électrique dans le 18e arrondissement de Paris pour desservir quatre arrondissements (9e,10e,18e et 19e) avec 18 véhicules dont des Nissan-Voltia et un des premiers MAN électrique eTGE. « Je prospecte au sud de Paris, Lyon et Marseille afin d’ouvrir d’autres agences électriques », indique Fatah Ziani, directeur des opérations pour la France chez DHL qui, par ailleurs, noue des partenariats avec deux plateformes opérant avec des cyclistes afin de réduire drastiquement le taux d’échec de la livraison. Il s’agit en l’occurrence de Tousfacteurs et de You2You. Cette dernière fait travailler ses cyclistes dans huit villes en France dont Bordeaux, Lille, Marseille, Nantes, Nancy, Paris et Rennes. Tandis que Tousfacteurs, qui vient de lever 1,5 million d’euros, opère sur Lyon, Paris et Toulouse.

Les triporteurs ont le vent en poupe

« Outre la dimension matérielle, la LOM promet de faire évoluer l’organisation du transport routier de marchandises et de le rendre plus efficient », prévoit Bruno Durand. L’avenir passera par la mutualisation des livraisons et d’espaces logistiques de proximité (ELP) mais aussi par des partenariats avec des acteurs organisés pour livrer avec des véhicules électriques ou GNV, à pied, à vélo, ou encore en triporteur. Un mode de livraison qui permet de transporter plus de 100 kilos de marchandises. Voire beaucoup plus. À l’instar des engins utilisés par Les Triporteurs de l’Ouest qui comptent aujourd’hui huit sites dont certains sont franchisés. En plus de Rennes où est basée la holding, Les Triporteurs sont implantés à Angers, Bordeaux, Montpellier, Lyon, Nantes, Saint-Malo et Strasbourg. Chaque site d’une superficie moyenne de 400 m2 fait travailler 10 à 15 collaborateurs. Embauchés en CDI, ils occupent des postes de logisticiens et de responsables de quai et d’agence. Sans oublier les livreurs, qui circulent avec des triporteurs à assistance électrique couplés à des remorques. Capables de transporter jusqu’à 300 kilos de charge utile, ces véhicules dédiés ont été validés par la médecine du travail. Côté partenaires, la société travaille avec de nombreux expressistes. Son logiciel de gestion de tournées est d’ailleurs alimenté par EDI ou tout simplement interfacé avec les TMS de ses partenaires. « Les sites livrent en moyenne 12 à 15 tonnes par jour contre 2 tonnes il y a dix ans », indique Fabrice Marteaux, le dirigeant des Triporteurs de l’Ouest qui aspire à s’implanter à Paris et dans d’autres métropoles. Mais les places sont chères. « Un tiers des métropoles ont des disponibilités allouées uniquement sur appel d’offres », rapporte le dirigeant.

La Poste joue la carte de la mutualisation des services

La mutualisation des livraisons en centre-ville promet aussi de se développer avec la solution Urby de La Poste. Il s’agit d’un dispositif global de logistique qui propose des services de stockage et de livraison urbaine à une large clientèle dont les transporteurs et messagers. Urby s’appuie sur des centres de mutualisation logistique en périphérie des villes pour recevoir les marchandises acheminées par gros porteur afin d’être ensuite livrées au domicile des particuliers ou auprès des commerçants des centres-villes grâce à une flotte de véhicules à faibles émissions. « La Poste dispose d’une des plus importantes flottes de véhicules électriques au monde, constituée d’environ 8 000 utilitaires, en l’occurrence des Renault Kangoo ZE, 23 000 vélos à assistance électrique, 1 300 quads et 6 300 véhicules trois roues appelés Staby », indique Jean-Louis Carrasco, directeur de la logistique urbaine de La Poste service courrier-colis, chargé de la livraison urbaine mutualisée. En prévision de l’interdiction des accès aux véhicules les plus polluants, l’opérateur historique a noué des accords de logistique urbaine avec une vingtaine de métropoles. Le service Urby est déjà disponible dans une douzaine de villes.

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