Ils étendent leur couverturegéographique

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Longue est la route qui mène à l’interopérabilité des systèmes de péage poids lourds en Europe. Elle s’accélère toutefois sous l’effet d’une nouvelle directive et des technologies qui équipent les derniers boîtiers de télépéage. L’ouverture à tous leurs fournisseurs du réseau allemand témoigne de ce mouvement.

La Commission européenne travaille depuis 2004 à la création d’un réseau routier et autoroutier à péage interopérable au sein de l’Union. La directive 2004/52 sur le service européen de télépéage (SET) fixait même 2013 pour atteindre cet objectif. « Au bout de quinze ans, force est de constater que cette interopérabilité est loin d’être atteinte », déplorent Cyril de Kergommeaux, chef du département stratégie et marketing péages d’AS24, et Stéphane Poignonnec, directeur commercial Ouest d’AS24. Pis, de nouveaux systèmes de télépéage apparaissent sur la base de systèmes embarqués nationaux sans intégrer dès leur phase de démarrage l’ouverture aux boîtiers interopérables existants. Tel est le cas des dispositifs de télépéage lancés par la République tchèque le 1er décembre 2019 ou par la Bulgarie le 1er mars 2020.

Obstacles appelés à disparaître

L’existence de réseaux routiers et autoroutiers soumis à des vignettes, eurovignettes et autres redevances freine aussi la transition vers un environnement interopérable. Appelés à disparaître sous trois ans environ, ces systèmes sont toujours en vigueur au Luxembourg et aux Pays-Bas ainsi que, à l’extérieur de l’Union, en Suisse (RPLP). L’emploi de plusieurs technologies de télépéage n’aide pas non plus. Deux sont principalement utilisées : à ondes courtes dite « DSRC » (dedicated short range communications) déclenchant l’ouverture des barrières de péage, sur l’exemple de la France avec son système TIS-PL ou permettant les trajets en zone en « free flow » et par satellite dite « GNSS » (global navigation satellite system), qui détermine les montants de péage à acquitter par géopositionnement des véhicules. Ce frein est toutefois en passe d’être levé grâce aux nouvelles générations de boîtiers interopérables satellitaires qui intègrent nativement la technologie DSRC.

Un nouvel élan

Un autre obstacle est souvent évoqué pour expliquer la lente interopérabilité des systèmes de péage en Europe : les difficultés d’homologation et de certification des boîtiers interopérables dans plusieurs États membres, à l’image de l’Italie ou de l’Allemagne dans un passé récent. Elles ont pour conséquences l’alourdissement des coûts et l’allongement les procédures d’accréditation des fournisseurs de boîtiers interopérables pour les autoriser à proposer leurs services sur les réseaux à péage concernés.

Pour remédier à cette situation et prévenir un éventuel protectionnisme en faveur d’opérateurs historiques nationaux… la Commission a adopté une nouvelle directive SET en 2019 (2019/520). Abrogeant la directive 2004/52 et à transposer avant le 19 octobre 2021, elle réaffirme l’obligation faite aux États membres et aux percepteurs de péage d’ouvrir leur réseau aux fournisseurs de boîtiers interopérables dans le respect de nouvelles règles (voir encadré). Depuis cette directive, l’interopérabilité des systèmes de péage semble s’accélérer dans l’Union. Elle est stimulée en outre par l’arrivée sur le marché des nouvelles générations de boîtiers interopérables combinant technologies DSRC et GNSS ainsi que par la fin programmée des systèmes sous vignette, eurovignette et autres redevances. La directive 2019/520 impose aussi à tous les réseaux de télépéage récents ou à venir de s’ouvrir aux boîtiers interopérables dès le 19 octobre 2021 sous certaines conditions (voir encadré page 21).

B’Moov d’Axxès

Cette ouverture géographique se vérifie à travers les nouveaux boîtiers interopérables DSRC et GNSS. Dans la plupart des cas, ces derniers permettent aux transporteurs d’activer seulement les réseaux à péage qu’ils empruntent dans le catalogue proposé par leurs fournisseurs. Grâce à leur double technologie, ils sont en outre conçus et configurés pour recevoir de futurs réseaux à péage interopérables sous réserve d’homologation et certification délivrées par l’État membre ou le percepteur de péage de ces derniers.

C’est dans ce cadre qu’Axxès a développé son nouveau B’Moov. Sous technologie DSRC et GNSS, ce boîtier disponible depuis novembre 2019 est amené à remplacer progressivement le Viaxxès SAT lancé en 2012. Fourni par Kapsch TrafficCom, « il est d’ores et déjà compatible avec les réseaux à péage au Portugal, en Espagne, France, Autriche, Belgique (Viapass), Italie, et Allemagne, ainsi que pour franchir les tunnels du Liefkenshoek en Belgique et de Herren en Allemagne », détaille Frédéric Lepeintre, président d’Axxès. Est annoncée à court terme la couverture des réseaux à péage en Suisse, Bulgarie, République tchèque, Hongrie, Pologne ainsi que dans les pays et tunnels du nord de l’Europe.

En plus de B’Moov, la gamme de boîtiers et badges interopérables d’Axxès comprend le badge TIS-PL (France) ainsi que les boîtiers Viaxxès (France, Espagne, Portugal, Italie) et Viaxxès SAT (couverture du B’Moov sauf Italie et Allemagne).

DKV Box Europe par DKV Euro Service

Fournie par Siemens et disponible depuis novembre 2019, la DKV Box Europe combine les technologies ondes courtes et satellite. « La DKV Box Europe est utilisable dès à présent en Belgique, Allemagne, Autriche, France, Portugal, Espagne, ainsi que pour emprunter les tunnels de Herren, sous le Warnow en Allemagne, et du Liefkenshoek en Belgique », présente Eddy Bahouche. « Sont en préparation l’Italie, qui sera accessible dès cet été ainsi que la Slovénie, envisagée avant la fin de l’année, puis la Norvège, la Pologne, la République tchèque et la Hongrie ainsi que plusieurs tunnels scandinaves », confie le directeur général de DKV Euro Service France. En sus de la DKV Box Europe, la gamme de boîtiers interopérables de DKV Euro Service comprend la DKV Box TIS-PL (France, tunnels Herren sous la Warnow et du Liefkenshoek) et la DKV Box Select (France, Espagne, Portugal, tunnels Herren, sous la Warnow et du Liefkenshoek).

Passango Europe avec AS24 et Total Fleet

Au sein du groupe Total, Total Fleet et AS24, dont la clientèle est exclusivement composée de transporteurs routiers, préparent aussi l’extension géographique de leur badge commun DSRC/GNSS PASSango Europe. Conçu par Siemens, « il couvre la France, l’Espagne, le Portugal, la Belgique, l’Autriche ainsi que les ponts et tunnels du Liefkenshoek, d’Oresund en Suède et de Storebaelt au Danemark », indiquent Cyril de Kergommeaux, responsable péages d’AS24, et Stéphane Poignonnec, directeur commercial Ouest. « PASSango Europe et sa version Europilot avec service de géolocalisation proposeront le réseau allemand cet été », ajoute Ariane David, responsable du département péages chez Total Marketing Services. D’ici fin 2021, plusieurs pays sont appelés à enrichir le périmètre couvert par PASSango Europe : Italie, Suisse, Bulgarie, Hongrie, Pologne, République tchèque, Slovénie et Slovaquie.

En sus du PASSango Europe et de sa version Europilot avec géolocalisation, la gamme de boîtiers interopérables d’AS24 et de Total Fleet comprend les Passango France (France) et PASSango France-Ibéric (France, Espagne, Portugal et tunnel du Liefken-shoek).

Nouvelle gamme Pronto d’Eurotoll

Dernier-né parmi ces boîtiers « intelligents », le Pronto SAT d’Eurotoll disponible à la vente depuis janvier 2020. Conçu par Telepass, qui partage avec Eurotoll le même actionnaire principal Atlantia depuis le rachat avec ACF d’Abertis fin 2018, Pronto SAT est commercialisé sous les couleurs et le design d’Eurotoll. Doté des technologies DSRC et GNSS, « il permet d’accéder aux réseaux à péage en Italie, France, Espagne, Allemagne, Autriche, Belgique et au Portugal (Viapass et tunnel du Liefkenshoek) », présente Arnaud Harry, directeur général d’Eurotoll. La collaboration avec Telepass pour la fourniture de boîtiers interopérables est à l’origine aussi du modèle Pronto sous technologie DSRC. « Lancé en juin 2019, il couvre l’Italie, la France, l’Espagne, l’Autriche, le Portugal et le tunnel du Liefkenshoek », ajoute le responsable.

En sus des Pronto, la gamme de boîtiers interopérables d’Eurotoll se compose du badge Tempo (France, Espagne, Portugal et tunnel du Liefkenshoek) et de la Tribox Air (Belgique, tunnel du Liefkenshoek inclus, France, Espagne, Autriche, Portugal).

Distributeurs du boîtier et de la technologie Telepass

Sur le marché des services européens de télépéage, Telepass se distingue de son côté par la distribution indirecte de ses boîtiers et badges embarqués ainsi que de ses services télématiques et digitaux associés. « Telepass commercialise ses technologies au travers d’un réseau d’une soixantaine de distributeurs en Europe dont une dizaine en France tels que UTA, Shell, Vialtis ou Negometal », explique Régis Cottereau, directeur France de Telepass. Il s’agit de spécialistes du marché du transport routier, des sociétés de services, fournisseurs de cartes pétrolières et centres techniques. Ils sont également experts dans la gestion des encours crédits des transporteurs et dans l’analyse de leur solvabilité. « Nos boîtiers peuvent être rebrandés aux couleurs du distributeur, qui choisit parmi nos services et/ou ajoute ses propres prestations », détaille le responsable. Dans ce cadre, Telepass a conçu deux boîtiers interopérables : Telepass SAT intégrant les technologies DSRC et GNSS et Telepass EU sous DSRC uniquement. « La couverture des réseaux de ces deux solutions est choisie par nos distributeurs sachant que le Telepass SAT permet d’accéder aux réseaux à péage en France, Espagne, Pologne (A4 Cracovie-Katowice), Italie, Belgique (Viapass et tunnel Liefkenshoek), Allemagne, Autriche, au Portugal, et dans les pays scandinaves. Actuellement, il propose la meilleure couverture européenne et représente 80 % de nos ventes », confie Régis Cottereau. Quant au Telepass EU, il couvre les réseaux à péage au Portugal, en France, Espagne, Italie, Autriche, l’autoroute polonaise A4 Cracovie-Katowice et le tunnel du Liefkenshoek. Entre 2020 et 2021, la Slovénie, la Suisse, la République tchèque, la Slovaquie, la Pologne et la Hongrie devraient enrichir la couverture des boîtiers Telepass.

UTA One par UTA

Parmi les distributeurs des solutions Telepass, UTA, filiale du groupe Edenred a lancé en 2019 le boîtier interopérable UTA One qui succède à l’UTA MultiBox. Équipé des technologies à ondes courtes et satellitaires, « il permet d’accéder aux réseaux à péage au Portugal, en France, Espagne, Italie, Allemagne, Belgique, Autriche ainsi que d’emprunter l’autoroute A4 en Pologne et le tunnel Liefkenshoek » précise Christian Wittmer. « Dans un futur proche, nous envisageons d’étendre la couverture d’UTA One à la République tchèque, la Hongrie, la Slovaquie, la Norvège, la Pologne et les ponts scandinaves d’Oresund et de Storebaelt », ajoute le directeur France d’UTA. Le groupe commercialise également l’UTA MultiBox Light (France, Portugal, Espagne, tunnel Liefkenshoek) ainsi que le Telepass EU (France, Espagne, Portugal, Italie, Autriche, l’autoroute polonaise A4 Cracovie-Katowice et le tunnel du Liefken-shoek).

Quid des autres réseaux à péage européens ?

L’offre de la quasi-totalité des fournisseurs et distributeurs cités comprend aussi des cartes de paiement à l’attention des transporteurs pour acquitter les réseaux à péage non couverts par leurs boîtiers interopérables. Ouvrant à divers services comme la distribution de carburants, l’accès à des parkings sécurisés, la réservation sur ferries…

Ces cartes combinées aux boîtiers permettent aux transporteurs de centraliser la facturation de leurs péages via à un fournisseur unique. Avec le même avantage, la plupart des fournisseurs de boîtiers interopérables proposent la possibilité de payer, avec leurs cartes ou leurs services en ligne, les vignettes, eurovignettes et autres redevances sur les réseaux qui les utilisent ainsi que les boîtiers nationaux non interopérables voire des trajets ponctuels sur routes et autoroutes payantes.

Avantages des boîtiers interopérables pour les transporteurs

La souscription à un service de télépéage ouvre plusieurs avantages pour les transporteurs dont l’accès automatique ou différé dans le cas de l’Italie, aux remises des sociétés d’autoroutes. Reprises dans une facture unique avec possibilité de détailler les consommations de péage par réseau, pays, par véhicule ou sur une période donnée, ces remises sont fonction de la classe et de la norme Euro du véhicule dans la majorité des cas. Elles vont jusqu’à 13 % sur les réseaux à péage français. Outre le gain de temps lors du franchissement des péages avec barrières (DSRC), le boîtier de télépéage évite de fournir un moyen de paiement aux conducteurs. Ouvrant une souplesse de trésorerie, la facturation aux transporteurs est quinzomadaire. Elle comprend un loyer pour la location du boîtier, des frais de gestion et le coût des péages empruntés sur la période déduit, automatiquement ou de façon différée, des remises accordées par les sociétés d’autoroutes. Cette facturation est hors taxes pour les fournisseurs de services de télépéage non français. Pour accéder à leurs services, les fournisseurs de télépéage procèdent à une analyse de solvabilité des transporteurs lors de la souscription à leurs services. Selon les résultats de cette analyse, le contrat peut être assorti d’une demande de garanties financières ou d’encours plafonnés. Les fournisseurs de télépéage qui proposent la récupération de TVA et droits d’accise comme sur les carburants, peuvent aussi utiliser les montants récupérés comme garantie.

E. D.

Stimuler l’interopérabilité en europe

Adoptée le 18 avril 2019 et à transposer avant le 19 octobre 2021, la nouvelle directive SET n° 2019/520 assouplit des cadres parfois rigides sinon protectionnistes en vigueur dans plusieurs États membres pour accéder à leurs réseaux à péage. Objectif affiché : accélérer l’interopérabilité en Europe. Pour davantage de transparence, elle assouplit les conditions d’accès et d’homologation des fournisseurs de systèmes de télépéage interopérables aux réseaux à péage, et harmonise les règles relatives à leur rémunération. Ces fournisseurs ne seront plus obligés de couvrir tous les réseaux à péage mais dans quatre États membres au minimum. Tout refus d’homologation par un État membre ou un percepteur de péage sur leur réseau devra être motivée avec précision et leur être notifié dans les meilleurs délais avec l’indication des voies de recours et de leurs délais. S’agissant de la rémunération des fournisseurs de systèmes de télépéage, elle devra être non discriminatoire et identique pour tous sur un réseau à péage donné. À l’attention de leurs clients dont les transporteurs routiers, la directive précise que toutes les remises et réductions de péage proposées par un État membre ou un percepteur de péage aux détenteurs d’équipements embarqués devront également être transparentes et disponibles dans les mêmes conditions. Le texte introduit enfin un système d’échange d’informations entre États membres. À partir de points de contact nationaux uniques et de l’application Eucaris (système d’information européen des véhicules et permis de conduire), ce système d’échange vise à faciliter la lutte contre la fraude.

E. D.

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