Des disparités qui nuisent fortement à la concurrence

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C’est une première ! Le Comité national routier (CNR) a dévoilé en mars dernier son panorama européen des prélèvements (taxes et redevances) spécifiques aux poids lourds. Avec un constat : des écarts manifestes entre les pays de l’UE.

Ce comparatif revient sur les principaux dispositifs en place en Europe, à savoir les péages et vignettes, les taxes directes sur les poids lourds et les droits d’accises appliqués au gazole. Et force est de constater qu’ils ne pèsent pas de la même façon sur le coût d’usage des infrastructures et impactent les rapports de compétitivité entre États et entre transporteurs.

Premier constat en matière de tarification routière : de fortes disparités existent à l’échelle européenne. Chaque État membre est en effet libre d’introduire ou non la tarification routière sur son territoire. Dans certains cas, la vignette est ainsi limitée à l’utilisation des autoroutes, alors que dans d’autres, elle est obligatoire sur l’ensemble du réseau routier public, comme en Estonie et au Royaume-Uni1. Ainsi, sur les 25 pays étudiés, 9 font le choix de la vignette (Estonie, Lettonie, Lituanie, Roumanie, Danemark, Luxembourg, Suède, Pays-Bas, Royaume-Uni). Les montants varient de 711 €/an en Lettonie à 1 250 €/an en Suède, Danemark, Pays-Bas et Luxembourg où l’Eurovignette est obligatoire pour circuler sur les routes et autoroutes.

Quinze autres pays ont, quant à eux, opté pour une taxe ou redevance au kilomètre (Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Croatie, Espagne France, Hongrie, Irlande, Italie, Pologne, Portugal, République tchèque, Slovaquie, Slovénie). Là aussi, le rapport du CNR fait état d’une forte variation dans les montants relevés. Les tarifs des péages débutent à 0,04 €/km pour les routes nationales et à 0,06 €/km pour les autoroutes en Pologne ou 0,11 €/km en Bulgarie, pour atteindre 0,23 €/km en France ou encore 0,42 €/km en Slovénie. La moyenne des 15 pays se situe autour de 0,20 €/km. À noter, une particularité : celle de la Finlande, dotée d’un réseau routier de 113 308 km, qui a, quant à elle, opté pour la gratuité.

Taxes directes sur les PL

Autre dispositif passé au crible dans ce comparatif européen : les taxes directes sur les poids lourds (ensembles en Euro 6,40 tonnes comptant cinq essieux avec suspensions pneumatiques). Et force est de constater qu’elles font, elles aussi, l’objet de disparités importantes entre les 24 États membres (hors Slovénie). Elles passent ainsi du minimum légal européen (515 €/an) appliqué en Belgique, en France, en Lettonie ou encore en Estonie à 2 088 €/an au Royaume-Uni.

Il apparaît que la majorité des pays d’Europe de l’Est appliquent des taxes élevées. C’est le cas de la Bulgarie (1 884 €/an), de la Pologne (1 348 €/an), de la République tchèque (1 776 €/an), de la Suède (1 943 €/an) ou encore de la Slovaquie (1 684 €/an).

À ce constat, le Conseil national routier fournit une explication : « Il peut s’agir, pour certains de ces pays, de leur principale source de financement des infrastructures routières », alors que « les redevances au kilomètre sur autoroutes y sont relativement faibles (0,11 €/km en Bulgarie ou encore 0,06 €/km en Pologne) ».

La fixation des montants diffère aussi entre les pays. Ainsi, en Bulgarie, en Pologne ou encore en Italie, les taxes directes sur les poids lourds sont décidées au niveau local et peuvent varier selon les régions. Dans d’autres pays, comme la France, elles sont uniformes sur l’ensemble du territoire national. Particularité en Slovénie : il n’existe pas de taxe directe sur les poids lourds, mais ces derniers ont l’obligation de circuler sur les autoroutes lorsqu’elles sont disponibles et donc de payer la redevance au kilomètre.

Les transporteurs portugais peuvent, quant à eux, demander le statut « veiculo longo » permettant de payer seulement la moitié de la taxe, soit 273 € par véhicule et par an.

Droits d’accises sur le gazole

Concernant les droits d’accises sur le gazole, les stratégies des 27 États européens sont également très diverses, malgré la mise en place, dès 1992, d’un taux minimal de taxation applicable au gazole. Ce qui constitue « une importante source de distorsions de concurrence dans le secteur du transport routier », note le CNR.

Pour rappel, dans un souci d’harmonisation, la « directive énergie » a fixé le principe d’un taux minimal de taxation applicable pour tous aux carburants, à 33 €/hl depuis le 1er janvier 2010. Sauf qu’il y a des exceptions. Actuellement, neuf États européens ont mis en place une fiscalité différenciée pour le gazole à « usage commercial », sur le fondement de l’article 7.2 de la directive 2003/96/CE.

Il s’agit de la Belgique, de la Croatie, de l’Espagne, de la France, de la Hongrie, de l’Italie, du Portugal, de la Roumanie et de la Slovénie. En résulte « une très forte amplitude ». Au 15 novembre 2022, les droits d’accises sur le gazole à « usage commercial » varient ainsi de 16,30 €/hl au Portugal à 59,48 €/hl en Finlande.

Dans ce rapport, nous pouvons également remarquer que certains pays (Croatie, Espagne, Malte, Slovénie) appliquent leurs droits d’accises sur le gazole à hauteur du minimum européen, à savoir 33 €/hl, voire inférieur comme la Pologne (24,12 €/hl), la Hongrie (22,93 €/hl), la Suède (22,56 €/hl) et le Portugal (16,30 €/hl).

Les droits d’accises sur le gazole sont donc un levier permettant aux transporteurs de se démarquer de leurs concurrents européens.

(1) Au Royaume-Uni, la taxe sur les poids lourds est suspendue jusqu’au 31 juillet 2023 en raison du coronavirus.

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