Des transports automatisés. Voire sans conducteurs. Ce qui relevait jusqu’alors d’un futur hypothétique a commencé à se concrétiser au mois de juillet. Ainsi, pour Dieter Zetsche, président du conseil d'administration du groupe Daimler, "l’intelligence artificielle est la clé de voûte qui guidera tous les pans de ces activités à commencer par la conduite autonome". C’est ce qu’il a déclaré lors d’une tech-conférence à Hong Kong le 10 juillet dernier. Le choix asiatique n’a rien d’anodin. Le groupe allemand, conscient qu’il n’arrivera pas seul à ses fins, multiplie les partenariats.
Début juillet, Daimler a indiqué avoir obtenu l'autorisation de tester des véhicules autonomes de niveau 4 sur les routes de Pékin (pas d’intervention du conducteur sur certaines portions). L’occasion idéale de tester ces véhicules dans une ville au trafic urbain complexe et de séduire le marché chinois. Afin d'obtenir cette licence et d'adapter ses véhicules autonomes au marché chinois, Daimler a renforcé ses liens avec Baidu, le Google chinois. Des technologies de la plate-forme Apollo, dédiée aux véhicules autonomes de Baidu, ont été ajoutées aux véhicules de Daimler testés à Pékin.
Pour assurer le développement de l’intelligence artificielle qui décidera à la place du conducteur, Daimler, en association avec son partenaire Bosch, annonce avoir choisi la plate-forme Pegasus développée par Nvidia. Selon l’entreprise américaine, Pegasus est capable de conduire avec une autonomie de niveau 5, grâce à une vitesse de calcul de 320 teraflops par seconde (10 puissance 12 opérations par seconde). Une puissance de feu nécessaire pour traiter une myriade d'informations en provenance de capteurs différents, que ce soit des radars, caméras, Lidar ou capteurs ultrasoniques.
Un petit grumier autonome et électrique en 2020
La montée en puissance du camion autonome et électrique permet l’émergence de nouveaux acteurs. Les États-Unis ont Tesla et Nikola (entre autres), l’Europe a Einride. Cette start-up suédoise vient de présenter un petit camion 100 % électrique et autonome, exclusivement dédié au transport de bois. Le "T-Log" ne comporte aucune cabine et sera doté d’un niveau de conduite autonome de niveau 4 (conçu par Nvidia), lui permettant de se déplacer dans une zone définie sans aucune assistance humaine. Ses concepteurs affirment qu’il a été spécialement conçu pour se déplacer dans l’environnement hostile d’une zone forestière et peut, si le besoin s’en fait sentir, être piloté à distance.
Ce mini-grumier, d’un poids de 16 t et d’une longueur de 7 m environ (largeur 2,5 m) ne peut transporter que 16 t, ce qui est loin d’être la norme en ce domaine. Il devrait être opérationnel en 2020. Einride indique que son engin est doté d’une batterie de 300 kWh, capable d’assurer une autonomie de 200 km pour une charge complète. En avril dernier, la start-up avait indiqué avoir signé un partenariat avec DB Schenker pour tester du transport de fret pour le compte du distributeur Lidl. Il s’agit d’une version general cargo de son camion autonome appelé "T-Pod". Ce dernier peut transporter 15 palettes (20 t de charge) sur 200 km, avec une batterie de 200 kWh. Les premiers essais sont programmés à l’automne 2018, avant un déploiement à grande échelle en 2020 où 120 navettes devraient circuler entre Göteborg et Helsingborg (distantes de 215 km).
Bientôt des essais transfrontaliers
Mais il serait illusoire de tester des camions autonomes qui resteraient bloqués à l’intérieur des frontières de chaque pays, faute d’un protocole de données communes. Tout comme les tests de platooning entre plusieurs pays européens, l’université technique et économique de la Sarre prévoit de réaliser des essais de véhicules autonomes transfrontaliers (avec probablement des voitures dans un premier temps). Ces expérimentations devraient avoir lieu sur une zone de test s’étendant de Sarrebruck à Metz, en passant par le sud du Luxembourg, rapportent nos confrères allemands d’AutomobilWoche. "Nous devons apprendre à parler le même langage en termes de technologie des transports", a déclaré le directeur du groupe de recherche de l’université, Horst Wieker.
Des connexions internationales
De ce fait, les différentes infrastructures des trois pays devront être interconnectées, afin qu’une plateforme informatique commune puisse permettre la circulation de véhicules autonomes dans les trois pays. À titre d’exemple, les feux tricolores ne fonctionnent pas nécessairement de la même façon dans chacun de ces pays (avec une étape optionnelle au feu orange, non seulement entre le feu vert et le feu rouge, mais aussi entre le feu rouge et le feu vert). De plus, selon les pays, les véhicules doivent marquer l’arrêt à un feu avant la ligne blanche ou sur la ligne.
Outre ces différences en termes de code de la route, les réseaux mobiles doivent aussi être interconnectés pour qu’un véhicule autonome continue à recevoir et transmettre des données, lorsqu’il passera du réseau de communication d’un pays à celui du pays voisin. La France, l’Allemagne et le Luxembourg s’étaient décidés à réaliser des tests transfrontaliers de véhicules autonomes dès septembre 2017.