Frédéric Visnovsky : Si on fait le panorama 2022-2024, l’évolution est contrastée. En 2022, les entreprises ont bien résisté : croissance de chiffre d’affaires, taux de marges maintenus, endettement réduit grâce au renforcement des résultats. C’est la conséquence de la reprise post-Covid et du soutien apporté par l’État. En 2023, il y a une croissance d’activité, mais à des niveaux beaucoup plus faibles. Alors qu’on était sur une évolution de CA de plus de 10 % en 2022, on devrait tourner autour de 2 à 3 % en 2023. Concernant les défaillances, elles sont en augmentation dans les TPE, mais surtout dans les entreprises de taille un peu plus importante, avec un impact sur 200 000 emplois, contre 120 000 à 130 000 au cours des années précédentes. Cela ne veut pas dire que les emplois sont supprimés, mais que les entreprises sont en procédure. Un autre point significatif concerne les retards de paiement : 11,7 jours fin 2022 contre 12,6 fin 2023. L’aspect positif, c’est que plus de 50 % des entreprises paient dans les délais – ce chiffre n’a jamais été aussi élevé – mais on a une dégradation des entreprises qui paient avec plus de 30 jours de retard. Les retards des grandes entreprises occasionnent à peu près un manque de trésorerie de 12 Mds pour les plus petites. Et on constate aussi un retard de paiement en augmentation chez ces dernières. Enfin, on voit apparaître, dans les différents baromètres, des tensions plus fortes sur les trésoreries, même si l’accès aux financements reste aisé. L’année 2024 s’annonce plus compliquée avec une croissance faible qui affecte les chiffre d’affaires. Ces derniers sont annoncés en baisse par les fédérations dans le transport. Les prévisions indiquent une baisse de l’investissement sur 2024, mais aussi, point positif, une baisse de l’inflation.
F. V. : Le remboursement se poursuit dans les conditions normales en matière d’échéance. Fin février, nous étions à 56 % de remboursement. Certaines entreprises remboursent normalement, d’autres se restreignent en limitant leur activité, ce qui va peser sur la croissance économique. 60 % des PGE des grandes entreprises ont été remboursés, 53 % dans les TPE. 45 % des PGE ont été remboursés dans le secteur du transport (routier, aérien…) et il n’y a pas d’alerte particulière sur ce secteur. En taille, les entreprises qui ont sollicité le PGE sont essentiellement des TPE et PME. Sur 800 000 PGE distribués (pour un total de 145 Mds €), 600 000 l’ont été à des TPE (39 Mds €) et 164 000 à des PME (68 Mds €).
F. V. : En 2023, nous avons traité 1 400 dossiers sur l’année et le rythme s’annonce similaire pour ces premiers mois de 2024. C’est la traduction d’une baisse des demandes de crédits par des entreprises et de taux d’obtention élevés. La médiation est saisie surtout par des TPE (à 85 %) et elle aboutit dans 60 % des cas, cela prouve son efficacité ! Pour nous saisir, on peut le faire directement sur le site de la médiation, en rentrant les coordonnées de l’entreprise et les éléments financiers. Puis le dossier est dirigé vers la succursale de la Banque de France dont dépend le siège social de l’entreprise. Le médiateur examine le dossier dans les 48 heures et, s’il est éligible, il en informe la banque. La médiation s’engage pour rapprocher le point de vue de l’entreprise et celui de la banque, afin de comprendre le refus, et la banque a cinq jours pour revoir sa position. Nous sommes saisis à environ 20 % pour des refus de crédit, 20 % pour des dénonciations de crédit existant, 20 % pour des restructurations de dettes et 30 % environ pour des restructurations de PGE.