Christophe Martin, directeur général de Renault Trucks France, est venu lui-même, le 8 septembre, à l’agence Mazet de Lyon-Saint-Fons, pour remettre à Thierry Mazet, président du groupe de messagerie, les clés de véhicules neufs. Il faut dire que la commande de ce groupe, qui est le plus ancien client transporteur de la marque au losange, n’a rien d’anodin. Elle porte sur 40 camions roulant au colza : 20 Renault Trucks T 480 ch et 20 Renault Trucks D Wide 4x2 240 ch. Par l’intermédiaire de Trucks Solutions, son distributeur de Valence (Drôme), le constructeur a signé, là, la plus importante commande de ces modèles équipés pour fonctionner au B100, le carburant fourni (au même prix que le diesel) par le groupe Avril.
L’investissement se monte à 3,5 M€, que Mazet finance par crédits à moyen terme. Comme pour tous ses clients, Avril, de son côté, prend en charge la création des cuves (coût : 20 K€ chacune), hors génie civil. Les agences Mazet de Lyon, Paris et Lille sont d’ores et déjà équipées, et celles de Toulouse, Montélimar et Oyonnax doivent suivre.
Pour ce groupe de TRM qui a signé la charte Objectif CO2 dès 2015, la démarche se veut écologique : selon le groupe Avril, le B100 réduit de 60 % les rejets de CO2 (« du puits à la roue ») par rapport au diesel. « Nous avions essayé l’électrique, avec le Renault 19 t, explique Thierry Mazet. C’est fabuleux à la conduite, mais quand on voit le coût et le peu d’autonomie, ça calme ! » Après avoir testé le gaz, le dirigeant juge celui-ci aussi trop coûteux, mais aussi source de risques. Restait donc le colza, de préférence 100 % français : « C’est notre ADN, assure cet Ardéchois, puisque nous sommes un groupe de messagerie français, familial, indépendant. »
Derrière, l’enjeu est économique : le gain sur les émissions permet à ces véhicules d’être classés Crit’Air 2 « et, nous l’espérons, bientôt Crit’Air 1 », lance Loeizig Sevellec, directeur commercial France de Renault Trucks. Ils peuvent donc entrer dans les zones à faibles émissions (ZFE) instaurées dans plusieurs villes françaises. « Ces camions sont 10 % plus chers et consomment 1,5 l/100 km de plus que les autres, admet Thierry Mazet, mais nous pensons récupérer des clients que nous avions perdus parce que nous n’avions pas opté pour le gaz. Certains nous ont d’ailleurs déjà recontactés. »
D’ici à la fin 2020, le transporteur établira un bilan, tant en matière d’augmentation du chiffre d’affaires (180 M€ actuellement) que de niveaux de consommation et de coûts d’entretien (réalisé en interne). « Aujourd’hui, le colza encrasse un peu plus les filtres que le diesel, précise Loeizig Sevellec, ce qui réduit d’environ 30 % les intervalles entre deux vidanges. » L’adhésion des conducteurs, elle, semble acquise : « J’ai effectué un trajet d’Aubenas à Saint-Fons et je peux dire que cela ne change rien par rapport à la conduite, assure l’un d’eux, parmi les plus expérimentés du groupe. Au contraire, si cela peut permettre d’être moins polluant, c’est mieux. »
Si l’ensemble de ses critères d’évaluation se révèle satisfaisant, le groupe Mazet passera l’ensemble de sa flotte (850 moteurs) au colza et équipera toutes ses agences de cuves ad hoc. Ce « verdissement » intervient dans un contexte de « rajeunissement » : toute la communication a été revue (cabines blanches et remorques vertes, slogan en anglais, etc.). Pierre-Louis Mazet (fils de Thierry, quatrième génération) s’apprête à prendre la direction générale et un plan de développement est lancé.
