« Le verdissement de la flotte fluviale devient un enjeu important. Les clients demandent des informations sur les émissions polluantes de nos activités de production et distribution de granulats et de dépollution des sols. Le transport fluvial a encore un avantage sur le transport routier. Concernant les obligations de réduction des émissions en 2030 puis en 2050, il n’est pas facile de dire aujourd’hui quelle est la solution à privilégier car elle varie selon les types de bateau et de trajet. Il faut non seulement penser à la propulsion à bord mais aussi aux installations nécessaires à terre. Il ne faut pas oublier non plus que les coûts de la transition énergétique sont élevés pour les entreprises », a indiqué Patrick Degryse, président du groupe De Cloedt, lors d’une table-ronde organisée à l’occasion de la journée du transport fluvial et de l’intermodalité en Wallonie, le 7 décembre 2021.
Autre représentant des acteurs économiques à cette table-ronde ayant pour thème « verdissement et innovation : quels sont les enjeux pour le transport de marchandises en Wallonie ? », Samuel Saelens, expert aménagement du territoire et mobilité à l’Union wallonne des entreprises (UWE), a souligné « la nécessité d’une approche globale associant tous les modes et toutes les solutions pour parvenir à atteindre les échéances de réduction des émissions en 2030 puis en 2050. Derrière les préoccupations climatiques des activités des transports, il y a un tissu économique à faire fonctionner et à développer dans une trajectoire de croissance et de durabilité. Beaucoup de choses en matière de transition énergétique se font dans les entreprises mais avec des limites industrielles ou économiques qu’il ne faut pas négliger. Travailler avec toutes les parties prenantes est nécessaire pour avancer tous ensemble ».
A l’écoute des professionnels du secteur
Lors de la table-ronde, la parole a aussi été donnée aux acteurs publics. Pascal Lehance, conseiller climat du cabinet du ministre Philippe Henry, a relevé que « les problématiques sont différentes selon les modes. Pour le fluvial, la longue durée de vie des bateaux doit être prise en compte. Il faut travailler progressivement, accompagner la démarche. L’hydrogène apparaît actuellement comme le « Saint Graal » mais il ne règlera pas tout et il faudra qu’il soit « vert » et à un coût accessible. Les carburants de transition comme le GNL ou les biogaz constituent une solution à plus court terme. Il faut avancer sur la mise en place de schéma vertueux d’approvisionnement, aller vers des choix raisonnables sans être trop rapide. Nous privilégions une démarche construite avec le secteur ».
Pascal Lehance a ajouté que « le fluvial devait être mieux valorisé, aller au-delà de simples indicateurs et envisager des obligations pour conscientiser toute la chaine économique ».
Le mix des énergies et des propulsions apparaît comme la meilleure option pour le « verdissement » du fluvial, a dit Etienne Willame, directeur général du service public de Wallonie (SPW) Mobilité et Infrastructures : « Il y a et aura plusieurs solutions de motorisation. Il n’y a pas de carburant « miracle ». Il n’y a pas encore de chemin défini pour le transport fluvial. Actuellement, nous sommes dans la phase de transition avec des produits pétroliers toujours dominants, avec un potentiel du côté de l’électricité tandis que l’hydrogène et les différents gaz font partie des perspectives. Pour la puissance publique, il nous faut être à l’écoute et préparer l’avenir avec le secteur ».
Le responsable du SPW Mobilité et Infrastructures a aussi mentionné l’adaptation du cadre réglementaire aux innovations de la transition énergétique, le besoin d’accompagner financièrement les industriels, « des subsides pour la transformation de la flotte, des engins de manutention, pour favoriser le report modal ».
En conclusion de la table-ronde, pour Etienne Willame, « le fluvial est à la croisée de chemins, face à des développements, à des incertitudes mais montre aussi beaucoup d’enthousiasme. Les usages de la voie d’eau sont diversifiés, même sur le petit gabarit. Il y a des opportunités pour la desserte urbaine, toutes les marchandises peuvent être transportées. Le secteur se digitalise également au niveau de la gestion des ouvrages, par exemple. Il est important de procéder par projets-pilote ».
Parmi ceux-ci, les bateaux Watertruck+ ont été présentés par le président du groupe De Cloedt qui a abordé l’automatisation de la navigation « pour réduire les coûts de personnel, pour la rentabilité économique ». Le groupe De Cloedt travaille avec l’entreprise anversoise Seafar « pour un pilotage à distance en plusieurs étapes et aboutir à plus aucun équipage à bord ».