Chaque année, le rapport annuel que publie la Commission centrale pour la navigation du Rhin (CCNR) au mois d’octobre dresse un bilan complet de l’année précédente.
Il ressort du rapport publié en octobre 2023 que 2022 a été particulièrement difficile pour la navigation intérieure qui n’a pas été épargnée par les crises successives : les effets négatifs du conflit armé entre la Russie et l’Ukraine, les basses eaux, l’augmentation rapide des prix des produits et base, une demande de consommation ralentie, la hausses des coûts des énergies...
En conséquence, le transport fluvial en Europe (c’est-à-dire 27 pays de l’UE plus la Suisse, la Serbie et la Moldavie) a diminué de -5,5% pour atteindre 485,4 millions de tonnes en 2022 comparativement à 2021 ; la prestation suit la même tendance négative (-10,6% et 122 milliards de tkm). Un premier compte-rendu détaillé a été publié par NPI (voir cet article).
Moins de marchandises transportées à bord des bateaux signifie également une manutention fluviale en retrait dans les ports européens qu’ils soient intérieurs ou maritimes avec des situations toutefois contrastées.
La manutention fluviale dans les principaux ports maritimes européens
Rotterdam et Anvers-Bruges. « Les principaux ports maritimes européens, ceux de Rotterdam, Anvers-Bruges et Constanţa ont tous enregistré une diminution de leur volume de manutention fluviale : -4,1%, -7,5% et -2,9%, respectivement », relève le rapport.
- Rotterdam : 82763 bateaux de navigation intérieure y ont fait escale. Le volume de manutention fluviale a atteint 151,3 millions de tonnes (-4,1%). La manutention des cargaisons liquides (-5,4%) et conteneurisées (-11,2%) a diminué, celle des cargaisons sèches (+1,9%) a augmenté.
- Anvers-Bruges. La majeure partie de la manutention fluviale est assurée sur le site d'Anvers où en 2022 57961 bateaux (contre 60 819 en 2021) ont fait escale. La manutention fluviale a atteint un volume de 101,2 millions de tonnes en 2022 (-7,5 %). Le vrac liquide domine (56,1%), suivi par les conteneurs (22,6%) et le vrac sec (13,8%). La répartition modale de la navigation intérieure en 2022 est de 51,4%, sans changement par rapport à 2021. La part modale du transport fluvial de conteneurs à destination et en provenance de l’arrière-pays était de 35,1%.
Constanta. 10890 bateaux de navigation intérieure ont fait escale en 2022 (contre 10619 en 2021). « Le trafic fluvial a conservé un niveau similaire à celui qui était le sien en 2021, affichant 15,4 millions de tonnes. Depuis le début de la guerre en Ukraine, les volumes manutentionnés dans le port de Constanta ont atteint 11,85 millions de tonnes, dont 5,4 millions de tonnes relevant du trafic fluvial et 6,4 millions de tonnes du trafic maritime. Ils sont principalement attribués au transport de céréales », précise le rapport.
Pour le fluvial, « ce sont principalement des cargaisons sèches qui sont manutentionnées à Constanta, représentant plus de 85 % du volume total de marchandises en 2022. Mais elles sont en baisse de -10 % par rapport à 2021 tandis que les cargaisons liquides ont enregistré une augmentation de +59,3 % par rapport à 2021. Le transport de conteneurs a connu une année record, ayant été multiplié par 16 mais se situe à des niveaux faibles (202 000 tonnes) ».
North Sea Port et Hambourg. Deux ports maritimes européens affichent eux des progressions : « North Sea Port et Hambourg ont tous deux enregistré une nette croissance (+7%), principalement due à une augmentation du transport de produits pétroliers ».
- North Sea Port (Gand, Terneuzen, Vlissingen), 40 645 bateaux denavigation intérieure ont fait escale en 2022, contre 40 912 en 2021. « La manutention fluviale à North Sea Port a connu une année record pour la deuxième fois consécutive avec un volume de 64,6 millions de tonnes (+8% par rapport à 2021). En ce qui concerne la répartition modale des flux reliant l'arrière-pays, la navigation intérieure arrive en tête avec une part de 58%, suivie par la route (30%), le rail (10%) ».
- Hambourg : la manutention fluviale a atteint 7,47 millions de tonnes (+7,2 %). En 2022, l'ensemble des flux de transport reliant l'arrière-pays a représenté 88 millions de tonnes (contre 92 millions de tonnes en 2021). Avec une part de 53,9% (+1%), le ferroviaire devance la route (37,6%, en repli de -2,1%) et le transport fluvial (8,5%, +0,9%).
La manutention fluviale dans les ports intérieurs rhénans, français et belges
Le rapport de la CCNR passe en revue les niveaux de la manutention fluviale dans les différents ports intérieurs européens, en commençant par ceux le long du Rhin, principal fleuve du continent pour la navigation intérieure.
L’exception ukrainienne. Le rapport souligne d’abord l’exception de deux sites portuaires ukrainiens (Reni avec +398,2%) et Ismail avec +118,4%) sur le Danube. « Ils ont bénéficié de l'initiative des corridors de solidarité UE-Ukraine, mise en place pour assurer la continuité des échanges commerciaux et l'exportation de produits agricoles en provenance d'Ukraine ».
Ports rhénans. La manutention fluviale est en recul à Duisbourg (41,9 millions de tonnes, -6,8%) et à Cologne (8,2 Mt, -16,7%) mais en progression à Mannheim (7,6Mt, +3,4%) et à Karlsrhuhe (6,8 Mt, +6,2%).
Strasbourg, port intérieur français sur le Rhin, arrive en cinquième position avec 6,4 Mt (-8,9%), Mulhouse est neuvième avec 3,6 Mt (-11,6%) derrière Bâle (4,6 Mt, -14,9%).
Au total, dans 15 ports rhénans, la manutention fluviale représente 106,5 Mt en 2022, en diminution de -8,7% comparativement à 2021.
Ports français et belges. Le rapport de la CCNR liste dans un même tableau la manutention fluviale dans les ports français et belges.
Anvers arrive forcément en tête du classement (101,2 Mt, -7,5%) suivi de Paris (20,6 Mt, -8,5%) puis de Liège (14,5Mt, -2,5%).
La Louvière (6,8Mt, +6,1%) est quatrième suivi de Strasbourg (6,4 Mt, -8,9%) de nouveau en cinquième position comme dans le classement des ports rhénans. Bruxelles suit (5,1 Mt, -7%) puis Rouen (4,9 Mt, -9,6%) et Namur (4,3 Mt, -1,2%).
Les 8 ports suivants sont tous français : Mulhouse (3,6 Mt -11,6%), Le Havre (3,2Mt, +6,3%), Marseille (2,1 Mt, +4,5%), Lille (2,4 Mt, +3,3%), Dunkerque (2,1 Mt, -20,6%), Metz (1,8 Mt, +1,1%), Lyon (1,2 Mt, -0,3%), Villefranche-sur-Saône (700000 tonnes, +3%).
Au total, dans 16 ports belges et français, la manutention fluviale représente 180,8 Mt en 2022, en diminution de -6,4% comparativement à 2021.