Trois projets de bateaux à hydrogène pour CFT

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La Compagnie fluviale de transport (CFT, groupe Sogestran) abandonne son projet de pousseur à hydrogène sur le Rhône. À la place, la société présente trois projets d’automoteurs sur pile à combustible : un automoteur Zulu de distribution urbaine pour Paris, et deux porte-conteneurs pour le Rhône.Le projet de pousseur à hydrogène pour le bassin du Rhône a été abandonné par la Compagnie fluviale de transport (CFT, groupe Sogestran). Pourtant, l’armateur fluvial ne renonce pas à ses ambitions en matière de bateau électrique fonctionnant sur pile à hydrogène. Au contraire : ce sont désormais deux projets portant sur un total de trois bateaux qui sont menés de front par la CFT.Le pousseur qui devait naviguer sur le Rhône ne verra pas le jour. Il devait être construit dans le cadre du projet Flagships, financé par l’Union européenne au titre du programme Horizon 2020, auquel participe aussi l’armateur norvégien Norled pour la construction d’un navire à passagers, ainsi que sept partenaires techniques. Le groupe Sogestran espère, cependant, rester dans le projet Flagships. Il propose, pour cela, la construction d’un autre bateau : un automoteur de distribution urbaine. L’armateur, avec sa filiale Blue Line Logistics, a en effet développé une flotte de bateaux de 50 mètres, les Zulu, où la marchandise est chargée en pontée (voir encadré). Quatre Zulu sont déjà en activité. Le cinquième, en cours de construction, est de type diesel-électrique. Le sixième pourrait être construit dans le cadre du projet Flagships, fonctionner à l’hydrogène et naviguer sur le bassin de la Seine, en particulier à Paris. La réponse de principe des partenaires de Flagships, notamment sur le maintien des financements européens, est attendue pour début novembre 2020.Le groupe Sogestran pourrait donc exploiter un bateau à hydrogène sur la Seine. Mais le bassin du Rhône, où la Compagnie nationale du Rhône (CNR) développe un programme de production d’hydrogène vert, obtenu à partir d’énergie hydroélectrique, n’est pas oublié pour autant. La CFT a, en effet, présenté à la région Auvergne-Rhône-Alpes son nouveau projet : la construction de deux automoteurs de 200 EVP, pour le transport de conteneurs entre Lyon et Marseille-Fos.

Des conditions économiques à remplir

L’abandon du projet de pousseur tient à la fois à des raisons techniques et économiques. « L’activité conteneurs sur le Rhône a perdu 40 % depuis le début de l’année 2020. Le passage à l’automoteur, plutôt que le recours à la barge poussée, nous permet de gagner 6 heures dans chaque sens sur le temps de navigation entre Fos et Lyon. Source d’économie, puisque les coûts de main-d’œuvre ne cessent d’augmenter, alors que le coût du carburant diminue. Nous demandons à la région Auvergne-Rhône-Alpes de nous soutenir pour ces automoteurs dans le cadre de Promovan H2. Les élus ont accueilli très favorablement ce que nous avons présenté. Mais nous voulons aussi obtenir un accord de place au port de Marseille. Nous avons un alignement de planètes parfait pour transporter les conteneurs dans les meilleures conditions économiques, techniques et environnementales, mais pour cela tout le monde doit s’impliquer : manutentionnaires, armateurs maritimes, chargeurs, ports, VNF, CNR et l’État », affirme Matthieu Blanc, le directeur métier fluvial du groupe Sogestran.

Au niveau économique, Sogestran demande la fin des surcharges portuaires pour les conteneurs fluviaux. « Les armateurs doivent être prêts à payer un peu plus pour les camions, et les manutentionnaires doivent s’organiser pour que le passage portuaire coûte le moins cher possible. Ou alors l’État, qui a fait un raté lors de la réforme portuaire, doit prendre ses responsabilités », souligne Matthieu Blanc. Pour l’aspect exploitation, la CFT demande qu’un système de rendez-vous soit mis en place pour le chargement et le déchargement, afin d’augmenter la rentabilité du bateau en évitant qu’il reste à quai sans rien faire en attendant d’être traité. Sa fabrication présente en effet un surcoût de près de 50 % par rapport à un automoteur classique.

Le passage d’un projet de pousseur à hydrogène à un projet d’automoteur a aussi des raisons techniques et réglementaires, liées à la difficulté de stocker en salle des machines une pile à combustible et une réserve d’hydrogène. La CFT s’oriente donc, pour le Zulu comme pour les deux porte-conteneurs, vers des bateaux diesel-électrique dont les générateurs électriques seront installés sur le pont.

Des packs d’énergie interchangeables

« Réglementairement, on est obligés d’en passer par là, car il est quasi impossible de faire un bateau à carburant alternatif sans obtenir de dérogation. La transition énergétique va donc passer par des bateaux diesel-électrique, conçus dès leur construction pour que les packs d’énergie soient interchangeables pour évoluer vers des batteries, du biogaz ou de l’hydrogène », indique Matthieu Blanc. Ce schéma permettrait d’obtenir les autorisations administratives classiques, puis de faire évoluer le bateau sur dérogation en remplaçant un à un les générateurs d’électricité. Quitte à conserver un groupe diesel, par sécurité.

La mise en service des porte-conteneurs pourrait intervenir dès le début de l’année 2023, ces bateaux profitant des études techniques sur l’hydrogène qui ont été menées pour le précédent projet de pousseur. Cela correspond à la mise en route de la deuxième station d’hydrogène vert de la CNR sur le Rhône, à Pierre-Bénite, après celle dans le port de Lyon-Edouard Herriot qui doit entrer en service d’ici la fin 2020.

Dans un premier temps, seule la descente du Rhône se ferait en zéro émission, le surplus d’énergie nécessaire à la remonte nécessitant davantage de puissance électrique. Quant au Zulu qui serait construit pour le bassin de la Seine dans le cadre du projet Flagships, il pourrait naviguer à l’hydrogène dès la fin 2021 ou début 2022.

Le Zulu 03, lors d’une démonstration à Paris en février 2020.

Les caractéristiques des Zulu

Blue Line Logistics a procédé, en février 2020 à Paris, à une démonstration de l’utilisation de ses pontons automoteurs Zulu, destinés aux opérations de logistique fluviale urbaine. Un Zulu avait été présenté aux Ports de Lille en janvier 2019.

Palettes, big bags, petites caisses mobiles, le Zulu 03, amarré au port des Champs-Élysées, peut embarquer toute sortes de marchandises, à l’exception, bien sûr, des vracs puisque la cale est réservée à la motorisation et au ballastage.

Toute la marchandise prend donc place sur le pont, séparé en deux dans sa longueur par le rail sur lequel circule une grue d’une capacité de 9 tonnes à 3 mètres et de 2 tonnes à 12 mètres. Au total, le pont du Zulu, d’une superficie utile de 210 m2, peut embarquer 198 palettes. Et encore davantage s’il est possible de les gerber.

Dédié à la logistique urbaine, le Zulu 03, comme les autres bateaux de la série, est auto-déchargeant et ballastable, pour s’adapter à tous les quais. Sa longueur limitée à 50 mètres lui permet d’accéder à un grand nombre de quais dans Paris pour y décharger ses marchandises. Sa largeur est de 6,6 mètres.

En Belgique, les Zulu transportent principalement des matériaux de construction palettisés ou en big bag, mais aussi de la bière ou encore du papier à recycler. Des transports de colis exceptionnels sont réalisés dans l’estuaire de l’Escaut.

Les matériaux de construction constituent un des marchés visés à Paris par l’armement fluvial havrais Sogestran, actionnaire majoritaire de Blue Line Logistics, qui s’intéresse aussi de près à d’autres secteurs de la logistique urbaine : déchets valorisables palettisés ou en balles, grande distribution et e-commerce.

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