Le fluvial permet de transporter tous les types de marchandises hors gabarit et de masse indivisible, sans démarche administrative, sans autorisation spécifique préalable du gestionnaire d’infrastructure. En 2018, le transport fluvial de colis lourds a représenté 708 000 tonnes de marchandises transportées et 183 millions de tonnes kilomètres, pour environ 700 voyages. Ces colis, appelés exceptionnels ou lourds ou hors normes, ou encore XXL, sont variés : pales d’éoliennes, rotors, stators, tourets de câbles, cuves, éléments de ponts, de passerelles, tunneliers, éléments de grue, d’Airbus, de centrales électriques, engins militaires, etc.
Les atouts du fluvial pour le transport de ces colis sont notamment le réseau, une cale adaptée, c’est-à-dire, dans la grande majorité des cas, pas besoin de chercher une cale spécifique, pas de surcoût pour la traction fluviale. Ces colis exigent des équipements de manutention adaptés, soit verticale avec une capacité de levage entre 25 et 1 000 tonnes, qui peuvent-être des grues ou bigues fixes, mobiles ou flottantes, des portiques de manutention, des bateaux équipés de grues. La manutention horizontale correspond à la technique roulière, avec des rampes roll-on/roll off (Ro-Ro). Les quais doivent être capables de résister à des poids très élevés.
Sur les différents bassins en France, il y a des trafics existants de colis lourds et du potentiel à développer. Dans les Hauts-de-France, il y a un trafic important entre la France et les pays du Benelux, dans les deux sens. « Nous travaillons régulièrement à développer cette activité, explique Eric Dumortier, chef du service Prospection Filières de la DT Nord-Pas-de-Calais de VNF. Les résultats se voient, par exemple, au port de Valenciennes. Il y a des innovations comme la barge Fortitudo en 2018. Elle a montré qu’il existait un potentiel de report modal sur la voie d’eau d’environ 10 % des 400 colis exceptionnels Transmanche arrivant à Calais. L’actualité pour nous, c’est un projet de l’industriel Jeumont Electric, installé au bord de la Sambre et qui finalise la rénovation de son quai, avec un premier transport prévu à la fin du premier trimestre 2020 et d’autres opérations devraient suivre ».
« On attend Seine-Nord »
La société Sitca, basée à Valenciennes et filiale du groupe Cochez, est spécialisée dans le transport exceptionnel, la manutention et le levage depuis 2014 et réalise environ une dizaine de voyages multimodaux par an. « Nous utilisons l’Escaut à partir de Valenciennes. Nous avons fait exprès de nous implanter près de l’Escaut », explique Jérémie Cochez, directeur de la société. Celle-ci dispose de ses propres engins de levage, est commissionnaire de transport, gère seule les colis jusqu’à 80 tonnes, « au-delà, on fait appel à des partenaires ». Pour les barges, Sitca travaille avec Lallemand basé à Zeebrugge et Eurobarging à Lille.
Selon Jérémie Cochez : « Notre rôle consiste de plus en plus à aller chercher les colis dans les ports maritimes belges et à les amener à leur destination finale, le plus souvent par la route. On fait par la voie d’eau quand les dimensions, le gabarit, le poids rendent la solution routière impossible. Il faut savoir que le manque d’entretien des ouvrages sur les routes nationales, suite à la rétrocession de l’Etat aux régions, réduit les trajets routiers possibles. Sur de nombreuses routes, 200 à 250 t, ce n’est plus possible, voire même 120 t. Sur certaines, des ouvrages sont limités à 100 t ou même 44 t ».
Pour le directeur, « La voie d’eau, c’est bien à condition d’avoir du grand gabarit à proximité, c’est pour ça que dans les Hauts-de-France, on attend Seine-Nord avec impatience. Il faut aussi avoir des quais adaptés comme ceux de Valenciennes mais parfois, pour certains colis, nous devons aller à Tournai en Belgique ».