Euro-Silo, plaque tournante du trafic céréalier en Belgique

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Avec sa très forte capacité de stockage, Euro-Silo occupe une place à part sur le marché du transbordement de céréales dans la rangée Le Havre/Hambourg. Le manutentionnaire gantois opère selon un modèle économique qui diffère de celui pratiqué par des ports français comme Rouen.

En termes de capacité de stockage, Euro-Silo est le plus grand terminal céréalier en Europe de l’Ouest. Nous pouvons stocker jusqu’à 650 000 tonnes dans nos silos. C’est ce qui nous distingue des autres opérateurs et de ports comme Rotterdam, où le transbordement direct de navire en allège est la règle », souligne d’emblée Frank Peeters, le directeur général de l’entreprise.

Euro-Silo est actif à Gand, dans la partie flamande de North Sea Port, sur deux grands sites, l’un au Sifferdok, l’autre au Rodenhuizedok. Ensemble, ils traitent un trafic à l’entrée de 4 à 4,5 millions de tonnes de céréales, de graines oléagineuses et de dérivés par an, ce qui fait de Gand le principal port belge pour ce type de marchandises. La majeure partie de ces volumes -colza, maïs, soja, graines de lin, etc.- arrive par la voie maritime, avec des provenances qui vont du Canada à l’Ukraine et du Brésil à la Russie en passant par l’Asie. Les vraquiers Panamax dominent dans ces flux. La navigation intérieure intervient pour quelque 500 000 tonnes. Il s’agit notamment de cargaisons acheminées depuis Rotterdam après leur déchargement dans le grand port néerlandais.

Axé sur l’import et rail en disparition

« Notre activité est presqu’exclusivement axée sur l’import. Notre clientèle se compose dans une large mesure de traders et de producteurs qui n’ont pas encore écoulé tous leurs volumes ou qui veulent garantir leur approvisionnement. Pour qui a besoin de stocker des céréales -mais notre modèle économique s’appuie sur une rotation rapide des volumes-, Gand est un hub idéalement situé pour desservir des marchés comme le Sud ou l’Ouest de la Belgique, le Nord de la France et une partie de l’Allemagne, explique Frank Peeters. Nous différons sur ce point des ports céréaliers français comme Rouen, qui servent surtout à l’exportation de céréales produites dans l’Hexagone et stockées, dans les régions où elles sont moissonnées, dans les silos de coopératives agricoles. Les terminaux français ne sont pas équipés pour le déchargement rapide de navires de mer ou pour le stockage à plus ou moins long terme. Les grains n’y font que passer ».

Le directeur général d’Euro-Silo poursuit : « De plus, leurs arrivages se font essentiellement par le rail, qui offre une solution parfaitement utilisable du fait de la grande régularité du trafic et du fait que ces opérations ont lieu dans un contexte purement national. Chez nous, même si nous disposons d’une infrastructure pleinement multimodale, le rail a quasiment entièrement disparu. Nous enregistrerons cette année un pic tout relatif d’une dizaine de trains. Il en allait autrement quand Euro-Silo traitait encore des céréales d’intervention dans le cadre de la politique agricole européenne et voyait notamment venir d’importantes quantités de froment français ».

A la sortie, la navigation intérieure se taille la part du lion (40 à 45 %) dans les expéditions depuis Euro-Silo qui laisse l’organisation de ces transports à ses clients. Le transport routier intervient pour environ un cinquième du total. Les 35 % restants représentent les livraisons de matières premières aux usines de Cargill et d’Alco Bio Fuel qui jouxtent le terminal au Rodenhuizedok. Ces transferts se font directement par bandes transporteuses d’une installation à l’autre.


Les coopératives agricoles ne sont pas absentes de la scène céréalière belge et certaines d’entre elles contrôlent des terminaux fluviaux pour le stockage et l’écoulement de leur production. C’est notamment le cas de la SCAM (société coopérative agricole de la Meuse), qui dispose d’une cinquantaine de dépôts en Wallonie et qui gère un trafic de 350 000 à 400 000 tonnes de céréales par an. Les Silos de Floreffe, « un des plus importants silos de stockage en Belgique », constituent une pièce maîtresse dans ce réseau. Implantée sur la Sambre, entre Namur et Charleroi, cette installation, qui alimente aussi une usine attenante, peut accueillir 100 000 tonnes de céréales. Cette capacité sert surtout au stockage à plus long terme. Les volumes à la sortie se montent à 130 000 tonnes, dont 70 000 tonnes repartent sur péniche (pour 80 % vers des destinations en Belgique, le solde allant vers les Pays-Bas). Par ailleurs, 25 000 tonnes de céréales sortent en fluvial du dépôt de Farciennes, où la capacité de stockage est nettement plus faible (4 000 t), mais la rotation des volumes beaucoup plus rapide. La SCAM n’a pas recours au rail.

De son côté, Walagri, filiale du puissant groupe Arvesta et « principal acteur sur le marché de l’agrofourniture et de la collecte des céréales en Wallonie », peut s’appuyer sur une soixantaine de dépôts, dont six sont situés le long des principales voies navigables wallonnes (Meuse, Sambre, Escaut). Il s’agit notamment des Silos de la Meuse à Liège, d’Escaut Silos à Tournai et du site des Etablissements Brichart à Farciennes.

C’est la présence d’acteurs de ce type qui contribue à faire des céréales un trafic non négligeable sur les voies navigables belges. En Flandre, il a représenté en 2018 un volume de 4,3 millions de tonnes, soit 6 % du total transporté par la voie d’eau. En Wallonie, les céréales, souvent en transit, sont le principal flux dans les 4,9 millions de tonnes de produits agricoles qui ont emprunté la voie navigable.

Importance du marché français

Une entreprise implantée à Gand ne saurait être indifférente au marché français. Frank Peeters se réjouit dès lors de la reconnaissance d’Euro-Silo comme point de livraison pour le maïs par la MATIF (marché à terme international de France), filiale d’Euronext. Gand est le premier port étranger à obtenir cette reconnaissance, qui vient s’ajouter à celles pour d’autres types de produits, pour un de ses acteurs.

« Nous opérons sur un marché très compétitif et, vu sa maturité, relativement stable, en dépit des fluctuations inévitables liées aux facteurs naturels qui peuvent avoir des répercussions sur la taille et la qualité des récoltes et, donc, sur les sources d’approvisionnement de nos clients. Mais la réglementation -traçabilité, OGM, etc.- se fait de plus en plus lourde à gérer et a une conséquence sur la manière dont nous pouvons utiliser notre capacité. Notre flexibilité opérationnelle s’en ressent parfois. De plus, même une graine de céréales a, aujourd’hui, une empreinte écologique dont il faut de plus en plus tenir compte et qui peut avoir un impact sur nos trafics. Les négociants et utilisateurs sont en première ligne, mais ce qui les affecte, nous concerne évidemment aussi », conclut le dirigeant d’Euro-Silo.

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