Les autorités ukrainiennes en avaient fait l’annonce à l'occasion de la mise en œuvre d’un corridor maritime alternatif pour compenser la perte, depuis la dénonciation de l’accord par la Russie, de la voie navigable permettant le transit de céréales en dépit du blocus maritime russe en mer Noire.
Pour donner toutes ces chances à cette route à haut risque de guerre, Kiev est prêt à assurer un niveau de risques, en partenariat avec des assureurs internationaux et une banque, avait annoncé le président ukrainien Volodymyr Zelensky à la fin de l’été.
Cette nouvelle route, qui longe les côtes roumaines et bulgares, États membres de l'OTAN, a déjà permis le transit de plusieurs vraquiers et d'un porte-conteneurs malgré l’escalade militaire entre les deux pays et les menaces répétées de Moscou de considérer tout navire s’aventurant en mer Noire comme bâtiment militaire.
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Suivi en temps réel des navires
Alors que les détails de l'offre de Marsh sont attendus, le courtier spécialisé en (ré)assurance Miller, dont le siège est à Londres, a annoncé le 26 septembre être en mesure d'offrir une couverture d'assurance complète contre les risques de guerre aux navires opérant dans la mer Noire au départ de Chornomorsk, Odessa et Pivdenny. Soit les trois ports déjà intégrés dans le précédent dispositif suspendu par la Russie.
Pour ce faire, l’assureur a recours à la technologie de Clearwater Dynamics (CWD) pour permettre un suivi en temps réel des navires (à la fois pendant le transit, dans le port et jusqu'à ce que les navires sortent de la zone à haut risque) associé à une surveillance de la salle des opérations 24h/24 et 7 j/7. « Les assureurs et les souscripteurs bénéficient ainsi d'un niveau de sécurité supplémentaire grâce à la surveillance en direct de tous les navires dans la zone et à la possibilité de contrôler leurs risques en temps réel », explique la société. Le communiqué ne mentionne pas les souscripteurs impliqués dans le mécanisme.
La solution sera soutenue par les Lloyd's et les assureurs du marché londonien notés A de façon à couvrir les polices dans leur intégralité.
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Une perte maritime estimée à 400 M$
« À ce stade, il semble que l'Ukraine sera contrainte d'exporter des céréales presque exclusivement via ses ports sur le Danube », expliquait le courtier dans son rapport d’activité à l’issue du premier semestre. Les contrats renouvelés à la fin de l'année 2022 a exclu l'agrégation de plusieurs navires dans le même événement de risque de guerre. Chaque navire est désormais considéré comme une perte distincte. Ce changement de formulation a déplacé l'exposition auparavant supportée par le marché de la réassurance vers le marché direct »
Avec une couverture de réassurance très réduite, les souscripteurs directs ont été contraints de réduire la taille moyenne de leurs lignes sur les risques qu'ils souscrivent, ce qui a entraîné une réduction de la capacité pour les risques de guerre, signifie le courtier.
La perte maritime liée à l'incursion en Ukraine est estimée à environ 400 M$. Un montant insignifiant par rapport à celui de l'aviation, où plus de 400 avions, d'une valeur de près de 10 Md$, sont restés bloqués en Russie alors que les preneurs à bail n'ont pas restitué leurs appareils.
Adeline Descamps
Des primes de guerre qui flambent
Pour rappel, la situation précaire dans la région a augmenté le profil de risque des opérations de transport maritime, ce qui a entraîné une augmentation des primes d'assurance contre les risques de guerre pour les navires opérant ou transitant en mer Noire. Les assureurs avaient reçu un demi-milliard de dollars de demandes d'indemnisation pour 60 navires marchandes bloqués en Ukraine un an après le début de la guerre avec la Russie (février 2022), selon des données de Reuters.
Conformément aux polices d'assurance maritime, les propriétaires de navires peuvent réclamer à leurs assureurs une perte totale pour les navires bloqués pendant un an, à condition qu'ils aient maintenu la couverture et la police en vigueur en payant les primes d'assurance, lesquelles sont montées en flèche en raison de la guerre. La mer Noire étant déjà considérée comme une zone à haut risque par le marché de l'assurance londonien, des primes d'assurance supplémentaires contre les risques de guerre, s'élevant à des dizaines de milliers de dollars par jour, sont désormais des coûts courants, au même titre que les soutes et le fret.