Depuis 2011, des produits à valeur ajoutée prennent déjà les voiles pour franchir les océans. TOWT, armateur de navires marchands à voile, s'équipe de quatre nouveaux cargos voiliers dont le premier, de 70 m de long, entrera en service l'année prochaine au départ du Havre.
Pour Guillaume Legrand, co-fondateur avec Diana Mesa Robayo de la société TOWT-Transport à la voile, les solutions actuelles pour décarboner le transport maritime ne sont pas à la hauteur des enjeux. « On se contente de réduire la vitesse des navires. Quant au GNL, ce n’est pas une solution miraculeuse, comme le souligne le dernier rapport de l’ICCT ( International Council on Clean Transportation). Le gaz reste fossile. Je ne jette pas la pierre aux armateurs mais l’empreinte carbone n’intervient pas dans leurs choix stratégiques. Quant aux objectifs de l’OMI sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2050, pourquoi pas 2100 ou 3000 ? »
Créée en 2011, TOWT défend l’idée des cargos à voile. Après avoir transporté en cabotage ces dernières années plus de 1000 t de produits, tels que du thé, café, vins et spiritueux, à bord de voiliers affrétés, la compagnie franchira en 2021 une étape supplémentaire en mettant à l’eau un cargo à voile de 70 m de long, le premier d’une série de quatre.
Marchandises et passagers
Cette flotte assurera quatre fois par an des services réguliers au départ du Havre à destination de New York et Québec en passant par Saint-Pierre-et-Miquelon, Vera Cruz au Mexique et Santa Marta en Colombie avec escale à Pointe-à-Pitre. Enfin, un service desservira Abidjan en Côte d’Ivoire trois fois dans l’année. Pour une traversée transatlantique, il faudra compter douze à quinze jours de navigation.
Ces voiliers cargos à la coque en acier navigueront sous pavillon français. Ils auront une capacité de transport de 1 000 t de marchandises chacun pour une vitesse moyenne de 11 nœuds. Ils offriront également douze places pour des passagers embarqués.
Le premier voilier devrait entrer en service en 2022 au Havre. En février dernier, un accord commercial a été signé entre TOWT et Haropa-Port du Havre dans le cadre d’une démarche ESI (Environnemental Shipping Index) qui donne droit à un tarif préférentiel sur les droits de port. Pour la construction des voiliers, TOWT a lancé un appel à manifestation d’intérêt. Sept chantiers, dont trois français, sont actuellement dans la course.
L'expérience de l'affrètement
Guillaume Le Grand confie que les projets de voiliers cargos à voile de 120 m de long sont beaucoup trop grands et donc trop coûteux à exploiter et à rentabiliser. Ils présentent également des « vulnérabilités techniques ». « Nous sommes réalistes dans ce que nous entreprenons. En matière de transport à voile, il faut prendre en compte les saisons pour naviguer, la manutention dans les ports, la logistique. Pour la manutention, on peut décharger 1000 t en cinq heures. Avoir quatre voiliers nous permet de faire des économies d’échelle. »
Dans sa démarche commerciale auprès des clients, TOWT met en avant le label de transport maritime décarboné Anemos, qui porte sur les produits transportés à la voile. Il indique un numéro de voyage, un tracking GPS ainsi que des informations comme la surface de voiles employées et un bilan carbone complet. « Ce label, développé depuis 2017, peut être apposé sur de nombreux produits. Il est différenciant en termes de marketing. Nos clients et plus largement les consommateurs sont aujourd’hui extrêmement sensibles à ce type de labellisation. »
Jacques Laurent