Ponant dévoile son 14e navire à zéro émission

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Le projet Swap2Zero de Ponant

Image 3D du projet Swap2Zero. Dans le cadre de l’appel d’offre, deux systèmes de propulsion vélique sont à l'étude, avec le Solid Sail (Chantiers de l'Atlantique) et avec les Oceanwings d'Ayro (photo)

Crédit photo ©Ponant
Promoteur du slow tourisme, le croisiériste français haut de gamme enclenche la vitesse supérieure en dévoilant un nouveau concept de paquebot assis sur une promesse : aucune émission directe, tant pour la propulsion que pour les services hôteliers. Ponant prend date pour 2030.

À la croisée entre avant-gardisme environnemental et innovation maritime, Ponant surenchérit dans la décarbonation avec une offre très ambitieuse. Inégalable dans son approche de la croisière, l’entreprise, propriété du fonds Artémis de François Pinault, a dévoilé son projet Swap2Zero (Sustainable, wind assisted propulsion, zero emission ready).

La compagnie promet de mettre à l’eau d'ici 2030 une nouvelle génération de paquebots bénéficiant d’une autonomie totale d'un mois, à zéro émission CO2 eq. (équivalent du « puits à la roue », émissions de CO2, méthane et protoxyde d'azote incluses), grâce à « six technologies de rupture ».

« Ponant est une compagnie de marins tournée vers l’exploration et l’innovation. Cette ambition pionnière inspire tout le programme Swap2Zero, indique Hervé Gastinel, le président de Ponant, cité dans un communiqué de presse. Notre équipe R&D a rassemblé les meilleurs spécialistes de la construction navale et des énergies renouvelables [notamment LMG Marin France, Barillec Marine, Helion Hydrogen Power, D-ICE Engineering, NDLR] pour mettre au point un modèle énergétique qui tend vers le "zéro émission" de gaz à effet de serre en navigation, en manœuvre, au port et au mouillage. Aux énergies renouvelables fournies par le vent et le soleil seront associées des énergies décarbonées et non fossiles associées à des piles à combustibles ».

Appel d'offres lancé

Pour cette nouvelle étape et 14e navire, le croisiériste s’est associé au cabinet d’architecture navale Stirling Design International. Un appel d’offres a été lancé auprès de quatre chantiers (non dévoilés mais intégrant les Chantiers de l'Atlantique et sans doute Vard, le chantier norvégien de prédilection de Ponant) pour un navire d’une centaine de cabines et de 181 m de long. Avec une livraison programmée d'ici 2030.

Les images du concept dévoilent un yacht à voiles (deux systèmes véliques sont en cours d'étude : les Oceanwings de la société française Ayro et le Solid Sail des Chantiers de l’Atlantique). Le système vélique, couplé à un travail sur la carène, devrait contribuer à hauteur de 50 % à la propulsion.

Six technologies de rupture selon Ponant

Plus de 1 000 m2 de surface de panneaux photovoltaïques avec des dispositifs de nouvelle génération, solaires, organiques et écoconçus, seront intégrés dans les structures et les voiles.

Une pile à combustible basse température (PEMFC) fonctionnera à l’hydrogène sous forme liquide pour la propulsion, tandis qu’une autre de haute température (SOFC) servira aux besoins de la charge hôtelière du navire, la chaleur dégagée étant récupérée pour la production d’eau chaude (la réutilisation de la chaleur des piles à combustible est rarement exploitée).

Il est également prévu la captation de carbone à bord dont il n'est rien dit sur la valorisation.

Enfin, l’entreprise a planché sur un système de gestion de l'énergie qui permette de répartir les puissances sans qu'aucun groupe électrogène ne soit en service.

La direction ne mentionne aucun budget pour ce projet très ambitieux et sans doute fort coûteux.

Pour cette nouvelle aventure, les équipes R&D de la société ont mis à profit le retour d’expérience du brise-glace de luxe (livré en 2021), le Commandant Charcot, à la motorisation hybride diesel/GNL (il a chargé du GNL pour la première fois en juin) et à la grande autonomie possible à ce jour sur batteries.

Une flotte carburant avec un combustible à 0,05 %

Promoteur d’un « tourisme raisonné et raisonnable » avec des navires de petite taille (131 m de long et de 92 cabines), l’armateur marseillais se distingue depuis des années du tout-venant, notamment pour avoir considéré bien avant l’heure le monde entier comme une zone ECA (zone à émissions d’oxydes de soufre et d’azote contrôlées).

La compagnie a ainsi été la première à avoir abandonné, un an avant l’IMO 2020, le fuel lourd au profit d’un combustible à 0,05 % de teneur en soufre tandis qu'elle a généralisé les systèmes catalytiques (SCR) dans toutes les zones géographiques. Ses six yachts d'expédition Explorers revendiquent une réduction de 90 % leurs émissions d’oxydes d’azote (NOx).

Elle fut aussi l’une des premières à mettre en œuvre des mesures d’ordre opérationnel (ralentissement de la vitesse, assistance digitale à la navigation et routage pour améliorer le rendement énergétique des navires) et technique (motorisation bas carbone, connexions électriques à quai dans les ports, hybridité des navires avec des batteries pour s’affranchir des groupes électrogènes diesel à quai, au mouillage ou à proximité des zones habitées). Un dogme qui fait aujourd’hui consensus dans le shipping.

Exit le plastique

Ponant reste une entreprise de services hôteliers. Dans ce cadre, son brise-glace de luxe Commandant Charcot (livré en 2021), bénéficiant d'une motorisation hybride avec la plus grande autonomie possible à ce jour sur batteries électriques et à la motorisaton dual fuel diesel/GNL (il a chargé du GNL pour la première fois en juin), a banni le plastique de tous ses usages.

Exit la bouteille d’eau à usage unique grâce à l’installation de systèmes de production d’eau potable à partir d’eau de mer, soit une économie estimée par la compagnie de plus de 30 t de plastiques par an.

Ces mesures, qui imprègnent auprès des consommateurs, sont accompagnées d'autres moins visibles mais à impacts pour l’environnement, telles que le recyclage et le traitement des déchets et des eaux usées ou l’éclairage LED.

Des technologies réplicables

Si l'approche de Ponant est difficilement taxable de « greenwashing » dans la mesure où le respect des destinations et de ses écosystèmes sont à la source même de sa proposition commerciale, elle ne s'attaque qu'à la partie maritime alors que ses croisières au bout du monde consomment de l’aérien.

Au vu du prix très élevé de ses croisières, l'entreprise peut bien financer de la R&D pour décarboner, persiflent ses détracteurs.

« Avec Swap2Zero, nous allons ouvrir la voie pour que d'autres acteurs s’engagent dans une navigation carboneutre. Nous allons bâtir une vitrine technologique française », répond indirectement Hervé Gastinel.

Adeline Descamps

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