Les annonces concernant la prise de poids de MSC sont devenues des non-événements. Depuis août 2020, le leader mondial dans le transport maritime de conteneurs a des fringales de navires et la perte d’appétit de l’économie mondiale n’a pas encore réussi à refréner ses accès de boulimie.
Les rapports portant sur les livraisons et commandes des chantiers navals témoignent de l'omniprésence de MSC dont les trois lettres s’alignent à toutes les lignes. L’armateur suisse est aussi un client du marché S&P qu'il fréquente assidument depuis août 2020. Plus de 300 navires d'occasion ont ainsi été acquis additionnant 1,2 MEVP.
Un écart d'1 MEVP
Un an et demi après être devenu le plus grand transporteur maritime de conteneurs au monde, cinq mois après avoir annoncé son désengagement de l’alliance 2M qu’il partage avec Maersk jusqu’à 2025, MSC marque la distance avec le numéro deux mondial.
Un million d’EVP sépare désormais les deux leaders mondiaux, fait observer Alphaliner dans une de ses brèves hebdomadaires. 5,14 versus 4,13 MEVP et quatre points de parts de marché (19 % contre 15,2 %).
L’écart va encore se creuser au regard des carnets de commande puisque le groupe familial de Genève attend 118 porte-conteneurs neufs pour une capacité supplémentaire de 1,48 MEVP, soit près de 30 % de sa flotte en exploitation.
Maersk ne tient pas la route avec ses 405 100 EVP en commande (33 navires) qui porteront sa capacité à 4,5 MEVP.
Si MSC cesse ses commandes, il alignera une flotte dans les deux à trois ans de 874 porte-conteneurs neufs totalisant 6,62 MEVP. Par sa capacité, le transporteur consolide les flottes de CMA CGM et de Cosco – les numéros trois et quatre du secteur –, sur la base des données d'Alphaliner. Par son carnet de commandes, il est proche de la flotte d’Evergreen ou de One (1,6 MEVP), sixième et septième transporteurs mondiaux.
Un mois de juin à 300 000 EVP
Rien que sur le mois de juin, sur les 300 000 EVP livrés, MSC a réceptionné 125 738 EVP, dont deux de plus de 24 000 EVP (les MSC Mariella et MSC Mastro). Huit de cette taille lui seront livrés cette année sur une commande qui en compte 14.
L’ancrage de MSC tout en haut de l’affiche est l’histoire d’une chronique largement annoncée.
Stratégie de diversification chez Maersk
Le groupe de transport danois n’a, à vrai dire, pas livré bataille, assumant même le fait de ne pas partager cet objectif, plus affairé à donner corps à sa stratégie d’intégration logistique en aval.
Outre l’austérité budgétaire qu’il observe depuis le début de la pandémie, plus soucieux de rémunérer ses actionnaires, Maersk place en effet ses profits dans une stratégie de diversification de ses activités, notamment dans la logistique, de façon à s’affranchir des cycles infernaux du seul shipping.
Les seuls dollars qu’il dépense pour ses navires vont vers la constitution de sa flotte au méthanol qui atteint 24 unités pour une capacité d’un peu moins de 350 000 EVP.
Une croissance accélérée
Contrairement à la plupart des autres grands transporteurs maritimes, qui ont atteint leur position dans le top 10 grâce à une série de fusions et d'acquisitions, l’ascension a été entièrement organique chez MSC.
Il lui aura fallu 37 ans pour atteindre 1 MEVP (janvier 2007) mais seulement quatre ans pour gagner ensuite 1 MEVP supplémentaire jusqu'à atteindre les 4 MEVP en juillet 2021. Seuls 22 mois auront été nécessaires pour passer de 4 à 5 MEVP. Autant dire qu'il est outillé pour naviguer solo sur les routes maritimes mondiales.
Nouveau match entre Maersk et CMA CGM
Il y a encore peu de temps, l’attention était portée sur la ligne de démarcation entre CMA CGM et Cosco.
Le premier (12,9 % de parts de marché mondial, 3,5 MEVP) a repris en 2021 la troisième place du classement mondial à Cosco, qui, avec 2,93 MEVP et 927 000 EVP en commande, ne tient plus la distance.
L'attention peut se cristalliser sur un match plus européen, entre Maersk et CMA CGM. Les 1,23 MEVP en commande de ce dernier (123 navires) devraient porter ses capacités d’exploitation à 4,71 MEVP contre 4,54 MEVP pour Maersk.
Nouvelle chronique annoncée : CMA CGM, numéro deux mondial.
Adeline Descamps
MSC reçoit plusieurs navires affrétés
Le MSC Mariella a été livré le 26 juin par Yangzijiang Shipbuilding. Le porte-conteneurs de 24 346 TEU a été financé par la China Development Bank qui l'affrète à MSC dans le cadre d'un contrat à long terme. Il est le quatrième (avec les MSC Irina, MSC Loreto et MSC Michel Cappelini) des six sisterships que le constructeur chinois doit livrer avant la fin de cette année. Le navire, propulsé avec des carburants conventionnels, sera exploité sur le service Lion/AE6 entre l'Asie et l'Europe
Hyundai Heavy Industries a aussi livré la semaine dernière le MSC Victoria (15 934 EVP) au NOO Cido Shipping, qui a commandé quatre navires de cette taille en mars 202, tous à propulsion conventionnelle, selon Alphaliner. La société basée à Hong Kong a commandé deux autres unités de ce type en octobre 2021 mais cette fois au GNL, moyennant un surcoût de 35 M$ (le prix est passé de 123 à 157 M$). Tous font l'objet d'un contrat d'affrètement à long terme à MSC.
Une fois intégré à la flotte de MSC, le MSC Victoria, sera exploité dans le cadre de boucle autonome Africa Express entre Asie et Afrique de l'Ouest, où il sera le plus grand des 11 unités dédiées à cette ligne.
La semaine dernière, le constructeur sud-coréen a livré le MSC Taylor (15 264 EVP) à Eastern Pacific Shipping. Il fait aussi l'objet d'un contrat à long terme à MSC. Il est le 20e de cette série à propulsion GNL et sera opéré sur la boucle commune Andes de MSC et ONE entre l'Asie et la côte ouest-américaine. Ce service est assuré par 14 navires dont onze de MSC de 13 000 à 16 500 EVP.
A.D.
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