Maersk, CMA CGM, Hapag-Lloyd, Evergreen : de grands écarts dans les surcharges carbone

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Evergreen est le quatrième transporteur de conteneurs à annoncer une « surcharge ETS » qui vise à couvrir le coût du système d'échange de quotas d'émission de l'Union européenne, dont l'entrée en vigueur est fixée au 1er janvier. Mais à la différence de Maersk, CMA CGM et Hapag-Lloyd, il ne s'agit pas de prix indicatifs.

Après CMA CGM, Maersk et Hapag-Lloyd, qui ont préparé leur terrain en publiant à titre indicatif ce qu'il en coûtera pour transporter un conteneur sous le régime du marché carbone européen, Evergreen livre sa grille tarifaire (cf.tableau) pour couvrir le coût du système d'échange de quotas d'émission de l'Union européenne (SCEQE ou ETS), qui entrera en vigueur le 1er janvier.

Pour le transporteur taïwanais, il ne s'agit pas de tirs à blanc mais de balles réelles. Maersk, CMA CGM et Hapag-Lloyd ont communiqué des estimations de prix à titre d'« illustration, basée sur la valeur actuelle du marché des quotas de carbone, de 90 € par tonne de CO2, car la surtaxe ETS, ses méthodologies et son prix estimé, sont susceptibles de changer », comme l'avait explicité Hapag-Lloyd lorsqu'il a communiqué ses estimations.

À la différence de ses pairs, les surtaxes d'Evergreen seront appliquées à partir du 1er janvier 2024, à l'exception des chargements américains pour lesquels la date d'embarquement sera prise en compte. Les surtaxes seront révisées chaque année, mais elles pourront être modifiées sur préavis ou instruction du transporteur.

Les tarifs sont plus proches de ceux de CMA CGM (cf.tableau). Les variations entre les quatre transporteurs sont notables mais en l'absence des éléments justifiant la politique des prix, il est difficile d'en déduire quoi que ce soit, si ce n'est de relever de grands écarts sur un même trade, qui peuvent aller de 70 $ à 12 $, en l'occurrence entre Maersk (seul à calculer en conteneurs de 40 pieds) et Hapag-Lloyd sur le trafic Asie-Europe du Nord. Sur ce marché, la surtaxe de CMA CGM (25 $) est, là encore, proche de celle d'Evergreen.

Montant de la surcharge prévue par CMA CGM, Maersk, Hapag-Lloyd et Evergreen, au titre de l’intégration du transport maritime dans le SCEQE (©JMM)

Le grand saut vers l'inconnu

Pour rappel, à partir du 1er janvier 2024, le transport maritime va entrer dans sa première année au sein du SCEQE, le système communautaire d'échange de quotas d'émission, qui concernait jusqu'à présent les secteurs à forte consommation d'énergie, tels que la production d'électricité et les industries.

Concrètement, le mécanisme vise à fixer une limite ou un plafond aux émissions de gaz à effet de serre (GES). Chaque année, un nombre de quotas européens (EUA) sera mis à disposition des échanges sur le marché dont le volume sera réduit progressivement afin que l'UE atteigne son objectif de réduction des émissions de GES de 55 % d'ici 2030 par rapport à 1990, et de zéro net d'ici 2050.

Il a été convenu que les compagnies maritimes devront soumettre des quotas équivalents à 40 % de leurs émissions en 2024 puis à 70 % en 2025 avant de couvrir la totalité en 2026. Ces règles s'appliquent aux navires de charge et de passagers de plus de 5 000 de jauge brute (GT) à partir de 2024 puis aux unités offshore de plus de 5 000 GT dès 2027.

Montant de la surcharge prévue pour un reefer par CMA CGM, Maersk, Hapag-Lloyd et Evergreen, au titre de l’intégration du transport maritime dans le SCEQE (©JMM)

Méthane compris

Le SCEQE couvrira dans un premier temps les émissions de dioxyde de carbone, puis sera étendu au méthane et au protoxyde d'azote à partir de 2026.

Les plus petites unités, de 400 à 5 000 GT, seront également tenues de déclarer leurs émissions et pourraient être intégrés au marché carbone ultérieurement.

Dans le détail, la totalité des émissions générées lors des voyages et des escales au sein de l'UE et de l’Espace économique européen (EEE, États membres de l'UE + Islande, Liechtenstein et Norvège) ainsi que 50 % des émissions lors des voyages à destination ou en provenance de l'UE/EEE, seront soumises au SCEQE.

Comportement d'évasion

Afin d'éviter les « fuites de carbone », les porte-conteneurs escalant dans des ports de transbordement situés en dehors du périmètre mais à moins de 300 milles nautiques (550 km) d'un port de l'UE/EEE seront tenus d’inclure la moitié des émissions jusqu'à ce port, plutôt que de se limiter au court trajet depuis le port de transbordement. La liste des ports considérés par le transbordement doit encore être publiée. L'ajout à la liste de Tanger Med et de East Port Saïd vient d'être notifié.

Le règlement européen MRV, qui impose aux exploitants de navires de plus de 5000 UMS arrivant/quittant un port de l'UE de surveiller et déclarer annuellement leurs émissions, servira de base de calcul des quotas à restituer pour chaque tonne de CO2e (CO2 équivalent) émise.

Un coût inévitablement répercuté

OceanScore estime que le SCEQE pourrait représenter un coût pour le transport maritime de l'ordre de 8 à 10 Md€ par an, une fois le système pleinement mis en œuvre en 2026, après une période d'introduction progressive de trois ans, en fonction d'un prix de marché fluctuant, qui est actuellement d'environ 90 € pour une tonne d'équivalent CO2.

Adeline Descamps

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