Le 15 mars, le ministère espagnol des Transports a fini par confirmer que le Lady Anastasia, un yacht de 48 m et propriété de Alexander Mikheev, PDG de Rosoboronexport, un conglomérat dans la vente d’armes appartenant à l'État russe, était retenu dans le port de Palma de Majorque. L’oligarque figure dans la liste visant l'élite dirigeante russe récemment actualisée par le Trésor américain.
Les autorités espagnoles avaient été alertées de la présence du yacht dans une marina espagnole en raison du geste déraisonné d’un marin de nationalité ukrainienne, chef mécanicien, qui avait tenté d’inoncer et de couler le yacht de son employeur qui n’était autre que le Lady Anastasia. Les autres membres de l’équipage étaient parvenus à le neutraliser. Il avait ensuite été intercepté par la police de Majorque tandis que les autorités devaient s’assurer des titres de propriété.
Deuxième yacht de Igor Sechin
Les autorités de Barcelone ont également immobilisé (pas encore saisi puisque l’identité du propriétaire doit être vérifié) le Valerie, un yacht de 85 m qui appartiendrait à l'oligarque russe Sergey Chemezov, ex-agent du KGB et PDG de Rostec, groupe d’armement de l’État russe. Le navire est actuellement amarré à un chantier de réparation et de maintenance dans le port de Barcelone, et les autorités ont déclaré qu'il était prêt à partir au moment de son immobilisation.
Troisième proie de la semaine, le Crescent a été saisi par l’État du port de Tarragone. Le superyacht (135 m de long) est soupçonné d'appartenir à l'oligarque russe Igor Sechin, le PDG de la compagnie pétrolière Rosneft et également proche du président Vladimir Poutine quand ce dernier était Premier ministre. Le dirigeant est visé par les sanctions européennes, notamment dans le cadre du gel total des avoirs russes.
Le Crescent est le deuxième yacht lié à Sechin à être saisi dans ce cadre. Le premier a fait l’objet début mars d’une procédure de confiscation par les autorités françaises alors qu’il était en réparation dans un des chantiers navals de La Ciotat (Bouches-du-Rhône). Il s’agit de l’Amore Vero. Selon les douanes françaises, au moment du contrôle, le navire prenait des dispositions pour appareiller dans l'urgence, sans avoir achevé les travaux prévus. « Cette tentative de départ des eaux territoriales françaises constitue une infraction sur le fondement de l’article 459 du code des douanes, visant toute personne contrevenant aux mesures de restriction des relations économiques et financières prévues par la réglementation communautaire », ont précisé les douanes.
Procédure juridique complexe
Ces quinze derniers jours, plusieurs États membres européens ont procédé à des « arrestations ». Les autorités allemandes ont saisi le Dilbar, parmi les plus grands au monde (156 m), atrribué à Alisher Usmanov, à la tête d’un ensemble chapeautant Metalloinvest, la société de médias Kommersant et le fournisseur de téléphonie mobile Megafon.
Depuis début mars, l’Italie a saisi trois yachts : le Lady M, propriété du magnat de l’acier Alexey Mordashov, dans le port d’Imperia, le même jour que le Léna appartenant à Gennady Timchenko, dans le port de Sanremo. Le 12 mars, les autorités italiennes ont préempté le Voilier A, au patrimoine d’Andrey Melnichenko (charbon et engrais) amarré au port de Trieste.
Ces navires sont pour l'instant dans un statut de « détenus ». Les enquêteurs devront démontrer que chaque navire appartient à un individu sanctionné et a été utilisé pour commettre une infraction relevant du pénal. Une procédure complexe dans les faits car ces beaux objets sont souvent détenues par des sociétés et non des particuliers selon des montages financiers et immobiliers les plus sophistiqués.
Adeline Descamps