À quelques jours du terme fixé pour la clôture des négociations avec le soumissionnaire retenu ‑ le groupe sud-coréen agroalimentaire Harim, propriétaire de la compagnie maritime de vraquiers Pan Ocean –, pour acquérir 57,9 % du capital de HMM, les médias sud-coréens faisaient état de difficultés.
Les parties ne parvenaient pas à s’entendre sur les termes et les conditions de l’accord de vente définitif si bien que la date limite du 23 janvier avait été ajournée de deux semaines, au 6 février.
Selon le calendrier initial, sans cesse repoussée, l’opération lancée en janvier 2023 devrait aboutir au premier semestre 2024 par une transaction de 4,9 Md$.
« Des négociations ont été menées sur les principaux éléments de l'accord entre les détenteurs d'obligations, mais aucun accord n'a été conclu. Aucune entreprise privée ne peut facilement accepter un accord qui ne fait d'elle que l'actionnaire principal sans lui garantir des droits de gestion réels », a indiqué le candidat-acquéreur Harim pour justifier son retrait des négociations exclusives.
La conversion des obligations d'État au cœur des différendsLes échanges du groupe sud-coréen privé avec les actuels actionnaires publics de HMM – la Korea Development Bank (KDB avec 20,7 %) et la Korea Ocean Business Corp. (KOBC avec 19,9 %) – ont achoppé notamment sur les restrictions imposées sur les dividendes, la vente d'actions et les nominations au conseil d'administration.
La conversion des obligations d'État en actions supplémentaires de HMM avait déjà été au cœur des discussions avec un des soumissionnaires écarté, Dongwon, autre grand groupe agroalimentaire familial et notamment investi dans le Dongwon Pusan Container Terminal.
La conversion telle que définie dans les conditions actuelles aurait réduit la participation de Harim de 57,9 à 38,9 %.
« En reportant la conversion des obligations, Harim pourrait potentiellement gagner trois ans de dividendes sur les obligations et s'assurer une participation initialement plus importante dans l'entreprise », avait expliqué Alphaliner avant ces dernières informations.
Un dossier au très long cours
Ce dossier est tellement au long cours qu’entre l’annonce de la privatisation partielle du huitième acteur mondial dans le transport maritime de conteneurs et ce jour, le marché s’est retourné plusieurs fois.
HMM aurait pu être vendu au moment où les taux de fret étaient au plus haut mais les procédures préparatoires s’étirant, la compagnie maritime a été mise en vente alors que ses résultats reflétaient à nouveau ses difficultés d’avant Covid quand elle accumulait les exercices trimestriels dans le rouge.
Sur les neuf premiers mois de 2023, HMM a accusé une baisse de 58 % de son chiffre d'affaires (6,334 milliards de KRW, 4,87 Md$) tandis que le bénéfice d'exploitation a chuté de 95 %, à 542 milliards de KRW (417 M$) et le résultat net de 92 %, à 706 milliards KRW (542 M$).
Le marché s'est retourné plusieurs fois
Depuis décembre, date à laquelle les actuels propriétaires sont entrés en discussion exclusive avec Harim, les taux de fret au plus bas ont rebondi sous l’effet de la guerre entre le Hamas et Israël. Surtout, Hapag-Lloyd est sorti de l’alliance dont est membre HMM (avec ONE et Yang Ming), créant un gros trou d’air.
Les syndicats de marins et d'employés de HMM, plutôt réticents quant au choix de l’ultime candidat, ont profité de l’impasse pour réitérer, ces derniers jours, leur opposition à cette opération qui les fait basculer dans un groupe Harim qu’ils estiment de taille relativement modeste.
C’est l’un des marqueurs de cette opération. L’appel d'offres s’est soldé par un nombre limité de candidatures (quatre) et l’absence des grands chaebols sud-coréens tant attendus.
Aucun des soumissionnaires ne répondait vraiment aux critères de solvabilité et solidité financière requis, Hapag-Lloyd ayant été écarté du deuxième tour de l'appel d'offres.
Le processus a échoué mais rien n'a filtré sur la suite. Si le processus de vente va être annulé, ajourné ou relancé in extenso. HMM se retrouve au point mort.
Adeline Descamps
Franchir le million d'EVP
En juillet 2022, le transporteur sud-coréen avait annoncé un plan d’investissement de 11,46 Md$ sur cinq ans visant à permettre à l'armateur de porte-conteneurs de porter sa capacité à 1,2 MEVP, et à l’exploitant de vraquiers d’acquérir 26 navires supplémentaires pour porter sa flotte à 55.
Six vraquiers ont été introduits cette année et 11 autres sont programmés en 2024.
Le numéro huit mondial de la ligne régulière, qui exploite une flotte de 70 porte-conteneurs totalisant près de 785 000 EVP, a actuellement 265 000 EVP en commande, soit 26 navires.
Il devrait prendre livraison de 136 000 EVP entre janvier et fin mai. Le premier de ces navires configurés pour le GNL, le HMM Garnet, a été livré il y a quelques jours.
Son carnet de commandes devrait lui permettre d'atteindre le million d'EVP d'ici 2025-2026, soit avec quatre ans de retard sur son calendrier initial. Il devait atteindre ce cap en 2020.
A.D.
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