Les transporteurs fluviaux, qu’ils soient artisans bateliers ou armateurs « industriels », spécialisés dans le fret ou dans le transport de passagers, ont créé un syndicat professionnel unique pour les représenter : Entreprises fluviales de France.
Par comparaison avec les modes routier, maritime, ferroviaire ou aérien, le fluvial peut apparaître le parent pauvre du monde des transports. D’autant que ses acteurs ne disposaient pas jusqu’à présent d’une instance unique pour les représenter et leur permettre de parler d’une seule voix. C’est désormais chose faite, avec la création le 5 novembre 2019 d’Entreprises fluviales de France (E2F), qui a vocation à représenter tous les transporteurs fluviaux de fret et de passagers.
Le Comité des armateurs fluviaux (CAF) et la Chambre nationale de la batellerie artisanale (CNBA) avaient déjà tenté de se rapprocher en 2013, créant Transporteurs fluviaux de France, structure au sein de laquelle les deux organisations unissaient leurs efforts pour faire entendre la voix du transport fluvial. Mais le rapprochement entre armateurs et bateliers n’était pas allé au-delà de quelques communications communes, chacun préférant s’appuyer sur sa propre structure pour faire valoir ses intérêts.
Renouveau du transport fluvial
La suppression de la CNBA, prévue par la loi de finance 2019, qui a mis fin du même coup à la taxe payée par les bateliers pour financer le fonctionnement de cette chambre, a précipité la création d’E2F. Depuis 1985, la CNBA faisait en effet fonction de chambre des métiers pour les artisans bateliers, dont elle représentait aussi les intérêts. Depuis le 1er juillet 2019, la CNBA a cessé d’exister, laissant les bateliers sans aucune représentation professionnelle commune.
Le nouvelle fédération professionnelle, qui prend la suite à la fois de la CNBA et du CAF, est composée de trois collèges, représentant respectivement les armateurs industriels (en compte propre ou pour autrui), les artisans bateliers, et les transporteurs de passagers (qu’ils proposent des promenades, des croisières ou des péniches-hôtels). Cette nouvelle structure se veut « au plus près des entreprises, des territoires et des acteurs de la filière pour contribuer avec sa force d’entraînement au renouveau du transport fluvial » selon Didier Léandri qui en devient président et délégué général, fonctions qu’il occupait précédemment au CAF. « Le renouveau dépendra de sa cohésion et de sa capacité à exprimer d’une même voix une exigence forte pour répondre aux aspirations des citoyens en faveur d’un transport durable et d’un tourisme soutenable au service de notre économie », estime Frédéric Avierinos, directeur général des Vedettes de Paris, qui préside le collège « passagers ».
Premier jalon vers la constitution d’une interprofession fluviale
« Cette création s’inscrit dans la dynamique impulsée par le gouvernement en faveur d’un transport fluvial durable à l’égard duquel il multiplie les initiatives », souligne le secrétaire d’État chargé des transports Jean-Baptiste Djébbari, qui rappelle que « les discussions en cours pour parvenir à la signature au début de l’année 2020 d’Engagements pour la Croissance Verte (ECV) du secteur fluvial inscriront pleinement le transport fluvial dans la dynamique de transition énergétique dont il est un acteur majeur. »
La création d’E2F devrait aussi constituer un premier jalon vers la constitution d’une interprofession fluviale, qui rassemblerait l’ensemble de la filière, au-delà des seuls transporteurs fluviaux. Constructeurs, chantiers navals, ports fluviaux, courtiers de fret, chargeurs et autres acteurs du fluvial devaient en effet rejoindre les transporteurs fluviaux au sein d’une future interprofession, voulue par le gouvernement qui a missionné sur le sujet le préfet François Philizot, délégué interministériel au développement de la vallée de la Seine. Bien que la constitution d’une telle interprofession n’avait pas les faveurs des artisans bateliers de la CNBA, la disparition de celle-ci n’a fait que retarder la création de celle là. L’enjeu principal pour E2F, du moins à court terme, est de faire adhérer massivement les artisans à cette nouvelle structure pour lui donner de la représentativité. La mise en place de l’interprofession reste cependant à l’ordre du jour, et François Philizot souhaite lancer en 2020 une préfiguration opérationnelle.
Étienne Berrier
De gauche à droite : Leigh Wootton, secrétaire, Didier Léandri, président, Pierre Dubourg, vice-président (collège fret artisans), Pascal Girardet, vice-président (collège fret armateurs), Frédéric Avierinos, vice-président (collège passagers), Arnaud Daniel, trésorier, Pascal Rottiers, vice-président (collège fret artisans).