Les difficultés des clients du reefer hypothèquent la demande de transport

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Coûts de la main-d'œuvre, prix des matières premières et des énergies, frais d'expédition... les exportateurs de fruits et de viandes subissent une forte pression financière qu’ils peuvent difficilement répercuter sur le client final. La situation jette un froid sur le transport des denrées périssables.

« Les fruits ne sont plus une priorité dans les dépenses de consommation car ils sont devenus des produits de luxe », résumait un participant à Fruit Logistica en février, un événement très couru dans le secteur des produits frais et denrées périssables.

Loin de l’Amérique du Sud, où se concentrent les exportateurs et les pays producteurs de frais (Argentine, Brésil, Chili, Paraguay et Uruguay), le conflit en Ukraine, qui a provoqué des poussées de fièvre inflationnistes, a des répercussions sur le commerce maritime frigorifique, avec des exportations en chute.

Coûts de la main-d'œuvre, prix des matières premières (emballage, plastique, carton, etc.) et des énergies, frais d'expédition, les exportateurs de fruits et de viandes subissent une forte pression financière qu’ils peuvent difficilement répercuter sur le client final. Cela finit par se matérialiser dans la demande de transport.

L'Asie, désormais première destination des échanges reefers

Les échanges maritimes de denrées périssables se sont établis à 138,6 Mt l’an dernier, selon les données de Datamar, une société de conseil spécialisé dans ce secteur. La viande reste la principale marchandise transportée par mer, avec 22 % des échanges, suivie par les bananes (15 %) et le poisson (14 %).

Toujours selon Datamar, les exportations de fruits du Brésil, après des années de croissance, ont chuté de 24,4 % en 2022 par rapport à 2021. Le Chili n'a pas été épargné l'an dernier : la chute de ses exportations de fruits touchent la plupart de ses marchés : - 8 % vers les États-Unis, - 3 % vers les Pays-Bas et - 13 % vers le Royaume-Uni. En revanche, les imports de ses clients chinois ont augmenté de 20 %.

Selon Drewry, les volumes maritimes mondiaux avec l’Asie dominent désormais les échanges maritimes réfrigérés, avec une part de 37 % en 2022. Selon les projections, ils devraient représenter 39 % d'ici 2026.

Perte de 1 Md$ de revenus

Après une augmentation de la demande d'environ 2 % en 2020 et de 1,6 % en 2021, indique Xeneta, le marché du reefer a chuté dès le mois de février 2022, jusqu'en novembre, puis s'est ressaisi en décembre. Les produits frais ont diminué de 4 %, tandis que les produits congelés sont restés stables.

En février, les taux de fret des conteneurs réfrigérés étaient revenus à peu près aux niveaux d'avant la pandémie, mais sans connaître la même trajectoire de croissance et de décroissance que leur équivalent dry. Ils n’ont pas subi la sanction brutale et accéléré des marchés car les tarifs du transport frigorifique ne se sont tout simplement pas autant emballés durant la pandémie.

Un trafic qui devrait augmenter de 4,6 % en 2024

Pour autant, les usagers de ce type de transport ont souffert des coûts d'expédition et du manque d'espaces à bord, les denrées périssables étant en concurrence avec les marchandises sèches dans les conteneurs.

« Les chargeurs sur ce marché ont besoin de stabilité, car la production de fruits et légumes coûte cher aujourd'hui », relevait Philip Gray, analyste du transport frigorifique chez Drewry, qui intervenait également à Fruit Logistica. Le trafic conteneurisé frigorifique devrait rester globalement stable en 2023 avant d'augmenter de 4,6 % en 2024, selon le consultant.

Retour en grâce des navires conventionnels frigorifiques

Les perturbations dans la ligne régulière ont profité aux navires spécialisés dans le transport frigorifique, qui sont ainsi revenus en grâce. « Les navires frigorifiques traditionnels ont connu une période faste. Ils gagnent beaucoup d'argent. Il y a environ 490 navires et la demande mondiale est forte, ce qui fait grimper les tarifs. Les navires frigorifiques spécialisés vont bénéficier d'un très bon marché au cours de l'année ou des deux années à venir », assure Drewry

Selon Datamar, 5 % du fret réfrigéré du Brésil serait revenu aux navires conventionnels et au Chili, 10 % des marchandises auraient basculé vers le vrac. « L'année dernière, un gros exportateur de melons est passé des conteneurs frigorifiques aux navires frigorifiques. Cela n'était pas arrivé au Brésil depuis très longtemps ».

Domination européenne

Ce retour en grâce pourrait être de courte durée. « Les transporteurs européens de conteneurs manifestent un plus grand appétit pour le fret frigorifique », indique Alphaliner dans sa dernière note hebdomadaire.

MSC en tête. Le leader de la ligne régulière détient la plus grande capacité reefer. Les 746 navires de sa flotte (au 8 avril) sont équipés de 496 200 prises reefers. Rien d’étonnant au vu des commandes record du transporteur suisse.

Mais c’est ZIM qui crée la surprise. Ses 138 navires disposent de 68 000 prises. Un quart de la capacité de sa flotte est ainsi en mesure de transporter des marchandises sous température contrôlée, pourcentage le plus élevé parmi les dix premiers transporteurs.

Quoi qu’il soit, les Européens dominent ce classement par le nombre de navires appareillés pour cette logistique du froid : le taux d’équipement est supérieur à 20 % chez les armateurs européens – 20,3 % pour MSC, 23,1 % pour Maersk, 21,8 % pour CMA CGM et 21,1 % pour Hapag-Lloyd –, mais « seulement » de 15 à 17 % pour leurs homologues asiatiques, 15,5 % chez HMM et 17,3 % chez Evergreen, par exemple.

Il y a une raison évidente à la domination européenne, explique Alphaliner. « Dans le passé, tous les grands transporteurs européens ont commandé des navires neufs dotés d'un nombre particulièrement élevé de prises frigorifiques, car ces navires étaient spécialement conçus pour être exploités sur des services axés sur les fruits ou d'autres services latino-américains à forte densité de produits frigorifiques ».

Adeline Descamps

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