Comme Vale l’avait annoncé en début d’année, le géant minier, qui domine les approvisionnements et les ventes de minerai de fer du Brésil à la Chine, a mis un terme à l’exploitation de ces très grands minéraliers issus de la conversion des grands pétroliers à simple coque. Ils deviennent rares et vieux.
En à peine dix lignes, la multinationale minière brésilienne a expédié le sort de ses gros-porteurs de minerai, les nommés VLOC (very large ore carrier), qui sont en fait de grands transporteurs de brut (VLCC) à simple coque convertis. Dans un laconique communiqué, le leader dans la production et l'exportation du minerai de fer a annoncé avoir effectué la dernière livraison à la Chine ces derniers jours. Conformément à sa « nouvelle approche de gestion des risques », Vale va affréter à partir de janvier dans le cadre de contrats long terme des navires « plus efficaces » et « plus modernes » tels que les Valemax et Guaibamax.
Ce n’est pas une surprise, l’entreprise avait annoncé en janvier qu'elle allait progressivement mettre un terme aux contrats d’affrètement de 25 de ces vraquiers de 200 000 à 299 999 tpl. Cette décision risque de pousser un peu plus vers la sortie ces navires qui ont failli mourir une première fois quand la réglementation internationale (Marpol) a imposé une double coque aux pétroliers.
Opportunité d’exploitation
Les pétroliers devenus obsolètes, les investisseurs avaient vu une opportunité en les convertissant en minéraliers pour les exploiter avec des contrats d'affrètement conclus sur la durée de vie prévue du navire, autour de 25 ans. Le coût de la conversion étant estimé entre 12 et 15 M$, les recettes issues des contrats à long terme ont largement rempli leur office en termes de retour sur investissement. Les VLOC ont ainsi été majoritairement acquis pour la conversion dans les années 2007-2008, mais beaucoup de ces travaux de refit n'ont été achevés qu’après la crise financière.
Dans la famille des vraquiers, les VLOC figurent parmi les navires les plus âgés, construits en 1999 ou avant. Selon Clarksons, il y en aurait moins d’une quarantaine en service de cette classe d’âge (10,6 Mtpl). En juin 2017, cette flotte comptait encore 51 navires d'un âge moyen de 23,8 ans. Depuis, 22 ont été mis à la casse. Selon le Bimco, trois VLOC sur cinq ne seraient actuellement plus en service.
Trop d’accidents
En réalité, ils ont été impliqués dans de nombreux accidents. Le 31 mars 2017, un de ces navires, le Stellar Daisy, construit en 1993 et converti en 2008, avait coulé dans des circonstances tragiques pour l’équipage (seuls deux marins philippins ont pu être sauvés parmi les 24 membres d'équipage composé de 8 Coréens et 16 Philippins). L’enquête avait révélé des défauts de structure de la coque. Cet incident avait suscité une surveillance accrue de ces navires et par ailleurs motivé les commandes pour le renouvellement de la flotte.
Plusieurs autres VLOC convertis appartenant à l’armateur coréen Polaris Shipping et affrétés par Vale ont rencontré des défaillances analogues, dont le Stellar Queen, mis en service en 1994, et le Stellar Unicorn, datant de 1993. En début de cette année, le Stellar Banner, chargé de 275 000 t de minerai de fer, s’est échoué à près de 100 km au large des côtes de São Luís, au Brésil.
Économies d’échelle
Leur disparition n’engendra pas pour autant de pénurie de tonnages. Le déplacement des flux entre les marchés de production et de consommation, qui a allongé les distances, a en outre stimulé, ces dernières années, les investissements dans les très grands minéraliers pour les économies d’échelle qu’ils permettent de réaliser.
Cette année devaient être réceptionnés les derniers Valemax issus des contrats conclus en 2016 et 2017 (trois prévus cette année dont un pour l'armateur chinois China Ore Shipping et deux pour l'armateur japonais NS United). Aucun n'a toutefois été commandé au cours des deux dernières années. Parmi les 41 guaibamax (325 000 tpl) à livrer, 20 sont attendus en 2020, 17 en 2021 et quatre en 2022. Ce sont ces navires qui sont appelés à se substituer aux VLOC défunts.
Adeline Descamps