Le dossier est interminable. Fin septembre, la Collectivité territoriale de Corse avait été définitivement condamnée par le Conseil d’État à verser 86,3 M€ à Corsica Ferries en réparation d’un préjudice lié au subventionnement dit illégal de sa concurrente, l’ex-SNCM, entre 2007 et 2013.
La Collectivité territoriale de Corse (CTC) avait déposé un pourvoi contre les arrêts du 12 février 2018 et du 22 février 2021 auprès de la cour administrative d’appel de Marseille. Dans un jugement initial, le tribunal administratif de Bastia avait estimé le manque à gagner pour la compagnie à 84,3 M€. La cour administrative d’appel de Marseille l’avait réévalué à 86,3 M€ en février 2021, en l’assortissant des intérêts au taux légal depuis décembre 2014.
Persévérance
Les faits remontent et concernent l’une des nombreuses plaintes que la compagnie a déposées auprès des tribunaux en lien avec la délégation de service public (DSP) pour la desserte maritime de la Corse au départ du port de Marseille.
Persévérant dans ses dénonciations d’un dispositif, qu’il a toujours estimé extrêmement coûteux pour le contribuable, le président de Corsica Ferries, Pierre Mattei, avait mis en garde en février 2021, après l’attribution de la DSP au duo Corsica Linea/Méridionale pour la période du 1er mars 2021 au 31 décembre 2022. La « collectivité locale persévère à aller à rebours de la loi en lançant des DSP avec subvention du transport de passagers, qui écartent systématiquement Corsica Ferries des appels d’offres », avait-il commenté.
Depuis le 1er mars, Corsica Linea opère trois des cinq liaisons au départ de Marseille vers la Corse – Bastia-Marseille, Porto-Vecchio-Marseille et l'Ile-Rousse-Marseille –, tandis que la ligne vers Ajaccio est partagée avec La Méridionale (opérée avec le Piana). La filiale de Stef exploite seule la desserte de Propriano avec le Kalliste.
Refus systématique de la CDC
Fin octobre, Gilles Simeoni avait fait comprendre qu’il comptait contester la décision. Dès l'arrêt notifié, le 29 septembre, l’ex-avocat n’avait pas exclu la possibilité de porter ce litige devant la justice européenne, indiquant que c’est l’État français qui a été « le principal inspirateur du service complémentaire fourni par la SNCM », qu’il s'est abstenu d'exercer tout contrôle de légalité « sur la convention litigieuse » 2007-2013, et ne l'a pas notifiée à la Commission européenne « comme il en avait l'obligation ».
En décembre, le gouvernement avait fini par céder, annoncant avoir déposé un amendement au projet de budget 2022 afin d’abonder l'enveloppe destinée à la Collectivité de Corse pour régler son contentieux avec Corsica Ferries. Il avait alors indiqué qu’il s’agissait de « solder le passif de cette DSP » mais qu’il ne fallait pas l’interpréter comme un « transfert de la responsabilité » de la collectivité à l'État.
Suite et fin ?
Cette fois, c’est le préfet de Corse qui a lancé le 15 février « une procédure de mandatement d'office » pour contraindre la Collectivité de Corse à payer 9,2 M$ supplémentaires au transporteur maritime. Un montant correspondant aux intérêts de la condamnation en justice de 86,3 M€.
Dans le cadre de cette procédure engagée le 9 décembre, la CDC avait jusqu’au 10 février 2022 pour régler la totalité de la somme et de ses intérêts dus. Le paiement partiel n’étant pas de nature à clore cette procédure, un mandatement d’office a été déclenché, a signifié la préfecture.
A.D.