HMM fait partie de ces compagnies de la ligne régulière dont les réactions aux changements brutaux des conditions du marché sont particulièrement scrutées en raison de leurs zones de fragilités : leur situation financière avant le Covid, leur surexposition à des marchés à forte déprise (comme le transpacifique) ou encore leur stratégie d’exploitation basée sur le marché au comptant. Partant, ils offrent de plus fortes prises aux vents contraires et subissent plus fortement les à-coups de l’offre et de la demande.
Après avoir enregistré des pertes chaque année entre 2011 et 2019, HMM a renoué avec les bénéfices en 2020 à la faveur de la pandémie et a engrangé 14 Md$ sur la période 2020-2022, grâce à la livraison de ses 20 mégamax tombés à pic pour répondre à une demande qui semblait sans limites.
Un résultat net en chute de 89 %
Le résultat net du transporteur maritime sud-coréen a chuté de 89 % au deuxième trimestre par rapport à l'année précédente pour s’établir à 238 M$ contre 2,2 Md$ au deuxième trimestre de 2022. Le bénéfice d'exploitation a dévissé de 95 %, passant de 2,2 Md$ à 121,8 M$ en un an.
En baisse de 58 %, le chiffre d’affaires reste toutefois dans la sphère du milliard, à 1,6 Md$ contre 3,8 Md$ il y a un à la même période.
À l'instar de ses pairs, HMM évoque la normalisation de la chaîne d'approvisionnement mais pointe le doigt accusateur sur la surcapacité qui menace le marché du fait de « l'afflux de nouveaux porte-conteneurs commandés pendant la pandémie. L'effet de cascade de navires plus grands des principaux trafics est-ouest vers des voies plus petites a intensifié le déséquilibre entre l'offre et la demande ».
Privatisation enclenchée
La sous-performance de la compagnie sud-coréenne, huitième armateur mondial de porte-conteneurs, tombe mal alors que le processus de vente de la participation de l'État – les 20,98 % et 19,96 % de la Korea Development Bank (KDB) et de la Korea Ocean Business Corp (KOBC) –, a enfin été enclenchée après de longues valses hésitations.
Les investisseurs ont jusqu'au 21 août pour soumettre leurs offres d'achat sachant que Danaos a déjà acquis une participation en 2022 (moyennant 711 M$).
SM Group sur les rangs
Parmi les possibles acquéreurs, Hyundai Motor Group, LX Group, filiale logistique du géant de l'électricité LG, Samsung, Posco, quatrième producteur mondial d'acier, Harim Group, qui exploite Pan Ocean, Global Sae-A associé à IMM Private Equity, qui détient Hyundai LNG Shipping (vendu par HMM pour 375 M$ il y a neuf ans), mais aussi SM Group, 26e exploitant mondial de porte-conteneurs, déjà actionnaire à hauteur de 6,56 %.
Si les deux banques actionnaires incluent leurs obligations convertibles dans le processus de vente, l’acquisition deviendrait hors de la portée de ce dernier.
Le groupe présidé par Woo Oh-hyun, réputé pour avoir redressé les entreprises qu’il a acquises, a indiqué qu’il ferait une offre pour son compatriote à condition que l’opération n’excède pas une valeur de 3,5 Md$. Une somme qu’il aurait déjà réunie via des prêts bancaires, des réserves de trésorerie et actifs encaissables des filiales.
Une consolidation de 861 000 EVP
Si la transaction peut se faire, HMM et SM Line fusionneraient, consolidant une capacité de 861 000 EVP, mais sans effet sur le classement mondial car Evergreen, son concurrent direct depuis que ONE lui a ravi la 6e place, est loin devant avec 1,67 MEVP.
HMM est sous le contrôle de l'État depuis 2016, année traumatique pour le secteur avec la faillite de l'iconique Hanjin Shipping. La KDB est devenue actionnaire cette année-là et a renfloué à plusieurs reprises le transporteur.
Adeline Descamps
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