Brittany Ferries : Bruxelles autorise une aide d’État de 61,2 M€ pour préjudice subi

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La Commission européenne estime à 61,2 € le préjudice subi par Brittany Ferries durant la crise sanitaire et vient de notifier à la France qu’elle pouvait accéder à cette compensation qui ne contrevient pas aux règles sur les aides d’État. La somme est bien en-deçà de la facture adressée par le coronavirus à la compagnie bretonne.

À la question : comment l’État français va-t-il traiter le dossier Brittany Ferries, compagnie de transport de passagers en grande difficulté, ou plus exactement comment va-t-il le faire sur la base du préjudice économique subi par la compagnie du fait des restrictions sanitaires ? Une partie de la réponse a été officiellement donnée par Bruxelles le 23 septembre. La Commission européenne estime le préjudice à un peu plus de 61 M€. Et elle vient de notifier à la France qu’elle pouvait accéder à cette compensation, en vertu des règles de l'UE en matière des aides d'État et de l'article 107(2)(b) du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, qui autorise les États membres à indemniser certaines sociétés ou certains secteurs « pour des dommages causés directement par des événements extraordinaires ». En l’occurrence, « l’​événement extraordinaire » se nomme le coronavirus.

« La mesure vise à compenser Brittany Ferries pour la perte globale de revenus subie pendant la période allant du 17 mars au 30 juin 2020 en raison des restrictions sanitaires adoptées par la France, mais aussi par d'autres États, pour faire face à la pandémie. Pour la période allant du 29 octobre 2020 au 31 mars 2021, étant donné que de nombreuses mesures restrictives avaient déjà été levées à ce moment-là, la mesure vise à compenser Brittany Ferries pour les pertes causées par les restrictions de voyage restantes ou nouvelles affectant des lignes spécifiques », est-il indiqué dans l’avis. 

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Des années noires

Il reste désormais à savoir ce que le gouvernement français va décider. Une aide que Brittany Ferries va certainement estimée en deçà du coût réel. Mais les gestes de soutien lui sont adressés les uns après les autres. La compagnie bretonne a annoncé à l’occasion des Assises de l'économie de la mer que CMA CGM allait investir 25 M€ dont 10 millions en obligations convertibles et 15 millions en avances remboursables (après cinq à huit ans).   

Brittany Ferries, comme la plupart des compagnies opérant sur le segment du transport passagers et sur le marché transmanche, sort de plusieurs années noires consécutives aux saisons sans fin des épisodes Brexit et Covid.

L’entreprise, dont 80 % du chiffre d’affaires reposent sur le transport de passagers et la clientèle britannique, a vu son trafic dégringoler. La crise sanitaire et sa cohorte de mesures non négociables en temps d’épidémie : restrictions de déplacements, fermetures des frontières et quarantaines…ont surajouté à sa situation déjà fragile.

Des saisons zéro

Au final, la crise sanitaire l’aura amputé de la moitié de son chiffre d’affaires en 2020 (120 M€ en 2020) et privée de quelque 1,7 million de passagers (750 000 l’an dernier au lieu de 2,5 millions en moyenne ces dernières années). Elle sort de la crise sanitaire lestée d’une dette « improductive » de 220 M€, selon les termes de la direction qui va peser, pour quelques années, sur les finances de l’entreprise. Brittany Ferries a en effet emprunté, en souscrivant au Prêt Garanti par l’État (PGE) au maximum des possibilités, soit 117 M€ auprès de 12 banques, et auprès de la BPI à hauteur de 5 M€. Les régions Normandie et Bretagne ont dégagé 85 M€ en avances qu’il faudra rembourser à partir de 2026. 

L’année 2021 restera néanmoins compliquée. La saison touristique, qui s’étend en règle générale de fin mars à octobre avec douze navires, a été tronquée et écourtée puisque toutes les restrictions de mobilité n’ont été levées qu’en juin au plus tôt en France alors que le Royaume-Uni, son marché source, est resté relativement fermé. Quant au fret, qui apporte 20 % des recettes, l’entreprise a dû s’autolimiter en réduisant ses capacités.

En interne, l’entreprise a mis en œuvre un plan de restructuration qui doit dégager des économies de l’ordre de 15 à 18 M€ par an sans exclure le passage par la case « haut de bilan » via une recapitalisation pour boucler un plan à 50 M€. Le comité interministériel de restructuration industrielle (Ciri) s’est en outre autosaisi le 3 septembre de son dossier.

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Concurrence intense sur le transmanche

Pour ne pas se laisser déborder par la concurrence sur un marché dégradé qui redouble d’offre dans un contexte post-Brexit (avec les annonces de Irish Ferries et Blue Channel, ce ne sont pas moins de cinq navires de plus qui vont opérer entre Calais et Douvres dans les mois qui viennent), l’armement breton donne des gages de sa dynamique en poursuivant le renouvellement verdi de sa flotte

« La ministre de la Mer attend de la part des armateurs des engagements en contrepartie des mesures en soutien à la flotte de commerce dans le cadre Fontenoy du Maritime. Cette commande est une réponse, avait indiqué Jean-Marc Roué, le président de la compagnie, à l’occasion de l’annonce portant sur la commande de deux navires hydrides au GNL. C’est un engagement fort au maintien de nos capacités d’import et d’export post-Brexit et post-Covid, au renforcement de l’attractivité touristique nationale et du modèle économique et social fondé sur l’emploi du marin français »,

L’entreprise n’a pas pour l’heure réagi. 

Adeline Descamps

 

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