Le premier porte-conteneur à plus de 100 000 $ par jour a été enregistré

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Kota Callao

 Le Kota Callao, négocié à 105 000 $, avait été préalablement affrété pour trois ans par PIL à 42 000 $ par jour.

Depuis un mois, les navires ne connaissent ni le sous ni le sans-emploi. En dépit de la livraison ininterrompue d'unités neuves, l'offre reste serrée dans toutes les tailles. Les propriétaires de navires décrochent des contrats d'affrètements plus longs tandis que les locations en courte durée atteignent des niveaux exceptionnels. L'histoire bégaie à nouveau : le premier porte-conteneurs loué à plus de 100 000 $ par jour vient d'être négocié.

Le transport maritime de conteneurs est sur réserve. Les navires ne tournent plus du tout au ralenti depuis un mois désormais et ne connaissent pas non plus le sans-emploi. Une situation dont le retournement de conjoncture subit a surpris plus d’un acteur, y compris les exploitants de navires.

À nouveau, rappelant le climat de l’ère covidienne, le conteneur navigue au portant, poussé par une conjonction de facteurs donnant des ailes aux taux de fret, tout en étant porteur de menaces et de risques pour la chaîne d’approvisionnement mondial, qui goûte peu aux mouvements de balanciers intempestifs.

Le conteneur est actuellement pris dans un tourbillon conjuguant un boom de la demande, la congestion dans certains ports clés, l’allongement des temps de navigation consécutif aux détournements d’une grande partie du bataillon mondial par le cap de Bonne Espérance et une offre qui fait défaut mais dans une fenêtre de temps courte au regard des livraison à venir (pas moins de 2 MEVP).

Pour l’heure, les 1 MEVP réceptionnés au cours du premier trimestre ne permettent manifestement pas d’absorber la demande. En mai, l’équivalent de près de 32 000 EVP sont sortis des cales sèches pour démarrer leur carrière. Il y avait alors encore 124 navires (483 330 EVP) en construction dans les chantiers.

En dépit de la livraison ininterrompue de navires neufs, l'offre reste serrée dans toutes les tailles et la plupart des transporteurs ont fait savoir ces derniers jours que la situation actuelle devrait perdurer au-delà de la période de pointe qui se termine généralement en octobre.

Situation de famine

En attendant, la pénurie se manifeste par deux indicateurs : la part de la flotte inactive ne représentait plus que 0,4 % des capacités totales à la mi-mai (57 navires, soit 139 984 EVP). La saison de pointe a commencé tôt cette année, probablement parce que les chargeurs ont anticipé les retards de la chaîne d'approvisionnement et les pénuries d'équipement.

Le passé a de « longues ombres ». « Cette situation rappelle le mois de février 2022, lorsque les transporteurs ont déployé tous les navires disponibles pour tirer parti des taux de fret qui avaient atteint des sommets après la pandémie », rappellent les analystes d'Alphaliner.

Volatilité, marqueur du marché

Toutefois, c’est sans compter sur l’extrême volatilité, devenu un marqueur fort du secteur, puisque depuis le 20 mai, après quatre baisses bimensuelles consécutives de l'inactivité, quelque 90 000 EVP sont à nouveau sortis du marché, selon la même source. Mais l'inactivité globale est restée bien inférieure à 1 % de la flotte en capacité (29,96 MEVP).

Sans surprise, pour compléter le bataillon des 6 973 porte-conteneurs, l’affrètement est appelé en renforts, provoquant aussi une embellie sur ce marché.

L'indice Alphaliner Charter Index (ACI), indicateur de la location des porte-conteneurs, est à son plus haut niveau depuis octobre 2022 et dépasse de 60 % son niveau de décembre 2023.

Basé sur l'évaluation des taux d'affrètement journaliers de six tailles de navires (de 1 700 à 5 000 EVP), le ConTex (Container Ship Time Charter Assessment Index), publié par l'association des courtiers maritimes de Hambourg et de Brême (VHBS), tourne à plein régime, ayant enregistré 8 % en une semaine (selon une donnée publiée il y a six jours).

Toutes les tailles affichant de bonnes améliorations (entre + 26 et + 44,7 % sur une année glissante) mais le déficit dans les grands porte-conteneurs pour remplir pleinement les services principaux Est-Ouest est à l'origine de la pénurie et des perturbations des horaires, signifient les courtiers.

« Le non-respect des horaires entraîne à son tour la congestion des ports, car les navires doivent actuellement attendre quelques jours avant d'accoster dans certains des principaux hubs tels que Singapour, Dubaï ou Rotterdam. Le manque de capacité est aggravé par l'augmentation des volumes alors que les chargeurs tentent d'acheminer leurs marchandises le plus tôt possible afin d'éviter la pénurie des stocks de fin d'année, indique la VHBS. Tous ces facteurs incitent les opérateurs à employer des navires de 2 000 à 3 000 EVP comme chargeurs supplémentaires sur les lignes principales, aux côtés de navires beaucoup plus grands ».

Un premier navire affrété à 105 000 $

« Le Kota Callao [7 092 EVP, construit en 2024, NDLR] a été négocié à 105 000 $ pour une courte période de trois mois dans le cadre d’un service de chargement supplémentaire transpacifique, indique pour sa part Braemar. Cela confirme la période observée ces dernières semaines, où les opérateurs de navires sont prêts à payer des primes significatives pour des arrangements d'affrètement à court terme ». Le navire, détenu par TS Lines, avait été affrété pour trois ans par PIL à 42 000 $ par jour. CMA CGM en serait l'affrèteur.

Dans le même temps, les armateurs non-exploitants obtiennent des affrètements plus longs pour leurs navires. « Des périodes de 24 mois sont maintenant la norme et des contrats de 36 mois commencent également à apparaître. À titre d'exemple, un tonnage standard de 3 500 EVP est maintenant fixé pour des périodes de 24 mois à 28 000 $ par jour, soit plus de 3 000 $ de plus que ce qui pouvait être obtenu il y a quelques semaines », confirme Alphaliner.

« Dans la catégorie des plus petits, le Calliope [2 526 EVP, construit en 2002 NDLR] a été prolongé, assurant un affrètement de 2 ans à 20 000 $, pour être déployé entre la côte est-américaine et l'Amérique du Sud, poursuit de son côté Braemar. OOCL a contracté une unité de 1 809 EVP, construit en 2024, pour une longue période de 2 ans à un taux impressionnant de 22 000 $ ».

« En dessous, ce n'est qu'une question de temps avant qu’ils n'obtiennent des contrats d'affrètement aussi longs, les Bangkokmax de 1 700 à 1 900 EVP, de construction récente étant les prochains à remporter ces contrats à long terme », complète Alphaliner. Les affréteurs disent en effet être engagés pour 24 mois, avec des taux allant jusqu'à 22 000 $/j.

Des niveaux exceptionnels également pour les contrats courts

Parallèlement, les affrètements de courte durée atteignent également des niveaux exceptionnels. Quelques unités de 1 300 à 1 800 EVP ont été fixées à des taux de 35 à 40 000 $/j.

« Le marché de l'affrètement ne montre, pour l'instant, aucun signe de changement de direction. Mais la reprise actuelle devrait s'atténuer après l'été, alors que l'offre augmente de jour en jour, prévient Alphaliner. Sans les déroutements du cap de Bonne Espérance, il est presque certain que le marché serait déjà en grave surcapacité. Par conséquent, tout réacheminement de navires à grande échelle via Suez pourrait modifier radicalement la dynamique actuelle du marché ». Toute la question est de savoir quand...

Adeline Descamps

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Les revenus des propriétaires de navires restent mitigés au premier trimestre

Le recours à l'affrètement pour compenser l'offre temporairement déficiente ne se matérialise pas encore dans les résultats financiers présenté par les propriétaires de navires (NOO). Le contraste reste saisissant avec les années Covid qui ont fait leur fortune.

Ainsi, les bénéfices du propriétaire grec de navires Danaos ont chuté au premier trimestre de 6 %, à 139 M$, avec un revenu moyen d’affrètement (TCE) de 38 698 $/j contre 40 826 $ de l'année précédente. Pour autant, 99 % de sa flotte est placée en 2024 et 69 % pour 2025 (y compris les nouvelles constructions). Fin mars, Danaos avait 14 porte-conteneurs totalisant 107 946 EVP en construction, dont six de 8 258 EVP au méthanol affrétés à Hapag-Lloyd pour une période de trois ans à 45 000 $ par jour alors que les navires devraient être livrés en 2026 et 2027.

Les bénéfices de MPC Container, société cotée à Oslo, ont également chuté en raison de la baisse des taux et de la réduction de la flotte, à 76,5 M$, en baisse par rapport aux 119,7 M$ de l'année précédente, reflétant un TCE de 27 452 $ versus 30 989 $.

Retour de Seaspan dans les cales sèches

Global Ship Lease (GSL), le septième NOO mondial, a en revanche dépassé les prévisions de revenus des analystes au premier trimestre de l'année après avoir bénéficié d'une série de renouvellements, qui ont ajouté près de 55 M$ à ses revenus. La société cotée à la bourse de New York a affiché des revenus d'exploitation de 179 M$, en hausse de 13 % par rapport à l'année précédente et un résultat net ajusté de 89 M$ (+ 13 M$ par rapport au premier trimestre 2022).

Les bénéfices de Costamare ont bondi (75 M$ pour les trois premiers mois de l’année contre 46 M$ un an plus tôt) mais l’armateur l’attribue à ses affrètements de vraquiers (39 unités), une diversification récente. Toutefois, au niveau des conteneurs, le NOO a fixé 97 % et 80 % de sa flotte de 68 navires porte-conteneurs pour 2024 et 2025.

Un signe ? Seaspan, l’actuel plus grand fournisseur de tonnage au monde dans le secteur du conteneur, est de retour sur les chantiers avec des commandes pour dix porte-conteneurs à double carburant de 13 000 EVP après s'être abstenu pendant près de trois ans. Livrables en 2027 et 2028, ils feraient tous déjà l’objet de contrats avec ONE (6), actionnaire de Seaspan, et Maersk (4).

Selon le Bimco, la part de la flotte des porte-conteneurs affrétés est tombée à 40 % en capacité (11,2 MEVP) contre 50 % en 2012, son niveau le plus bas depuis 2002
« Dans les années à venir, la part de la flotte affrétée continuera à diminuer. Les carnets de commandes des armateurs sont passés de 3,4 à 1 MEVP en deux ans seulement. Ils ne représentent plus que 16 % du carnet de commandes total », indique Niels Rasmussen, analyste en chef au sein de l’association des armateurs.

A.D.

 

 

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