L’Union Maritime et Portuaire de France « en appelle à la raison ». Malgré sa représentativité et son poids économique, la fédération professionnelle des sept Unions maritimes et portuaires s’étonne toujours d’être exclue du process de création et de la gouvernance de l’établissement public de l’axe Seine qui doit être ratifié par le Conseil d’État prochainement. Les acteurs portuaires revendiquent au moins un siège dans le futur conseil de surveillance unique.
21 juin 2019, assemblée générale de l'Union maritime et portuaire du Havre (UMEP). La fusion des trois ports du GIE Haropa – Le Havre, Rouen et Paris –, en un établissement unique à caractère industriel et commercial (Epic), occupe une bonne partie des échanges. « Il faut être au cœur du réacteur. Il s’agit d’être dans l’organe qui prend les décisions, soit le conseil de surveillance, soit le conseil d’administration, avec une voix délibératoire et non consultative. Aujourd'hui, notre parole n'est que consultative. Et ce n'est pas acceptable ! », tonne Michel Segain, à la tête de l’organisation qui fédère les différentes interprofessions portuaires du Havre depuis 2015.
25 septembre 2020, assemblée générale de l’UMEP. Alors que les acteurs portuaires se désespèrent de voir la stratégie maritime et portuaire promise par le gouvernement prendre forme, la question de la gouvernance et de la représentativité est toujours prégnante. Le transitaire havrais, également président du Conseil de développement du port du Havre, en fait même le préalable à toute stratégie nationale maritime et portuaire. « Si l’État continue d’ignorer les partenaires privés locaux des ports en ne les mettant pas dans le cœur du réacteur avec un droit de vote délibératoire, nous irons à l’échec. » Le transitaire havrais va même plus loin en avançant l'idée d'une représentation des ports ou des unions portuaires au sein des conseils d'administration respectifs de Voies navigables de France (VNF) et de la SNCF. Là encore, pour peser sur les décisions.
Pavé dans la mare
Michel Segain, qui plaide inlassablement pour avoir son mot à dire et faire entendre la voix des entreprises privées, craint surtout un « vulgaire copier-coller » du système actuel. L’Umep a toujours soutenu l’idée que la présence des unions maritimes et portuaires serait une garante évitant l’écueil des conflits d’intérêts. Si l’État persévère à les ignorer, signifiait-il il y a encore quelques mois, le président de l’Umep et de l’UMPF « n’exclue pas d’intervenir directement pour jeter un pavé dans la mare », sans pour autant dévoiler les ressorts de son avertissement.
L’homme a de la suite dans les idées. Alors que le Conseil d’État doit donner son avis juridique sur le texte de l’ordonnance qui ratifiera l’intégration du trio portuaire, il porte avec son titre de président des sept Unions maritimes et portuaires françaises et de cinq unions ultramarines « une requête devant le Conseil d’État afin qu’une relecture du texte soit faite et que la voix des entreprises privées soit enfin entendue. »
Déni de représentativité
En dépit de leur représentativité – 2 000 sociétés et près de 180 000 professionnels « qui investissent des moyens humains, techniques, financiers et organisationnels sur les territoires portuaires et au-delà » –, le président regrette que sa « fédération n’ait jamais été approchée de près ou de loin pour participer à la création de l’établissement public de l’axe Seine. Cette création revêt un rôle majeur dans la structuration de la gouvernance portuaire de demain qui supplantera la stratégie nationale portuaire pour laquelle nous avons été entendus et qui n’a toujours pas été publiée. »
En principe, l’organisation doit hériter d’un siège dans chacun des trois conseils de développement territoriaux ainsi que d’une représentation dans le conseil de l’axe Seine. Pour rappel. Stéphane Raison a été nommé à la direction générale de Haropa, à compter du 1er juin 2021, date à laquelle la fusion devrait être actée. Après avoir laissé des rivalités picrocholines se développer, le gouvernement a finalement tranché en faveur du Havre pour la localisation du siège social du futur établissement portuaire unique.
Adeline Descamps