Étape importante dans l'extension du port de Kribi appelé à changer de catégorie

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Huit ans après son attribution à un consortium composé notamment par Africa Global Logistics (ex-Bolloré) du groupe MSC et CMA CGM, le port à conteneurs camerounais de Kribi vient de franchir une étape importante dans son programme d'extension en cours qui va lui permettre en 2025 de porter sa capacité à plus d'1 MEVP et d'accueillir des navires jusqu'à 11 000 EVP.

Huit ans après l’attribution de sa gestion pour 25 ans à un consortium constitué d’actionnaires camerounais, de Bolloré Africa Logistics (auquel s’est substitué Africa Global Logistics avec le rachat des activités portuaires africaine de Bolloré par MSC en 2022), de CMA CGM et de China Harbour Engineering Company (CHEC), le port à conteneurs greenfield de Kribi entame une seconde vie. Les travaux d'extension, qui porteront son linéaire de quai à plus de 1 000 m, viennent de franchir une étape avec la livraison de cinq grues navire-terre ultra-larges (STS) et de deux portiques.

Le Kribi conteneurs terminal (KCT) ne dispose actuellement que d'un quai de 360 m et équipé de deux grues de quai. Il triplera de taille, une fois la deuxième phase finalisée, prévue en 2025, avec l’ajout de 715 m et l’apport de cinq grues supplémentaires. Il devrait alors être en mesure d’atteindre le million de conteneurs manutentionnés (EVP), comme il avait envisagé lors de sa mise en service en 2018, et sera dimensionné pour traiter des 11 000 EVP.

Le terminal en eaux profondes (16 m) accueille chaque semaine les porte-conteneurs de 7 500 à 9 500 EVP déployées sur la boucle Asie-Afrique opérée conjointement par CMA CGM (ASAF), Cosco (WAX4), Maersk (FEW6) et Hapag-Lloyd (AWA). Il est aussi une escale de deux des service Europe-Afrique de CMA CGM (Euraf 4 et 5) et d’un service intra-africain de l’armateur français.

Validée il y a deux ans, la phase 2 du complexe portuaire ne concerne pas le terminal voisin, le Kribi Multipurpose Terminal (KMT), un terminal polyvalent exploité par l’indien ICTSI.

Concurrence pour Douala avant tout

Présenté comme un complément de l’offre de services du port de Douala par la communication politique, Kribi est d’abord une concurrence pour le premier port camerounais, distant de 125 km au nord, mais limité dans ses capacités par la faible profondeur de ses chenaux. De fait, le port greenfield de dernière génération, qui doit sa sortie de terre grâce à des fonds chinois, s’affirme comme la principale porte d’entrée des marchandises pour le Cameroun et son hinterland, à savoir le Tchad et la République Centrafricaine, là où il y a des « corridors » (tout-route) qui permettent de drainer des flux.

Inaugurée en mars 2018 avec pour double ambition de devenir un hub concurrent de Pointe-Noire et un port gateway pour les marchés enclavés de l’Afrique centrale, Kribi a dû se réinventer, rappelait en mai, à Marseille, Michael Mama, le directeur du développement du port autonome camerounais. Le représentant de l’autorité portuaire intervenait dans le cadre d’un colloque organisé par Expertise France (Agence française de développement) sur les corridors maritimes et logistiques et la stratégie européenne de Global Gateway, réponse de l'UE aux nouvelles routes de la soie.

Conteneur, un choix payant

« Kribi devait développer l'export du minerai de fer, la transformation, l'import de substitution. Aucun de ces projets n’a vu jour car personne n’y a cru.
Donc, nous sommes allés sur le conteneur. Le choix s'avère payant aujourd'hui. CMA CGM a d’abord appréhendé notre port dans une logique de transbordement. Mais cette approche n’était pas la nôtre à la base. Kribi doit être un port domestique parce que c'est ce trafic qui apporte des volumes et créé de la valeur
», indique-t-il.

Aujourd’hui, si Kribi a encore un déficit d’infrastructures par rapport à Douala, ils sont à parité en termes de parts de marché, soutient Michael Mama, qui appelle au développement de corridors multimodaux. « Il y a bien un réseau ferré qui part de Douala jusqu'au nord du Cameroun, qui permet de toucher le Tchad, et la République Centrafricaine. Mais ailleurs, c'est du 100 % route. C’est une vraie problématique pour le développement des flux et l’accès aux pays limitrophes enclavés ».

Ascension météorite

Sur les 759 MEVP manutentionnés dans les terminaux à conteneurs de plus d’1 MEVP, les 11 premiers ports africains y contribuent à hauteur de 28,86 MEVP, dont moins de 10 MEVP pour les marchés de l’Afrique centrale et de l’Ouest. Aucun port de ce marché ne manutentionnait plus de 500 000 conteneurs en 2007 alors qu’en 2017, Lomé (1,9 MEVP en 2023) et Lagos (1,2 MEVP) sont devenus millionnaires et depuis, Tema (1,19 MEVP) les a rejoints.

Entre temps, selon les publications de la fondation Sefacil, principal centre de ressources sur les ports et les stratégiques logistiques en Afrique, la croissance des ports du golfe de Guinée (de San Pedro à Lagos) a pris de vitesse les deux autres rangées portuaires (Dakar-Monrovia et Douala-Luanda). Erigé en hub régional par MSC, le Lomé Container Terminal s’est imposé comme le premier terminal à conteneurs ouest-africain, multipliant par quatre ses manutentions en une décennie, indique Yann Alix, le fondateur de Sefacil. Tema (Ghana) a surclassé son rival régional Abidjan et s’est imposé comme la principale porte d’entrée de la côte occidentale et des marchés enclavés du Sahel. Kribi pourrait être gêné par Badagry et Ibom, les « nouvelles solutions portuaires » du Nigeria.

Adeline Descamps

 

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