En conflit depuis fin novembre, la Fédération Nationale des Ports et Docks CGT passe à un autre mode pour exprimer ses revendications, suspendant « dans un souci d'apaisement » son mouvement social dans les ports, prévu initialement sur trois jours les 16, 22 et 27 février. Les usagers du port ont été épargnés par la journée du 22 février et vont surtout ne pas avoir à subir l'opération « ports morts », qui était programmée le 27 février.
La levée de camp fait suite à un engagement du gouvernement « d'engager un cycle de de négociations au cours du mois mars », indiquent les dockers, sans autres précisions. Les ouvriers portuaires partent du principe que l'entame des discussions va nécessairement (« impérativement ») répondre « aux attentes légitimes » de la profession. En cas d'échec, la fédération informe d'ores et déjà qu'elle est « prête à repartir au combat et à en élever le niveau dès le mois d'avril ».
La précédente vague, début février, avait été particulièrement suivie dans les grands ports maritimes de Marseille, du Havre et de Rouen mais aussi dans de plus petits, comme à Lorient (tous les dockers à l’arrêt, grutiers et mécaniciens principalement) ou à Brest (une centaine d’ouvriers concernés).
L'exécutif peu réceptif
Pour autant, après une série de grèves de trois jours début février et une vague fin novembre, le gouvernement n'a pas été très réceptif aux demandes de la CGT Ports et Docks.
Le syndicat attend une reconnaissance de la pénibilité de leurs conditions de travail, afin d'obtenir une meilleure retraite anticipée, alors qu'ils sont soumis aux horaires décalés et aux astreintes, que « de nombreuses personnes souffrent de troubles musculosquelettiques et sont confrontés à l'amiante transportée par les navires », avait justifié Christophe Claret, secrétaire général CGT des dockers du golfe de Fos-sur-Mer, à l'AFP.
En termes plus clairs, ils souhaitent que la loi sur les retraites, promulguée le 14 avril 2023, ne s'applique pas à leur communauté. Grâce à un accord de branche, les dockers peuvent valider leur carrière complète en partant quatre ans avant l'âge légal, à 58 ans. Or, la nouvelle loi les oblige à faire deux ans de plus (60 ans donc).
Niveau d'investissement massif
Les revendications débordent largement du seul cadre de l'application de la réforme. Ils attendent également du gouvernement un niveau d'investissement massif (10 Md€) dans les infrastructures portuaires. Des revendications non sans lien avec les inquiétudes découlant des mutations en cours (transition énergétique) dans les ports.
Les dockers et les personnels de la manutention portuaire du Golfe de Fos sont particulièrement proactifs sur ce point, ayant ramassé un ensemble de propositions dites constructives dans un document intitulé, avec esprit, « Après Marseille en grand, le Port de Fos en grand ». Une paraphrase du « plan Marseille en grand », vaste programme de 15 Md€ d'investissements publics lancé par Emmanuel Macron en 2021 et censé transformer la ville de Marseille.
À l'annonce de cette nouvelle série de perturbations sur les quais, l’Union des Entreprises de Transport et de Logistique de France (Union TLF), qui représente les intérêts des métiers du transport et de la logistique, n'était pas restée sans voix, agacée par cette énième crise portuaire, alors que les chargeurs et commissionnaires sont percutés par la crise de la mer Rouge qui déstabilise le commerce mondial.
TLF avait alors appelé à des « mesures structurelles » au travers d’un « plan d’urgence concerté » à actionner en cas de mouvements sociaux.
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