Près de deux ans de vie partagée plus tard, les trois ports du Havre, Rouen et Paris formant le premier ensemble fluvio-maritime créé en France ont présenté en début d’année le bilan d’un premier exercice plein avec changement d’échelle. Un exercice insuffisant pour faire la révolution dans les trafics mais qui témoigne d’un autre cap. En 2022, le trafic maritime de Haropa Port s’est élevé à 85,1 Mt, en hausse de 1,9 %. En haute mer, il n’était pas du tout évident que le premier port français pour le conteneur réitère son exploit (à l’échelle nationale) de l’an dernier, à 3,092 MEVP. Il se maintient au-dessus de la barre symbolique en faisant légèrement mieux, avec 3,102 MEVP (+ 0,3 %). En tonnage, en revanche, la boîte s’affaisse de 4,6 % (28,44 Mt), résultant « d’un peu moins de transbordements et d’un peu plus de conteneurs vides », explique Stéphane Raison, directeur général de l’établissement portuaire unique.
À l’instar de Dunkerque, le petit dernier du range nord a fait mieux l’an dernier que les grands voisins nord-européens où le conteneur est depuis deux ans sanctionné par les reports d’escales et la congestion des terminaux. Mais la grande affaire de demain pour Le Havre reste la concrétisation des annonces du leader mondial du transport maritime de conteneurs, MSC, qui a promis 700 M€ d’engagements financiers dans la foulée de sa mainmise complète sur deux des trois terminaux de Port 2000.
« Un tel niveau d’investissement ne s’était pas observé depuis longtemps », souligne Stéphane Raison, qui a beaucoup d’attentes en termes de nouvelles lignes, de trafics, voire de récupération de volumes. « C’est un élément nouveau pour développer le transbordement au Havre, mais ce n’est pas que cela. Ce hub va nous apporter des volumes complémentaires en hinterland car on aura des lignes supplémentaires. On a une partie du trafic français qui passe aujourd’hui par les terminaux de MSC à Anvers et qui pourrait revenir au Havre. » Potentiellement. MSC opère actuellement une trentaine de services à Anvers mais dix-neuf au Havre.
Alors qu’une guerre aux portes de l’Europe a touché une région essentielle au système énergétique européen, les vracs liquides terminent l’année en hausse de 4,7 % (40,1 Mt) dont près de 19 Mt de pétrole brut (+ 23,1 %). Les deux raffineries de l’axe Seine ont donc fonctionné à plein régime. Les produits raffinés ont, eux, dévissé de 10,6 % (15,5 Mt).
En 2024, du moins espère la direction, le FSRU (Floating storage and regasification unit), un méthanier de regazéification de 170 000 m3 opéré par TotalEnergies avec GRTgaz, l’opérateur du réseau de transport de gaz en France, devrait apporter 5 Mt de flux par an.
L’établissement portuaire tire également profit de la campagne céréalière qui a offert à Rouen, premier port céréalier européen, un trafic de 8,6 Mt sur les quelque 14 Mt de vracs solides. Avec 22,4 Mt, l’établissement de Rouen de Haropa Port apporte une quote-part de 26,3 % au trafic global du premier ensemble portuaire français. En revanche, après avoir bien profité des grands chantiers sur l’axe Seine, quand ils étaient dans des phases nécessitant beaucoup de matériaux, l’ensemble portuaire accuse une chute des agrégats de 4 % (2,3 Mt), témoignant d’un cap dans l’agenda de certains chantiers, à moins que cela ne vienne de la hausse particulièrement dissuasive des prix des matières premières. Pénalisé par les problématiques des constructeurs automobiles qui ont dû suspendre la production faute notamment de semi-conducteurs, le roulier a perdu 11 points de pourcentage avec 265 000 véhicules. La jeune société portuaire a dégagé un chiffre d’affaires de 375 M€ en 2022 (352 M€ en 2021). Les recettes domaniales, alimentées aux deux tiers par la logistique, y ont contribué à hauteur de 56 %.