2022 : une année à grèves dans les ports

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Encore en convalescence après les deux ans de pandémie et secoué par la guerre en Ukraine, le secteur du transport maritime espérait en rester là. C’était sans compter avec la grogne sociale, elle-même amplifiée par l’inflation, qui s’est traduite par des revendications portant sur les conditions de travail… Et un ralentissement de l’activité dans certains ports.

2022 restera dans les annales portuaires comme celle d’une année syndicale à partir de juin. Des revendications sociales ont donné lieu à des débrayages en Allemagne, en Belgique et au Royaume-Uni. Outre-Rhin, où jusqu’à trois-quarts des employés portuaires sont syndiqués, les sept cycles de négociations entre le syndicat ver.di (12 000 dockers) et la fédération patronale ZDS (58 entreprises concernées par la convention collective des travailleurs portuaires) ont traîné en longueur, débouchant d’abord sur plusieurs « grèves d’avertissement » dans les ports de Hambourg, Bremerhaven et Wilhelmshaven, puis sur un moratoire estival de fin juillet à fin août, le temps de tenir trois autres cycles de négociations avant que les négociations sociales n’aboutissent à la rentrée de septembre 2022. Les protestations ont largement paralysé la manutention des marchandises et contribué à allonger les temps d’attente des feeders à Bremerhaven et Wilhelmshaven.

Aguerri par la grève générale du secteur public en mai aux trois niveaux du pays – fédéral, communautaire et régional – qui a perturbé de nombreuses opérations portuaires, le port d’Anvers se préparait alors à être impacté en ricochet par l’appel au débrayage des 21, 23 et 25 juin lancé au niveau européen pour protester contre les conditions d’emploi et l’absence de dialogue social, ainsi que le manque d’investissement dans le secteur public. Le 31 mai, la plupart des pilotes ont observé la grève et les écluses ne fonctionnaient pas alors que le deuxième port européen faisait face à la congestion liée aux arriérés post-Covid. Finalement, le mouvement n’a pas été très suivi dans les ports belges. Au Royaume-Uni, dès le 20 juillet, des centaines de dockers de Liverpool se disaient prêts à déclencher une grève massive dans le cadre d’un conflit portant sur les salaires et les conditions de travail. Suite à l’appel du syndicat Unite, quelque 1 900 dockers sur 2 500 ont suspendu le travail dès le 21 août à Felixstowe, port stratégique pour les importations conteneurisées du pays (40 %) qui traite en moyenne 80 000 à 100 000 EVP par semaine et où s’opèrent 75 mouvements de trains intermodaux par jour. Dans le terminal exploité par Hutchison Ports, la revalorisation salariale de 7 % et la prime inflation de 500 £ proposées par la Felixstowe Dock and Railway Company ont été rejetées par le syndicat avant de donner lieu à des semaines de blocages à répétition.

À Liverpool, où le deuxième groupe portuaire du Royaume-Uni, Peel Ports, traite plus de 70 Mt de marchandises chaque année et 900 000 EVP, les 500 affiliés au syndicat Unite et employés par Mersey Docks and Harbour Company (groupe Peel Ports) ont également répondu en nombre aux appels de leur syndicat. Les deux ports anglais ont ainsi enchaîné les stop and go jusqu’en octobre.

Les déports vers d’autres ports nord-européens consécutifs à ces mouvements ont mis sous tension quelques terminaux déjà congestionnés.

Opérations port mort

Dans les ports californiens, où le contrat entre dockers et employeurs a expiré depuis le 1er juillet 2022, les discussions entre l’International Longshore and Warehouse Union (ILWU) pour les dockers et la Pacific Maritime Association (PMA) pour leurs employeurs n’ont toujours pas abouti et ont tendance à se tendre sur les questions salariales et l’automatisation de la manutention. Une rupture des négociations entre l’ILWU et la PMA en 2002 avait paralysé pendant dix jours les 29 ports de la côte Ouest concernés par ce nouvel accord, nécessitant l’intervention du président Bush. En 2015, ils ont été congestionnés pendant près de quatre mois, suscitant l’intervention de l’administration Obama.

Avec la crise du coût de la vie qui touche la plupart des pays, les grèves dans les ports se sont multipliées au cours des premiers mois de l’année 2023, en particulier en Europe. Quant à la France, les mouvements sociaux ont été indépendants des accès de fièvre inflationniste. Comme en 2019, ils ont pour racine la réforme des retraites. Comme cette année-là, les opérations « port mort » ont mis les infrastructures à l’arrêt et les chargeurs sur les nerfs.

Les ports nord-européens à la peine

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