En 2022, la manutention portuaire a continué d’inspirer les armateurs de la ligne régulière qui ont multiplié les prises. Et de belles prises, de celles qui claquent. De petit faiseur en Afrique, MSC est devenu un colosse d’un jour à l’autre en emportant au prix fort l’empire portuaire africain que Vincent Bolloré aura mis des décennies à édifier grâce aux acquisitions de la Scac (1986), de Delmas-Vieljeux (1991) et la Saga (1997). Sans doute le premier réseau de logistique intégrée du continent avec ses 42 ports, ses seize terminaux à conteneurs, ses sept terminaux rouliers, ses concessions ferroviaires une quantité industrielle d’entrepôts…
L’armateur suisse de porte-conteneurs est aussi à la manœuvre, via sa filiale portuaire Terminal investment ltd (Til), dans ce petit séisme havrais qu’est la sortie du dernier manutentionnaire indépendant (surtout non-armateur) et à capitaux français, Perrigault SA, qui était l’associé de MSC dans la société Terminaux de Normandie (TN) à Port 2000 dont il a acquis les parts.
La fin d’une histoire, le début d’une autre. Compte tenu des liens capitalistiques, mouvants et enchevêtrés, MSC/Til se retrouve au contrôle de deux terminaux de Port 2000 face à Terminal de France (TDF), exploité par Générale de Manutention Portuaire (GMP), dont est actionnaire à 50,2 % Terminal Link (CMA CGM + China Merchants) et Icon Infrastructure, un fonds d’investissement basé à Londres qui s’est substitué à DP World dans le cadre d’une restructuration des participations de l’opérateur émirati. Deux des trois premiers armateurs mondiaux se retrouvent ainsi aux commandes des deux premiers ports français.
MSC/Til a étendu son emprise au Havre et à Marseille Fos, via Seayard, dont il est actionnaire à hauteur de 50 % avec APM Terminals et du chinois Cosco.
CMA CGM est présent à Fos (avec Eurofos) et au Havre (avec GMP) via la société Portsynergy dont il est actionnaire avec l’opérateur émirati DP World et le géant portuaire chinois China Merchants Port. L’armateur français règne en maître à Dunkerque où il est seul.
L’année 2022 a également été celle d’un ancrage tricolore sur les quais des deux portes d’entrée du continent nord-américain pour le fret conteneurisé avec le retour à Los Angeles de CMA CGM et son positionnement à NewYork-New Jersey.
Enfin Hapag-Lloyd semble vouloir rattraper son retard dans la manutention portuaire. En témoigne ses successives prises de participation, souvent aux côtés du manutentionnaire allemand Eurogate.
En mai dernier, le duo a notamment été retenu pour exploiter et gérer pendant trente ans un nouveau terminal à Damiette en Égypte où les intérêts maritimes s’aiguisent.