Si la France est très en retard sur ses voisins d’Europe du Nord pour le déploiement des éoliennes en mer, le Grand port maritime de Nantes-Saint-Nazaire, lui, est en avance sur les autres ports français. Tout d’abord par la présence de la première et unique éolienne, à ce jour, en mer française. Installée au large du Croisic, la turbine Floatgen est équipée de la fondation Ideol et est dotée d’une capacité de production de 2 MW. Expérimentale, elle a été assemblée à Saint-Nazaire, au bassin de Penhoët, avant d’être remorquée en mer et d’entrer en production en septembre 2018. L’avance de Nantes-Saint-Nazaire tient aussi au champ offshore de Guérande, premier en exploitation d’ici la fin de l’année. Le port se préparait de longue date à cette échéance. Un terre-plein de 12 ha a été aménagé à Saint-Nazaire, près de la forme Joubert, pour le pré-assemblage des éoliennes. Il jouxte un quai renforcé pour recevoir des colis lourds à raison de 15 t/m2.
Bigue de 400 t
Le port s’appuie aussi sur la filière éolienne et ses industries déjà implantées autour de l’estuaire de la Loire. Montoir-de-Bretagne accueille ainsi l’usine de turbines Alstom inaugurée en 2013. Aujourd’hui exploitée par General Electric, elle fournit les 80 nacelles destinées au site de Guérande, stockées sur la plateforme d’assemblage de la forme Joubert dès septembre 2020.
Les grandes manœuvres ont véritablement commencé en avril 2021 avec le déchargement du transformateur qui permet le raccordement électrique au réseau terrestre et pour lequel une grue bigue de 400 t a été sollicitée. À la même période, Saint-Nazaire a réceptionné les premiers mâts, débarqués de navires conventionnels grâce à deux nouvelles grues mobiles acquises par le port et installées quai de la Prise-d’Eau.
Manutentions massives
En mai, c’est à Montoir, au terminal des marchandises diverses et conteneurs, qu’ont été déchargés une centaine de kilomètres de câbles destinés aux connexions des éoliennes entre elles. L’opération a été réalisée par LD TravOcean et le navire Arubaborg, spécialisé dans la pose de câbles sous-marins. Les premières pales sont arrivées fin mai 2021 en provenance d’Espagne. Chaque pale de 30 t et mesurant 75 m de long a été déchargée quai de la Prise-d’Eau, là encore grâce aux deux grues mobiles jumelées. À l’été, la sous-station électrique, construite par les Chantiers de l’Atlantique, a été installée en mer. Les Chantiers en ont déjà produit pour des champs d’éoliennes en Belgique et fourniront aussi dans les années à venir deux autres parcs installés par EDF à Courseulles-sur-Mer et Dieppe-Fécamp. Ces éléments de plusieurs milliers de tonnes sont manutentionnés au bassin à flot de Saint-Nazaire. Ils génèrent peu de trafic portuaire, mais la fabrication de la sous-station elle-même produit un flux de colis industriels et d’éléments conteneurisés fournis par des sous-traitants et accroît aussi l’activité industrielle sur le port.
Colis lourds en hausse de 34 %
Sur l’année 2021, le trafic de colis lourds à Nantes-Saint-Nazaire a augmenté de 34 %, dopé par les importations de composants industriels liés à Guérande. Les fondations de ce parc sont constituées de monopieux construits par Eiffage en Pologne, assemblées à Anvers, puis stockées à La Rochelle, d’où elles sont acheminées avant installation. Cette solution rochelaise a été retenue par manque de place dans l’estuaire de la Loire. L’aménagement des fondations, entamée fin 2021, devrait être achevé fin mai par le groupe belge spécialisé DEME. Début avril, un autre prestataire belge, Jan De Nul, a commencé à charger les mâts des éoliennes sur son jack-up de 140 m, le Vole au Vent, équipé d’une grue de 1 500 t.
Quais disponibles pour le flottant
La mise en service du parc devrait est annoncée pour la fin de l’année. Mais les premières machines commenceront à fournir de l’électricité avant cette échéance car, raccordées par grappes, elles entreront successivement en production.
Les investissements du port de Saint-Nazaire vont alors se concrétiser. General Electric, tout d’abord, a besoin d’un quai pour l’exportation de ses turbines vers des champs offshore du monde entier, tout comme les Chantiers de l’Atlantique qui en auront l’usage pour expédier des sous-stations électriques. La plateforme d’assemblage des éoliennes, quant à elle, pourra être utilisée comme hub logistique pour les futurs champs d’éoliennes flottantes, dont les besoins en espaces sont d’autant plus conséquents que l’assemblage se fait à terre.